Google face à la presse française : François Hollande dégaine l'arme fisc
Selon Le Canard enchaîné, le fisc français réclamerait près de 1 milliard de dollars à Google soupçonné d'évasion fiscale. Une façon pour l'exécutif de faire pression sur le moteur, sommé de trouver un accord avec les éditeurs de presse ?
Selon Le Canard Enchaîné du jour, en recevant lundi Eric Schmidt, le patron de Google, le président Hollande avait dans sa manche un atout en or massif : le fisc réclamerait en effet près de 1 milliard d'euros au moteur de recherche. Suite à une enquête sur les "prix de transfert" entre la filiale hexagonale de Google et sa holding en Irlande - une contrée où les impôts sur les sociétés sont très cléments -, la Direction générale des impôts a en effet, toujours selon le Canard, envoyé une lettre recommandée à la société pour lui réclamer ce montant au titre de ses quatre derniers exercices fiscaux. L'information de l'hebdomadaire satirique a été démentie par Google France qui a expliqué à l'AFP n'avoir pas reçu "de notification de redressement fiscal de la part de l'administration fiscale française".
En France, selon les estimations, le géant aurait réalisé en 2011 un chiffre d'affaires compris entre 1,25 et 1,4 milliard d'euros, son activité de régie publicitaire sur Internet en représentant l'essentiel. Tout en ne versant qu'un peu plus de 5 millions d'euros d'impôt.
Pour Le Canard enchaîné, cette "surprise" serait un moyen de faire pression sur le moteur de recherche, afin de le pousser à un accord avec les éditeurs de presse. Le président de la République a en effet donné un délai de deux mois à Google pour trouver un accord avec ces derniers, accord via lequel le moteur rétribuerait les sites de presse pour leurs contenus. Faute de quoi, François Hollande avait promis une loi encadrant la rémunération des éditeurs.
Microsoft et Oracle aussi
La pratique de l'optimisation fiscale via des pays affichant de faibles taux d'imposition est très répandue dans l'économie numérique. Le montage qu'emploie Google passe ainsi par l'Irlande, les Pays-Bas avant d'aboutir aux Bermudes, un paradis fiscal.
Rappelons que, fin juin, Microsoft France avait fait l'objet d'une perquisition en raison des soupçons de fraude fiscale qui pèsent sur la filiale. Selon nos confrères et partenaires de ChannelNews, la filiale hexagonale du premier éditeur mondial générait en 2010 une activité dépassant les 1,8 milliard d’euros depuis la France, mais ne déclarait qu’environ 400 millions d’euros de chiffre d’affaires dans son bilan.
En 2010, un autre éditeur, Oracle, avait été contraint de transiger avec le fisc dans un accord resté secret. Mais l'existence de cet accord avait été révélée par le versement de plus de 6 000 euros à chaque salarié français, au titre de la participation. Le fisc avait peu goûté au mécanisme de commissionnement de la filiale française - passant là encore par l'Irlande -, qui avait abouti à placer les comptes de cette dernière dans le rouge alors qu'elle aurait du être largement bénéficiaire. C'est un mécanisme similaire qu'utilise Google, qui facture le marché français depuis Dublin puis rétribue sa filiale dans l’Hexagone par une commission d'environ 10 %.