AWS, sous la pression de la concurrence
Du fait de la guerre des prix du cloud dit de commodité, de la maturité croissante du marché du Cloud et de la progression des infrastructures de cloud hybrides, la suprématie d'Amazon pourrait bien être menacée.
Amazon Web Services a incontestablement été le standard du cloud public depuis ses débuts en 2006. Mais avec la guerre des prix du cloud dit de commodité, la maturité du marché du Cloud et la progression des infrastructures de cloud hybrides, la suprématie du groupe pourraient bien être menacée.
Pour son second trimestre, Amazon a publié une hausse de 23% de ses ventes à 19,34 milliards de dollars. Mais sa perte de 126 millions de dollars est supérieure aux prévisions des analystes. Même si Amazon ne communique pas sur les chiffres de ses activités AWS, les informations de ses activités Cloud sont associées à la ligne North America – Other ». Au second trimestre 2014 (bouclé le 30 juin), cette ligne a également décru de 38% d’une année sur l’autre après avoir affiché des taux de croissance de 50 ou 60% ces deux dernières années.
Ce trimestre a été une période très occupée pour AWS. La société a présenté de nouveaux services Cloud, comme Amazon Zocalo, un volume d’EBS soutenu par du SSD, Amazon incognito, Amazon Mobile Analytics et le SDK Amazon Mobile. AWS a également annoncé un nouveau type d’instance généraliste pour EC2. Avec des tarifs démarrant à 0,013$ l’heure, les nouvelles instances T2 forment l’entrée de gamme d’EC2, les moins chères du groupe, a indiqué AWS lors de la publication de ses résultats. « Pour nos clients AWS, nous avons présenté plusieurs fonctions et nous avons réduit de façon substantielle les prix », a souligné Jeff Bezos, le fondateur et CEO du groupe.
Pour alimenter sa croissance, AWS a également recruté « des milliers d’employés l’année dernière », et étendu son infrastructure ainsi que ses ventes au secteur public et aux entreprises », a-t-il ajouté. Tout cela a contribué à provoquer une perte totale de 126 millions de dollars contre une perte de 7 millions de dollars il y a un an.
« AWS est probablement déficitaire », affirme Daniel Beazer, analyste chez Cloudrfp. Selon certains observateurs , lorsque AWS a débuté, la société reposait sur une maigre activité, sans ou avec très peu de coûts associés à la publicité, aux employés, etc… Mais désormais il a pris la voie d’une entreprise de services et doit porter les coûts associés, explique de son côté, Janakiram MSV, expert du cloud et analyste principal chez Janakiram & Associates. « Diriger une entreprise de services IT traditionnels comme IBM, Microsoft ou Oracle coûte cher et a un impact sur les coûts opérationnels d’AWS », soutient-il.
Dans sa stratégie, qui l’oriente vers le statut d’acteur de l'IT d’entreprise, Amazon devrait être amené à multiplier les implantations de datacenters afin de satisfaire aux besoins de ses clients. Le prochain pourrait ouvrir à Frankfort (Allemagne) pour s’aligner sur les besoins des entreprises allemandes en matière de localisation des données.
Le modèle d’AWS repose sur des faibles marges et doit donc conserver des coûts opérationnels à un niveau bas. La progression de Microsoft Azure en tant que concurrent sérieux pèse aussi sur les parts de marché d’AWS, soulignent les analystes. « Azure est bien reçu par les entreprises. Nombre d’entre elles évaluent Azure à chaque fois qu’elles évaluent AWS », explique Janakiram.
Le Magic Quadrant de Gartner portant sur le cloud d'infrastructure (IaaS) place AWS et Microsoft parmi les leaders, Google et IBM parmi les visionnaires et HP, VMware et RackSpace parmi les acteurs de niche.
La progression du Cloud Hybride a également un impact sur un pur acteur du Iaas comme AWS, soulignent les experts. L’IT hybride est la nouvelle norme, précise d’ailleurs Alex Hilton, qui dirige le Cloud Industry Forum. De nombreuses entreprises, comme BP ou encore le Cern ont toutes adopté un modèle hybride. « Actuellement, VMWare n’a qu’un impact réduit dans le Cloud, mais vCHS va commercer à percer sur le marché des fournisseurs de cloud », explique encore Janakiram. « AWS doit composer avec deux types de concurrents. D’un côté, les géants comme Azure, IBM SoftLayer et Google qui peuvent s’engager dans une guerre des prix avec AWS. Et de l’autre côté, de nouveaux acteurs du cloud, comme Digital Ocean et l’Allemand Profitbricks qui donnent encore plus de choix aux clients. »
Clive Longbottom, directeur chez Quocirca, a été surpris par l’ampleur de la perte d’Amazon : « On trouve désormais beaucoup plus d’options comparé à ce qu’on a pu voir auparavant, avec le mastodonte AWS. Avec le modèle de collaboration d’OpenStack, l’arrivée à maturité d’Azure et alors que les plates-formes Xaas (Everything as a service) fleurissent partout sur le marché, AWS doit batailler sur bien plus de fronts qu’avant. »
Selon les experts, même si le marché du cloud progresse à grands pas, AWS estime que sa position est soumise à une pression plus importante, même si le nombre d’entreprises utilisatrices de ses services augmente. Et AWS est désormais suffisamment gros pour avoir un impact sur les chiffres totaux d’Amazon.
« AWS a dû poursuivre sa chasse aux tarifs les plus bas – c’est ce qui nous impressionne, la façon dont il abaisse ses coûts proactivement. Mais, à mon avis, c’est seulement pour anticiper la réponse du marché, en réaction », soutient Longbottom. Ce qui semble d'ailleurs fonctionner : l’usage des services AWS a progressé de 90% d’une année sur l’autre, explique Amazon. Même si les résultats en ont pris un coup.
« Nous vivons dans un monde passionnant. Voir un mastodonte accuser le coup montre combien il est difficile de conserver des posistions tablies et combien le marché reste dynamique », poursuit Longbottom.
« AWS doit simplifier son offre pour conserver sa place sur le marché du Cloud public, assure Janakiram . Actuellement, AWS est devenu trop compliqué avec plus de 30 types de services différents, une tarification complexe et une place de marché fragmentée. » Reste que Selon les estimations, les parts de marché d’AWS seraient 30% plus importantes que celles, combinées, de ses 4 rivaux, que sont Microsoft, IBM, Salesforce et IBM. « AWS dispose toujours de son avantage de pionnier du secteur et reste le n°1 des fournisseurs de Cloud public, mais il commence à faire face à une concurrence de plus en plus vive », conclut Janakiram.
Traduit de l'anglais par la rédaction.