Salaires IT en 2014 : ni gel, ni hausse
Dans la continuité de 2013, sur un marché de l'embauche IT qui reste animé, les grilles de salaires des informaticiens ne devraient guère évoluer en 2014, selon le baromètre du cabinet Hays.
Une hausse moyenne de 1,5% soit près de deux fois le taux d'inflation 2013 (+0,8 % en moyenne sur l'année): telle est la tendance selon laquelle ont évolué, et continueront d'évoluer probablement en 2014, les salaires des informaticiens selon les relevés du cabinet de recrutement Hays. Une estimation qui ne figure d'ailleurs pas dans la présentation annuelle de l'étude prospective de ce cabinet, tant elle risque de masquer la disparité des situations, selon les métiers et spécialités IT. Disparité qui se confirme pour 2014.
Certes, depuis 2012, le secteur IT n'échappe guère aux incertitudes de la conjoncture et à l'attentisme des entreprises, tout en se distinguant cependant par une obligation de maintenir un certain niveau d'embauche, ne serait-ce que pour suivre les évolutions de la technologie.
Une spécificité qui transparaît dans les grilles de salaires IT qui globalement, d'une année sur l'autre, n'évoluent guère... sauf exceptions notoires.
Pas d'inflation pour les métiers du développement
Ainsi, à comparer les grilles annoncées par Hays pour 2014 et celles de l'enquête 2013, les évolutions sensibles de fourchettes de salaires se situent du côté des métiers systèmes et réseaux. Nous y reviendrons. Pour la catégorie études et développement, « pas d'inflation particulière » souligne l'étude, en dépit de la tension du marché du recrutement sur certaines spécialités. Le ralentissement de l'activité des SSII (« toujours d'actualité », relève l'étude Hays) et une moindre appétence des directions informatiques pour le développement offshore y sont pour beaucoup. « Les entreprises se sont adaptées à un cycle d'embauche rapide face à un marché toujours en mouvement ».
Du coup, les niveaux de salaires des développeurs en début de carrière restent nettement supérieurs au salaire moyen des jeunes diplômés (36-40 k€, brut annuel et 45-50 k€ après deux ans d'expérience). Un barème relativement élevé donc, reflet des difficultés à recruter sur certains créneaux : Java, Linux et plus largement open source, Androïd, iOS et frameworks associés. « Il n'est pas rare que les candidats aient cinq offres en même temps », observe Aude Goufrani, manager régional de Hays Informatique. Et de préciser : « Pour les jeunes diplômés bien formés qui sortent du lot, les salaires se situent entre 37 et 42 k€ ».
Augmentation de la part variable
Mais l'étude ne rend compte que des embauches des entreprises utilisatrices (80% de notre clientèle, précise la représentante du cabinet Hays). Selon les derniers relevés de l'Apec, du côté des prestataires (ESN, ex-SSII), l'heure est plutôt à la modération, voire à la baisse du salaire à l'embauche (35 K€ en moyenne en 2012-2013, de 23 k€ à 36 k€ pour les débutants, de 30 k€ à 53 k€ pour ceux ayant plus de cinq ans d'expérience). Une modération qui, sans doute, influence également les politiques de salaires des employeurs hors ESN. Un des moyens de marquer leur différence afin d'attirer les candidats est l'extension de la part variable de la rémunération (extension qui n'est d'ailleurs pas spécifique au secteur IT, comme le constate l'étude Hays et celle publiée en septembre 2013 par le cabinet Deloitte (selon laquelle neuf entreprises sur dix ont recours au variable pour ajuster les salaires sans gréver leurs possibilités d'augmentation de la masse salariale).
«Pour les développeurs, la part variable peut aller de 5 % jusqu'à 20 % du salaire », note Aude Goufrani. Une nouveauté pour les développeurs, auxquels sont proposés des primes liés aux objectifs, individuels ou collectifs. « Le développeur ne travaille plus dans son coin, on lui demande de s'impliquer et d'échanger avec ses collaborateurs et ses clients », commente l'étude Hays.
