La bataille pour produire une interface 100G Ethernet moyenne portée abordable s'intensifie

Après l’échec de la normalisation d’une interface 100Gigabit Ethernet moyenne portée abordable à l’IEEE, quatre consortiums sont en lice pour produire une interface à même de répondre aux besoins des grands datacenters.

Quatre consortiums tentent aujourd’hui de répondre à la demande des opérateurs de datacenters et des entreprises pour une interface optique Ethernet à 100Gigabit économique et peu gourmande en énergie capable de supporter des distances supérieures à 100 mètres. Le coût des interfaces optiques est une composante majeure de l’accroissement du prix des nouvelles générations d’Ethernet et le 100Gigabit est aujourd’hui la principale victime de cette inflation.

Une interface 100G SR10 est relativement abordable, mais a une portée limitée à 100 m. L’interface LR4, d’un autre côté, peut atteindre 10km mais est tellement coûteuse qu’elle n’est accessible qu’aux seuls fournisseurs de services et opérateurs de télécommunications.

"Notre objectif est de répondre à la demande du marché des grands datacenters en forte croissance », a expliqué le Dr. Mario Paniccia, « Intel fellow » et directeur général du groupe « Silicon Photonics » d’Intel lors de l’annonce à la presse de la création d’un des quatre consortiums qui s’affrontent pour définir une future interface 100G moyenne distance économique, la CLR4 100G Industry Alliance.

"Certains bâtissent des datacenters avec des millions de mètres carrés capables d’héberger de multiples stades de football », a expliqué Andy Bechtolsheim, le fondateur et chief development officer d’Arista Networks, durant la même conférence. La distance entre commutateurs dans ces mêmes datacenters est supérieure à 100 m. Dans bien des cas, elle atteint 500 m, voire 1 ou 2 km ».

"La dissipation thermique et la consommation énergétique sont des problèmes importants pour le marché 100Gigabit, indique Nick Buraglio, un ingénieur réseau travaillant au sein d’un grand réseau de recherche. Nombre d’opérateurs de datacenters en colocation facturent non seulement les mètres carrés occupés par les racks, mais aussi la consommation électrique et ne sont pas prêts à faire face aux besoins d’un grand nombre d’acteurs exploitant du 100Gigabit ».

Quatre propositions pour une nouvelle interface 100Gigabit Ethernet optique

Pour tenter d’apporter une solution à ce problème, plusieurs consortiums et alliances se sont formés pour définir des MSA (multi-source agreements), des standards de fait visant à spécifier une nouvelle interface 100Gigabit Ethernet économique, peu gourmande en énergie et capable d’une portée de 2 km.

L’alliance CLR4 100G, formée par Intel et Arista et qui a notamment le soutien de Brocade, Ciena, Dell, Ebay, HP, Fujitsu et Oracle, propose une nouvelle interface QSFP supportant une portée de 2 km sur une fibre multimode avec 4 canaux CWDM à 25 Gbit en mode duplex (pour mémoire, les optiques actuelles supportent 10 lignes à 10 Gigabit, ce qui oblige à utiliser des câbles plus chers et plus épais). L’objectif affiché est de produire une interface nécessitant des câbles 75 % plus fins, consommant moins de 3,5W et permettant donc de produire des commutateurs denses avec jusqu’à 36 ports par unité de rack.

Face à l’alliance CLR4 100G, Mellanox Technologies et Ranovus ont lancé leur propre groupe en mars dernier l’OpenOptics MSA, pour s’attaquer aux mêmes problèmes. L’objectif est de produire une interface optique dans un module QSFP28 capable de délivrer 100 Gigabit (via 4 canaux WDM de 25 Gigabit dans la bande des 1550 nm) sur une paire de fibres single-mode. L’interface pourrait ensuite évoluer jusqu’à 400 Gigabit et au-delà.

Un troisième collectif, le CWDM4-MSA, soutenu par des fabricants de systèmes optiques Avago Technologies, Finisar et Oclaro ainsi que par le fournisseur de câbles JDSU, a dévoilé sa proposition le même jour qu'Intel et Arista. Les deux initiatives sont similaires, mais le groupe Avago se concentre sur le support de la fibre single-mode plutôt que sur de la fibre dual-mode. L’argument est que le niveau d’atténuation de la fibre single-mode est inférieur à celui de la fibre multi-mode sur de longues distances. Avago et ses partenaires ont reçu en janvier le support d’un 4e groupe le PSM4 MSA, qui vise à produire un module optique capable de supporter des distances allant jusqu’à 500 m.

Une profusion née de l’échec de l’IEEE à normaliser une 100 Gigabit Ethernet à moyenne portée

L’échec de l’IEEE à normaliser une interface 100 Gigabit Ethernet moyenne portée abordable est en grande partie du à la multiplication des initiatives « propriétaires ». « Lorsque le vote à l’IEEE a échoué en juillet dernier, il n’y avait pas de standard unique pour une interface optique 100 Gigabit abordable », explique Bechtolsheim. « Il était prévisible que les acteurs de l’industrie qui souhaitaient voir de telles interfaces émerger commenceraient à former des MSAs. Le problème est que l’on ne peut plus attendre neuf mois de plus pour voir émerger une nouvelle spécification. »

Tous les protagonistes s'accordent à dire qu'il est nécessaire de s’appuyer sur des interfaces QFSP plutôt que sur des interfaces CFP qui s’appuient sur 10 canaux à 10 Gigabit.

« Nous avons longtemps été prisonniers d’interfaces basées sur la technologie CFP et ces dernières sont par nature très coûteuses », explique Eric Hanselman, l’analyste en chef du cabinet 451 Research. « Si nous pouvons migrer vers un système avec des canaux de 25 Gigabit de façon ordonnée, et avec une architecture de connecteurs plus économique, cela pourrait servir de déclencheur à une adoption en masse du 100 Gigabit Ethernet. »

Hanselman explique que les fondements technologiques derrière ces propositions sont solides. Le défi est de parvenir à un consensus suffisamment large pour que les fabricants puissent commencer à fabriquer et à vendre ces nouvelles interfaces en volume pour faire baisser les prix.

Avec la contribution de Shamus McGillicuddy, searchnetworking.com

 

 

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