Arnaud Montebourg face aux attentes de la filière robotique française
Au salon Innorobo de Lyon, rendez-vous européen de la filière, l’annonce le 19 mars d’un plan de soutien au secteur de la robotique par le ministre du redressement productif ne contient aucune mesure emblématique. Cependant, elle suscite des attentes, notamment dans le volet de soutien à la filière par l’achat public innovant.
Avec son emphase habituelle, Arnaud Montebourg a présenté son plan France Robots initiatives dont l’objectif est de placer la France parmi les 5 nations leader de la robotique de service d’ici à 2020. Aucun investissement d’ampleur n’a été annoncé par le ministre. Ainsi, les 100 millions d’euros qu’il promet de mettre sur la table sont, en fait, la mobilisation de toutes les forces productives publiques et privées dont le fond d’investissement en robotique, Robolution capital, doté de 60 millions d’euros et initié par Bruno Bonnell. Le plan se concentre sur 5 axes prioritaires dont le transport et la logistique, la défense et la sécurité, l’environnement, les machines intelligentes (usine du futur, cobotique, etc.) et l’assistance à la personne.
La robotique de service en chiffres
L’Europe enregistre un chiffre d’affaires de 5 milliards de dollars qui représente 33 % du marché mondial. La France réalise un chiffre d’affaires de 600 millions de dollars, soit 12% du marché européen (Source : ambassade de France- novembre 2012).
Un des intérêts de cette feuille de route est d’identifier de manière cohérente les freins actuels et d’indiquer les actions qui devront être menées pour faire de la robotique un ressort de croissance. Dans les grandes lignes, il propose de consolider l’effort de recherche, soutenir le développement des PME, favoriser l’émergence de nouveaux marchés par des commandes publiques et améliorer la compétitivité des entreprises grâce aux robots. Par ailleurs, ce plan encourage les entreprises à coopérer sur le plan international et souligne la nécessité de peser sur les normes et la réglementation. Bruno Bonnell, co-fondateur du salon Innorobo et PDG de Robopolis estime que le plan France Robots initiatives est essentiel au décollage de l’écosystème de la robotique et que les sommes en jeu sont largement suffisantes pour donner l’impulsion nécessaire.
Un avis qui n’est pas entièrement partagé par Rodolphe Hasselvander, directeur général du CRIIF, un grand laboratoire francilien de conception et développement de robots qui affirme : « Il y a du contenu dans ce plan mais il faut noter que de nombreuses sources de financement existaient déjà. Elles ont été simplement reprises. Le point qui nous parait le plus important, c’est le soutien à la robotique par l’achat public innovant. En revanche, nous regrettons que le plan ne prévoie pas d’investissement de l’Etat sous la forme de prise de participation dans le capital des sociétés. »
Bruno Maisonnier, fondateur et PDG de la société Aldebaran Robotics qui a crée NAO, le robot humanoïde le plus vendu au monde, souligne que toute initiative est bonne à prendre pour soutenir l’écosystème de la robotique de service : « Je note surtout dans ce plan initié par l’Etat, l’amorce d’une dynamique nouvelle pour la filière robotique. Je suivrai avec grande attention la mise en application des actions évoquées par le ministre ». Il pointe également « le levier de croissance que constitue l’incitation de l’Etatà passer des commandes publiques, dans le domaine de l’assistance à domicile, de la sécurité ou de l’enseignement. »
De son côté, Yves Measson, chargé de développement à l’institut CEA List qui travaille sur des projets de recherche et développement dans les systèmes numériques intelligents (systèmes embarqués, capteurs et Traitement du Signal) souligne : « Ce plan va pérenniser les relations existantes entre le CEA List et les entreprises, que ce soit de très grosses sociétés ou des PME. »
Du côté de la formation supérieure enfin, les écoles d’ingénieurs ont déjà anticipé les futurs besoins des entreprises et certaines écoles prestigieuses comme CPE Lyon offrent déjà des spécialisations en année 5 de cursus, en robotique, intégrant l’électronique ou la mécatronique.
Dans les allées d’Innorobo, nombre de responsables de PME n’ont pas encore pris connaissance du contenu du plan robotique. Une illustration du décalage entre la parole officielle et les réalités du terrain. Cédric Tessier, Pdg d’Effidence, start-up fabriquant des drones et véhicules terrestres, note que, pour l’heure, « il y a trop de niveaux administratifs et trop de guichets. Les délais pour obtenir des financements vont de 6 mois à 1 an».
Dans un climat économique morose, une étude du cabinet Xerfi publiée cette semaine, laisse entrevoir des perspectives de croissance mondiale dans la robotique professionnelle (militaire, agriculture, etc.) de 7% par an entre 2013 et 2015. La France qui a des compétences reconnues dans ce domaine devrait tirer son épingle du jeu tant en termes d’offres que de demande. Un bémol cependant, l’offre des entreprises du secteur robotique professionnelle est très fragmentée et manque de cohérence. La route sera longue et difficile pour lutter avec les meilleurs tels la Corée du sud.
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