Montée du niveau d'exigence en maîtrise d'ouvrage
Peu d'évolution, de même, pour les salaires de base des profils plus fonctionnels que techniques qui relèvent de la maîtrise d'ouvrage ou du conseil (projets ERP et BI inclus). Les « stop and go » des projets en 2013 (premier semestre au ralenti, léger redémarrage depuis septembre) ont eu des répercussions sur le recrutement en quantité et en qualité. « Les entreprises sont frileuses, les processus de recrutement sont rallongés, allant jusqu'à cinq entretiens là où deux suffisaient auparavant », note l'enquête. Les profils alliant la maîtrise technique à une pratique éprouvée de la gestion de projet sont particulièrement recherchés. « Les entreprises misent sur la capacité à gérer un projet dans sa globalité, avec une vision plus stratégique que technique », remarque Aude Goufrani. Et comme d'habitude, les salaires des experts ou spécialistes de projets d'envergure (consultants ERP, chefs de projet ERP) reflètent ce niveau d'exigence (55 à 75 k€ après dix ans d'expérience, voire 70-85 k€ pour les directeurs de projet).
Cloud computing en 2013, e-commerce en 2014
Finalement, ce sont les salaires des métiers de l'infrastructure (systèmes, réseaux et télécoms) qui reflètent de la façon la plus tangible les atermoiements du marché IT. L'an dernier, l'étude Hays invoquait l'arrivée du cloud computing et l'extension de la virtualisation pour expliquer la bonne tenue des salaires de la partie système. Et ce, parallèlement à la forte pénétration des technologies mobiles qui, de leur côté, avait une incidence surtout sur la partie développement. En ce début d'année 2014, la conjoncture économique et le ralentissement de l'embauche en CDI enregistrés en 2013 se font clairement ressentir avec un tassement des salaires des métiers de l'infrastructure (externalisation et sous-traitance aidant).
Sont particulièrement recherchés, car d'émergence récente, les profils réclamés autour des plateformes de e-commerce. « La tendance est à la structuration et à la segmentation des équipes infrastructures, avec l'accent mis pour l'embauche sur la spécialisation autour d'une technologie ou d'un environnement technique ». Résultat : les spécialités rares et recherchées y trouvent leur compte avec une poussée des salaires pour les architectes systèmes et réseaux expérimentés (56 à 60 k€ pour plus de dix ans d'ancienneté dans le métier), de même que pour les experts Open Source, les experts en stockage et virtualisation. Et à l'inverse, une fourchette de salaire quasiment inchangée à tous niveaux d'expérience pour les administrateurs systèmes/réseaux, pour les profils exploitants (techniciens, analystes d'exploitation, techniciens hotline). Et là encore, difficultés à recruter les profils voulus et volonté de modération de la masse salariale aidant, l'allongement des démarches de recrutement est net, notamment du côté des entreprises de taille moyenne. Selon les missions de recrutement confiées à Hays, les grands groupes ont tendance à ouvrir leur embauche aux jeunes sortant d'études pour les faire monter en compétences.
Outre-Manche, 4% d'augmentation
Tous métiers confondus, la progression globale d'environ 1,5% des salaires IT enregistrée en France est loin de rivaliser avec celle des salaires britanniques, pressentie autour de 4% entre 2013 et 2014 (selon les relevés du cabinet Robert Half Technology cité par ComputerWeekly.com). Une hausse tirée notamment par les segments d'activité en vogue et les profils associés tels que les web designers, les ingénieurs sécurité, les équipes de projets décisionnels (BI), les spécialistes des technologies mobiles et les data analysts/scientists. « Il faut aussi y voir l'effet d'un rattrapage, la crise ayant beaucoup plus impacté le secteur IT britannique, avec baisse des salaires depuis 2008, et reprise depuis l'an dernier », remarque Aude Goufrani.