Fiscalité : Obama fait souffler un vent de panique sur l’industrie IT
Comme si la crise économique ne suffisait pas. L’industrie IT se sent aujourd’hui menacée par la politique de l’administration Obama. Alors que, fin mars, on ne parlait que d’inquiétudes, c’est bien aujourd’hui un vent de panique qui semble souffler sur les entreprises IT, aux Etats-Unis mais aussi en Inde.
Inutile d’aborder le sujet avec Suresh Vaswani, le co-PDG de Wipro : il ne commentera pas les questions de fiscalité ou de politique d’immigration contrôlée américaine. Non, comme ses pairs, il laisse le soin d’aborder ces sujets brûlants au Nasscom, la chambre syndicale du patronat des SSII indiennes. C’est la proposition de l’administration Obama, il y a quelques semaines, de modifier la fiscalité sur le chiffre d’affaires généré à l’étranger par des entreprises américaines qui a mis le feu aux poudres. IBM, Microsoft ou encore Coca-Cola ont été mis à l’index pour, selon la nouvelle administration gouvernementale des Etats-Unis, (trop) profiter de failles dans la législation fiscale. Fustigeant au passage des multinationales délocalisant dans des pays à bas coût de main d’œuvre, Barack Obama a estimé à 210 Md$ les montant récupérables sur les dix prochaines années en réformant la fiscalité américaine. Selon une analyse de nos confrères d’Associated Press, HP, IBM, Cisco, Microsoft et Google auraient économisé 7,4 Md$ d’impôts au cours de leur dernier exercice fiscal en profitant de ces failles. Selon Carl Guardino, président de l’association Silicon Valley Leadership Group, une révision de la politique fiscale américaine « serait comme séisme pour l’industrie High Tech […] Sur une échelle de Richter de 1 à 10, ce serait un 12. » Et si ces réflexions font débat outre-Atlantique, la situation n’est pas pour autant sereine en Inde.
Confiance de façade
Pour Hari Bhartia, vice-président de la Confédération de l’Industrie Indienne, il ne s’agit que d’une « affaire interne » aux Etats-Unis, une posture « populiste » dont la seule conséquence devrait être de réduire la compétitivité des entreprises IT américaines. Même son de cloche au Nasscom, la chambre syndicale de l’industrie IT indienne. Selon son président, Som Mittal, « cela n’a rien à voir avec l’Inde. » Aucun rapport non plus avec l’offshore ou l’externalisation. Mais, dans les colonnes de The Hindu, le même Som Mittal a lâché une petite phrase qui en dit long sur le réel état d’esprit de l’industrie IT indienne : « les changements proposés affecteront bien plus Shanghai que Bangalore. » Dans celles de DNA India, il concède même que « si cela a un impact sur nous, nous ferons le nécessaire, lorsque le projet de loi sera rédigé. » Mais c’est après avoir souligné que « notre industrie est en fait une partie de la solution dont a besoin l’Amérique pour devenir plus compétitive. » N’empêche, l’affaire semble suffisamment sérieuse pour que le premier ministre de l’état indien du Karnataka – dont dépend Bangalore – ait décidé de rencontrer les patrons de l’industrie IT locale afin de discuter des implications des réflexions de l’administration Obama. Et, dans les rangs de certaines entreprises IT américaines installées en Inde, le nouveau discours officiel est loin de faire l’unanimité : sur place, un analyste qualité travaillant pour une entreprise américaine, estime ainsi que « la décision d’Obama va poser de nouveaux problèmes. »
L’inde, toujours menacée par le protectionnisme
Menacée par le retour du protectionnisme – ou du moins de discours habillés de formule en relevant clairement –, l’industrie IT indienne doit en plus faire face aux mesures annoncées de limitations des octrois de visas travail (H1-B) outre-Atlantique. Selon Infosys, ces restrictions devraient avoir un impact négatif sur l’activité de la SSII dans certains secteurs, notamment « avec les administrations » américaines. Pour le Nasscom, ces mesures « restreignent la capacité des SSII indiennes à être compétitives sur le marché américain. » Et la chambre syndicale de vouloir demander à l’administration Obama d’instaurer un nouveau type de visa, dit de "service", taillé sur mesure pour les besoins des SSII indiennes : il permettrait à leurs collaborateurs de venir travailler sur le sol américain, pour un client, pour une durée déterminée. Rien de neuf, en somme, mais un changement rhétorique destiné à remiser - et contourner - le chiffon rouge que constitue le sujet des visas H1-B outre Atlantique, selon le PDG d’une société de conseil en recrutement installée à Bangalore et interrogé par nos confrères du Business Standard.