Le permis de conduire devient numérique
Ce 16 septembre, le petit papier rose se transforme en une carte électronique dotée d’une puce électronique sans contact où seront essentiellement stockées les informations déjà imprimées sur le permis. Derrière cette mise en place, qui devrait s’étendre jusqu’en 2033, le déploiement d’un système de gestion complexe qui vise à dématérialiser les procédures et qui remplacera l’actuel fichier, trop désuet.
Après le passeport, puis la carte d’identité nationale, c’est au tour du traditionnel permis de conduire d’entrer dans l’ère numérique. A partir d’aujourd’hui, 16 janvier, le papier rose prend officiellement la forme d’un document plastifié au format carte de crédit, auquel est intégré une puce électronique sans contact.
Désormais chaque nouveau titulaire se verra adresser ce nouveau permis, gratuit. L'ojectif affiché est de faire migrer les 38 millions de détenteurs du permis en France vers ce format électronique. La tâche est certes importante, mais elle s’échelonnera de 2015 au 19 janvier 2033, date à laquelle ce nouveau format devrait être généralisé.
Ce permis à puce est le fruit d’une directive européenne de 2006 qui prescrit la mise en place d’un titre pan-européen. Objectif : proposer un permis commun aux 28 états de l’Union, associé à une uniformisation des catégories (A, B, C...) afin de fluidifier les déplacements inter-états, certes, mais surtout de lutter plus efficacement contre la fraude et la falsification du précieux sésame rose. Selon les chiffres du CNRS, le nombre de permis contrefaits est de l’ordre de 5% à 10% en France. Toujours à des fins de sécurité, indique le ministère de l’Intérieur, une bande MRZ (Machinable Readable Zone - qui peut être lue par une machine) côtoie également la puce électronique.
Une puce sans contact, mais pas de données biométriques
Si la carte d’identité numérique avait reçu deux puces électroniques - l’une régalienne contenant les informations identitaires et biométiques, comme les empreintes digitales de son détenteur, l’autre pour sécuriser les processus d’authentification à des services par exemple - , le permis de conduire, format carte de crédit, s’habille d’une unique puce sans contact, mais ne contient aucune donnée biométrique. Seules sont inscrites les informations déjà imprimées sur le permis : les données liées à l’état civil ainsi que la photographie, puis les droits à conduire, comme la ou les catégories de permis ainsi que la durée de validité, et enfin les autres remarques ou restrictions, comme le port de lunettes par exemple. Ce permis a une date de validité de 15 ans, ce qui est également un des gros bouleversements du titre - qui n’avait jusqu’alors aucune date de péremption.
Gemalto a été retenu par l’Imprimerie Nationale, chargée de la conception et de la fabrication de ce permis numérique. Le groupe, spécialiste de la carte à puce et des solutions d’identité électronique, utilisera pour la fabrication du titre sa technologie Sealys conçues pour les documents d'identité et documents officiels sécurisés. Si pour l’heure, le permis permet essentiellement aux forces de police d’identifier et d’authentifier le permis de conduire et son détenteur, le groupe laisse entrevoir d’autres usages, dans un communiqué de presse : «A terme, le nouveau permis de conduire multi-applicatif pourra intégrer toute une série de services associés supplémentaires, tels que les différents types de permis, l’assurance, les taxes et le certificat du véhicule. En outre, il pourrait permettre l’accès sécurisé à des véhicules de location ou de co-voiturage par le biais de terminaux entièrement automatisés.» Gemalto avait notamment été sélectionné au Royaume-Uni pour un projet identique.
Faeton : nouveau système central
Le vaste chantier du permis numérique, qui s’inscrit également dans une volonté plus large de simplifier les procédures administratives - le permis numérique sera par exemple envoyé directement au domicile des usagers - implique également un remplacement du fichier central des permis de conduire, le SNPC (Système National des Permis de Conduire), par un fichier centralisé baptisé Faeton. Le vieux SNPC, mis en place en 1992, ne pouvant pas supporter les évolutions techniques souhaitées par la directive. Faeton devrait prendre le relai au 1er semestre 2014. «Ce fichier contiendra les données relatives à l'identité du titulaire du permis, à la validité du permis, aux conditions restrictives d'utilisation ou encore à l'aptitude à la conduite automobile. La photographie du titulaire et toutes les pièces justificatives (pièce d'identité, par exemple) seront également conservées dans une base d'archives», indique par ailleurs la Cnil (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) sur son site Internet.
La Commission précise que le détenteur de ce nouveau sésame devra également fournir un numéro de téléphone mobile ainsi qu’une adresse email, pour la délivrance du permis. «Mais ces données seront rapidement supprimées. En revanche, la plupart des autres données seront conservées pendant 10 ans après la date d'expiration du permis»
En outre, la mise en place de Faeton, souhaitée par la directive européenne de 2006, implique également une refonte drastique des systèmes informatiques de l’ensemble de la chaîne du permis de conduire en France. Comme l’indique un site gouvernemental, ce vaste système comportera des fonctionnalités métiers - disponibles sous forme de modules - , issues notamment du monde privé (comme les écoles de conduite), afin de dématérialiser l’ensemble des procédures, de l’entrée à l’auto-école à la remise du titre. «Les demandes seront dématérialisées à la source évitant ainsi les double saisies actuellement réalisées à la fois par les partenaires privés et les les agents de l’Etat», précise ce même site. On remarque par exemple que les inspecteurs du permis de conduire sont censés utiliser depuis janvier 2013 un poste mobile (une tablette tactile 3G) et qui permet de transmettre en direct les résultats de l’examen à Aurige, un système chargé de centralisé les données du candidat - Aurige étant connecté à Faeton. L’objectif est de dématérialiser la gestion des examens. Faeton, dont on imagine le déploiement complexe et difficile, est notamment à l’origine du décalage de la mise en place du permis électronique initialement fixé au 19 janvier 2013.