Sanjay Poonen, SAP : "réduire de 50 % le coût de l'analytique"

En charge des solutions technologiques et de la division mobile de SAP, Sanjay Poonen revient sur la place grandissante de la base de données Hana dans la stratégie du premier éditeur européen. Avec pour cible immédiate : les budgets que les DSI consacrent au décisionnel et aux technologies d'Oracle, Informatica, Teradata, Hyperion, SAS...

Sanjay_PoonenLeMagIT.fr : Lors de Sapphire, SAP a annoncé que Hana allait devenir la plate-forme commune pour toutes vos applications Cloud, y compris celles issues de l'acquisition de SuccessFactors et de Ariba. Qu'est-ce que cela va changer pour les utilisateurs de ces solutions ?

Sanjay Poonen : D'abord, ces logiciels disposent tous les deux de solutions analytiques, celles rachetées à Inform pour SuccessFactors et des analyses de la dépense notamment pour Ariba. Toutes ces applications portées sur Hana seront bien plus rapides. Les utilisateurs pourront analyser plus de données, réaliser plus simplement des analyses prédictives, etc. Passée cette étape, nous utiliserons aussi Hana pour supporter de nombreux processus transactionnels dans le Cloud. Finalement, la même démarche que celle que nous avons suivie dans le monde on-premise, en ciblant d'abord l'entrepôt de données BW avant de nous attaquer à la Business Suite.

LeMagIT.fr : A quelles échéances auront lieu ces migrations ?

S.P. : La partie analytique a déjà démarré, nous en avons d'ailleurs parlé dès 2012. Le volet transactionnel demandera un peu de temps, de premières annonces devraient apparaître l'année prochaine. Et, dans le Cloud, ces transitions seront totalement transparentes pour les utilisateurs.

LeMagIT.fr : Pour votre base installée, quels sont les bénéfices de l'intégration d'Ariba ?

S.P. : Il s'agit de créer le eBay du B2B, rendant plus efficaces les achats et les ventes de biens et services entre entreprises. Nous allons intégrer ce réseau d'échanges à notre ERP, unifier les applications de gestion des fournisseurs (Cloud et on-premise) et perfectionner la couche analytique déployée au-dessus de ce réseau. Notre objectif est de voir chaque client SAP utiliser ce réseau ; car il y fera des économies. Ce qu'a montré Ariba à de multiples reprises.

LeMagIT.fr : Le chiffre d'affaires de SAP dans le Cloud représente environ 5 % du total.  Quel est votre objectif d'ici à un an ?

S.P. : Le rythme actuel s'élève à environ 1 Md$ par an. Notre objectif est de parvenir à doubler ce chiffre d'ici à 2015. Nous avons 200 000 clients dans le monde et, à ce jour, environ 5 % d'entre eux ont acheté des solutions Cloud de SAP. Le potentiel pour le groupe est donc énorme, rien que sur notre base installée. Par exemple, l'intégration de nos solutions RH dans le Cloud (issues de SuccessFactors) et on-premise permet d'imaginer des scénarios où les premières viennent compléter les secondes par exemple pour des filiales ou de nouvelles activités. Mais d'autres opportunités se présentent à nous : un grand nombre de clients de SuccessFactors sont aussi utilisateurs de l'ERP Oracle. Nous devenons ainsi présents chez de nombreux comptes Oracle. Le même constat s'applique d'ailleurs à Ariba sur le volet gestion des fournisseurs. Nous devons nous adapter à ces environnements beaucoup plus hétérogènes : nos solutions Cloud seront optimisées pour les environnements SAP, mais pas dépendantes de ces derniers.

LeMagIT.fr : Quels sont vos arguments contre des pure-players du Saas, comme Salesforce, Netsuite ou Workday ?

S.P. : D'abord, nous avons des solutions best-of-breed au moins aussi riches que celles proposées par ces acteurs. Mais elles sont aussi bien plus intégrées à d'autres pans du système d'information que celles de ces éditeurs, spécialisées sur un unique pan fonctionnel. Il fut un temps où la tendance voulait qu'on achète son CRM à Siebel, son système RH à PeopleSoft ou sa gestion de la supply chain chez i2. On assiste au même phénomène dans le Cloud. Mais, avec le temps, le besoin d'une suite logicielle unifiée va reprendre le dessus.

