L’Open Source en France : une filière de 300 petites entreprises en croissance
Les Etats Généraux de l’Open Source ont certes mis en avant la volonté de l’éco-système à se structurer et mettre en place une politique industrielle de l’Open Source en France. Mais quelle est la nature même de cette éco-système. Le CNLL publie une carte d’identité des entreprises du Libre en France.
Une entreprise Open Source en France, c’est une entreprise de moins de 60 employés, qui ne connait pas la crise, qui travaille dans les secteurs du développement, de l’intégration ou de l’édition et qui a des problèmes de recrutement. C’est ainsi - et très schématiquement - que l’on pourrait dresser le portrait de l’entreprise type de la filière Open Source en France, selon le dernier panorama de Conseil National du Logiciel Libre, publié fin janvier.
Cette cartographie de l’éco-système libre dans l’Hexagone permet d'en savoir plus sur un secteur qui pèse environ 2,5 milliards d’euros et représente 6% du marché des services et des logiciels en France (chiffres Pierre Audoin Consultants). Elle met notamment en lumière le fait que cette filière, composée d’entreprises, mais également d’un important tissu associatif et de clusters nationaux, se densifie et cherche à se structurer, comme l'avait déjà montré les premiers Etats Généraux de l’Open Source en France - qui se sont tenus le 21 janvier dernier. De quoi inspirer le gouvernement et la ministre en charge de l’Economie Numérique Fleur Pellerin dont la feuille de route numérique devrait prochainement voir le jour.
Selon le CNLL, le modèle Open Source en France est au coeur du modèle économique de 300 entreprises, essentiellement des TPE /PME. La majorité (160) a moins de 5 salariés. 124 ont entre 5 et 65 salariés. Seulement 15 ont un effectif supérieur à 60 salariés. Ces 300 entreprises forment la partie émergée de l’Open Source en France : 10% de l’éco-système qui servent de catalyseur à l’ensemble de la filière, alors que 90% de l’Open Source reste le fait d'entreprises généralistes et d'industriels, note le CNLL.
Ces 300 entreprises ont créé 30 000 emplois dont 3 000 chez les pure-players du secteur. Mais, et c’est élément qui freine le développement de l’éco-système, presque trois-quart (74%) d'entre elles ont des difficultés à recruter. Rappelons que plusieurs initiatives ont vu le jour pour soutenir la formation et donner de l’élan à l’emploi dans l’Open Source. Citons la Charte Libre Emploi, imaginée par le CNLL, le réseau d’entreprises PLOSS, ainsi que le groupe thématique Logiciels Libres du pôle de compétitivité Systématic. Ou encore la Libre Académie, mise en place par Alter Way.
En dépit de ces difficultés re recrutement, les entreprises de l’Open Source en France « ne connaissent pas la crise », estime le CNLL. 68% ont été en situation de croissance en 2012, et mieux, elles sont 83% à l’envisager pour 2013. Et ce, dans un secteur high-tech pourtant frappé par une crise économique qui dure. La crise serait-elle un catalyseur pour l’Open Source ?
Vers un re-positionnement sur l’édition logicielle
L'autre spécificité des entreprise Open Source hexagonales est qu'elles « ont souvent des métiers multiples », explique le Conseil. 65% dans le développement, 55% dans l’intégration, 33% dans l’édition, 26% dans le conseil et 25% dans la formation. En cela elles souffrent toutefois du même problème que l'industrie informatique en France : un tropisme trop porté sur l'intégration et pas assez sur l'édition de logiciel. Le CNLL invite d'ailleurs la filière à se concentrer davantage sur l’édition de logiciels Open Source. Car, comme l’avait souligné Patrice Bertrand, porte-parole du CNLL et Pdg de la SSLL Smile, lors des Etats Généraux fin janvier, le logiciel s’exporte bien. Un développement de l'édition pourrait donner un élan à l’importante filière libre en France et imposer le logiciel français Open Source sur l’échiquier mondial. La France aurait ainsi une carte à jouer, là où jusqu’alors elle a montré un faible dynamisme. « Dans le logiciel, le marché est mondial, l’Open Source permet une diffusion globale rapide, il conquiert le monde bien plus vite », résume le CNLL dans son rapport. Moins de développement, moins d’intégration, mais plus d’édition serait donc la recette du succès.
Reste que la filière est encore fragile est que les entreprises perçoivent des « menaces » qui pourraient mettre en péril leur modèle. Si le manque de formation adaptée reste évidemment une des préoccupations premières, il apparait que le manque d’implication des collectivités est également mentionné. 2013 pourrait voir la mise en place progressive de la circulaire Ayrault - qui préconise l'usage du libre -au sein des ministères, ainsi que celle des contrats de support Logiciels Libres (inter-ministériels ou au Minefi). Restera alors à trouver une solution pour les collectivités locales pour l’heure non concernées par cette circulaire.
Parmi les autres menaces identifiées, la complexité des modèles économiques ainsi que l’oubli des valeurs, comme par exemple la contribution.
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