Le Conseil constitutionnel censure les principaux articles de la loi Hadopi
Le chemin de croix se poursuit pour la loi Hadopi, voulue par le président, le gouvernement et Christine Albanel, la ministre de la Culture. Le Conseil constitutionnel a en effet censuré deux des principaux articles, privant la haute autorité créée par la loi de ses principales prérogatives. Notamment de la possibilité de couper l'accès à Internet.
A peine un mois après son adoption par l'Assemblée Nationale - qui faisait suite à un premier vote en forme de ratage pour la majorité présidentielle -, le Conseil constitutionnel a vidé de sa substance le texte de loi « création sur Internet », plus connu sous l'appelation « loi Hadopi ». La Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (la fameuse Hadopi) se voit ainsi dépouillée de la plupart de ses pouvoirs. Notamment de celui de se substituer à un juge pour décider de la coupure de l'accès d'un internaute. Elle a aussi rétabli le droit des abonnés à Internet à la présomption d'innocence en annulant les dispositions qui rendaient l'internaute responsable de la sécurisation de son propre accès et qui faisaient porter sur lui la charge de la preuve d'un détournement de son accès.
Pouvoirs disproportionnés pour la Hadopi
Selon le Conseil, la loi confiait à la commission de protection des droits de la Hadopi « des pouvoirs de sanction l'habilitant à restreindre ou à empêcher l'accès à Internet à des titulaires d'abonnement. Ces pouvoirs pouvaient donc conduire à restreindre l'exercice, par toute personne, de son droit de s'exprimer et de communiquer librement ». Dans ces conditions, le Conseil constitutionnel estime que législateur ne pouvait, quelles que soient les garanties encadrant le prononcé des sanctions, confier de tels pouvoirs à une autorité administrative dans le but de protéger les titulaires du droit d'auteur. Ces pouvoirs ne peuvent incomber qu'au juge. Exit donc le fondement même de l'existence de l'Hadopi.
Et le Conseil constitutionnel ne s'arrête pas là : s'appuyant sur le principe selon lequel la loi ne saurait instituer de présomption de culpabilité, l'institution torpille un autre pan du texte. Selon elle, la loi contraignait le titulaire de l'abonnement mis en cause indument par l'Hadopi à produire des éléments de nature à établir que l'atteinte portée au droit d'auteur procédait de la fraude d'un tiers. Et le conseil d'indiquer « qu'en méconnaissance de l'article 9 de la Déclaration de 1789, la loi instituait ainsi, en opérant un renversement de la charge de la preuve, une présomption de culpabilité pouvant conduire à prononcer contre l'abonné des sanctions privatives ou restrictives du droit ». Résultat, le conseil décide la censure des articles 5 et 11 de la loi.
En savoir plus :
Le texte de la décision du conseil constitutionnel dans son intégralité
Le dossier sur la loi création sur Internet sur le site de l'Assemblée Nationale
A lire aussi sur LeMagIT :
Après l'Hadopi, la France prépare la seconde phase du verrouillage ...
Hadopi bientôt adoptée non sans conséquences pour les entreprises
Hadopi : la loi Création et Internet rejetée à l'Assemblée Nationale