Douche froide dans le monde Itanium : Intel revoit en profondeur ses plans pour "Kittson" (partie 2)
Alors que le beau temps semblait de retour dans le monde Itanium, avec un lancement réussi de l'Itanium Poulson, des performances en hausse et le retour d'Oracle sur la plate-forme, Intel vient de jeter un froid en annonçant l'abandon des principales innovations annoncées pour la prochaine génération de puces Itanium, nom de code "Kittson". Le revirement de trop ?
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Quand Oracle enfonce le clou La crise du monde Itanium a atteint son paroxysme en 2011, lorsqu’Oracle, l’un des alliés historiques d’HP a annoncé son intention d’abandonner tout développement pour la puce. Officiellement, Oracle explique alors qu’Intel lui a annoncé son intention d’abandonner l’Itanium et que dans ces conditions, il n’y a pas de logique économique à poursuivre ses développements. La décision d’Oracle, annoncée brutalement, prend HP de court et surtout jette le doute sur le devenir de la puce Itanim. Non que le doute ne se soit déjà installé : en avril 2010, Microsoft a annoncé l’arrêt de ses développements sur la puce, suivi de près par les principaux éditeurs de distributions Linux. La différence majeure est qu’Oracle et HP étaient liés par contrat. La justice va donc finir par contraindre Oracle à faire machine arrière. En décembre dernier, LeMagIT avait pu faire le point sur Itanium avec Didier Maillard, le patron marketing de l’activité systèmes critiques d’HP et avec Stanislas Odinot, un des consultants techniques d’Intel. HP et le fondeur pouvaient alors se targuer d’une double embellie. D’une part, Oracle était de retour sur la plate-forme Itanium et de l’autre, la dernière génération de puce Itanium, nom de code « Poulson » affichait des performances étonnamment élevées. HP se retrouvait alors dans une situation de compétitivité qu’il n’avait sans doute pas connue depuis longtemps sur le marché Unix. Le réengagement d’Oracle et la compétitivité retrouvée de l’Itanium lui permettaient aussi d’envisager plus sereinement le devenir de ses plates-formes OpenVMS et NonStop (ex-tandem), toutes deux basées sur Itanium. HP et Intel, bras dessus, bras dessous, en profitaient derechef pour afficher leur solidarité retrouvée et lever le voile sur le successeur de « Poulson », l’Itanium « Kittson » indiquant même que la roadmap Itanium irait bien au-delà de cette puce.
HP BCS à Intel : Tu quoque mi fili, version moderne ? C’est cette belle mécanique qu’Intel a de nouveau fait dérailler fin janvier. Kittson devait notamment consacrer la convergence des sockets processeurs entre l’Itanium et le Xeon. Il devait aussi continuer à doper les performances de la puce en réduisant sa finesse de gravure. Sans fournir aucune explication, Intel vient d’enterrer ces deux évolutions majeures. “Intel a mis à jour la définition de la prochaine génération de processeur Itanium, connue sous le nom de code ‘Kittson’ » explique ainsi Intel dans un communiqué discrètement publié sur son site et que le fondeur s’est bien gardé de transmettre à la presse. « Kittson sera fabriqué en utilisant le processus de gravure en 32nm d’Intel et son socket sera compatible avec l’actuelle génération de plates-formes Itanium 9300/9500, ce qui fournira aux clients des améliorations de performances, une protection de leurs investissements et un chemin de migration transparent depuis les systèmes actuels. Le modèle de développement modulaire, qui visait à faire converger les Xeon Intel et les Itanium Intel sur un socket commun et sur des cartes mères communes, sera évalué pour de prochaines opportunités d’implémentation ». Des plans de convergence entre les sockets des Itanium et des Xeon existent depuis près de dix ans et originellement, les Xeon et le Itanium auraient dû converger sur un socket commun avec la puce Tukwila (ou Itanium 9300, lancé en février 2010). Cette convergence est un vieux serpent de mer et on pensait qu’avec Kittson, Intel tiendrait enfin sa promesse, ce qui aurait permis à HP de ne plus avoir qu’une plate-forme système pour ses serveurs Xeon et Itanium. Cela aurait notamment permis à Itanium de s’appuyer sur les plus récentes générations de mémoire vive et de bus d’extension (on pense par exemple au support intégré de contrôleurs PCIe 3.x). Las, ce ne sera pas pour cette fois. Pire, alors que Kittson était censé tirer parti des dernières technologies de gravure de la firme, Intel n’utilisera pas son processus actuel de gravure en 22 nm ou son futur processus en 14 nm pour fabriquer la puce. Kittson restera gravée en 32nm, comme l’actuel « Poulson », en clair avec un processus de fabrication qui aura trois ans de retard sur son époque. Les conséquences pourraient être importantes : une réduction de la finesse de gravure aurait permis d’accroître le nombre de cœurs, de doper la taille des caches et sans doute de doper la fréquence, sans impact notable sur la consommation électrique. En restant sur un processus en 32nm, Kittson ne sera sans doute au final qu’un « Poulson plus ». Et ce qu’Intel présente comme une bonne nouvelle, à savoir la compatibilité avec le socket Itanium existant, sous couvert de protection des investissements en place dans les entreprises, pourrait n’être qu’un avis de décès anticipé. Pour son dernier trimestre fiscal publié, le 4e trimestre fiscal 2012, clôturé le 31 octobre 2012, la division BCS d’HP a vu son CA plonger de 25 % à 401 M$. A ce rythme, le business matériel Itanium devrait passer sous la barre des 1,5 Md $ en 2013 (il est à noter qu’HP n’est pas le seul à souffrir et qu’Oracle et IBM – dans une moindre mesure- subissent une érosion similaire de leurs ventes de serveurs critiques). D’ici à en conclure que la dernière annonce d’Intel n’est que le signe avant-coureur d’une mise en maintenance à venir de la gamme Itanium…
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