LeMagIT.fr : Donc la promesse de SAP réside dans la réduction des travaux d'intégration...

S.P. : Oui, tout en gardant des solutions best-of-breed. Et aucun des éditeurs Saas cités précédemment ne dispose d'une stratégie très poussée en matière d'analytique et de mobilité. Voici environ 10 ans que Salesforce tente de percer dans l'analytique, sans succès. Aucune de ces sociétés n'apparaît dans le Magic Quadrant de Gartner sur la mobilité.

LeMagIT.fr : Comment expliquez-vous le récent départ de Lars Daalgard (le dirigeant de SuccessFactors qui avait pris les rênes de l'activité Cloud de SAP) ?

S.P. : Les dirigeants des entreprises doivent faire ce qui les passionnent. La plupart des Pdg d'entreprises rachetées quittent la structure le jour de l'acquisition. C'est le cas chez Oracle par exemple. Nous préférons garder ces dirigeants le temps qu'ils souhaitent : deux ans pour John Schwartz (BO), 18 mois pour John Chen (Sybase). Lars Dalgaard est lui aussi resté 18 mois et souhaite désormais rejoindre une firme de capital-risque [il a rejoint Andreessen Horowitz, NDLR]. Tout en restant un conseiller de SAP, au rythme d'environ une journée par semaine.

LeMagIT.fr : Depuis de nombreux mois, SAP met sur le marché des applications analytiques dédiées à Hana. Est-ce que cela signifie que la plate-forme issue de BO devient de moins en moins pertinente ?

S.P. : Business Objects a toujours été centré sur la visualisation, pas sur le moteur d'analyse. Souvent, BO s'appuie sur une base de données tierce pour ces tâches. Hana est ce moteur de gestion des données. Les technologies de BO, comme Explorer, Lumira, Dashboard Manager, complètent Hana. Aujourd'hui, une pile logicielle analytique complète comprend une base de données OLTP, un ETL, un datawarehouse, un outil de BI, un outil de planning, un autre pour les prévisions. Ce qui signifie, par exemple, acheter les produits d'Oracle, d'Informatica, de Teradata, de Cognos ou BO, de Hyperion et de SAS Institute. Cet ensemble est beaucoup trop cher. Hana permet de réduire le coût total de cet ensemble d'au moins 50 %, via un moteur unique intégrant des fonctions de reporting, de planning et d'analyse prédictive. Avec, au-dessus, des applications spécifiques à telle ou telle industrie.

LeMagIT.fr : Ce qui signifie aussi moins d'activités pour vos partenaires intégrateurs...

S.P. : Oui, c'est le sens de l'histoire. Mais cela libère aussi les intégrateurs, qui peuvent se tourner vers des activités plus stratégiques. Des centaines d'intégrateurs ont d'ailleurs déjà choisi Hana.

LeMagIT.fr : Tous les grands noms de l'IT ciblent leurs discours sur les mêmes sujets : le Big Data, le temps réel et la mobilité. Où résident les spécificités de la stratégie SAP ?

S.P. : Nous avons été les premiers à parler de Big Data dans le contexte d'une architecture moderne, In-Memory. Aujourd'hui, toute l'industrie, IBM, Oracle, Teradata, nous copie, mais ces acteurs sont loin de disposer d'une plate-forme temps réel. Ils tentent de mettre à jour leurs vieilles architectures, basées sur le stockage sur disque. Nous avons deux ou trois ans d'avance sur eux en la matière. Et aucun de ces acteurs n'a une stratégie mobile aussi solide que la nôtre, tant sur la partie applicative que sur la gestion des infrastructures mobiles. Enfin, notre approche est orientée métiers et non technologies. Regardez les cas d'usage de Hana : ils sont toujours tournés vers les problématiques des grands secteurs d'activité où opèrent nos clients.

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