Les SSII indiennes reprennent leur souffle
Les principales SSII indiennes ont surpris avec des résultats plutôt bons pour le second trimestre 2009. Le point bas de l’activité pourrait avoir déjà été atteint avant une reprise pour le second semestre 2010. Mais la prudence, voire même la rigueur, restent de mise sur fond de fin annoncée de certains privilèges fiscaux.
Le point bas de l’activité des SSII indiennes est-il passé ? Peut-être. Du moins les principaux intéressés veulent-ils l’entendre de cette oreille. Selon Kris Gopalakrishnan, PDG d’Infosys, qui répondait récemment à nos confrères de l’Economic Times, la reprise n’est pas encore là – « les clients continuent de réduire les dépenses non essentielles et de renoncer à des projets » – mais elle pourrait survenir mi-2010. Une prudence partagée par Pramod Bhasin, nouveau président du Nasscom, la chambre syndicale du patronat des SSII indiennes, selon lequel l’industrie indienne des services informatiques et de l’externalisation des processus métier (BPO) ne devrait pas croître de plus de 5 % au cours de l’exercice fiscal en cours, soit d’ici le 31 mars 2010.
En revanche, pour le directeur financier de TCS, Seturaman Mahalingam, interrogé par le Business Standard, « le recul de la demande s’est arrêté. » Un constat partagé par Azim Premji, co-PDG de Wipro, selon lequel « nous commençons à voir les premiers signes de stabilité » alors, notamment, que « les volumes [d’activité] se stabilisent. » En clair : le retour à une croissance forte ne doit pas être attendu avec le second trimestre du prochain exercice fiscal, soit le troisième trimestre 2010, mais la situation commence à s’éclaircir.
Des résultats trimestriels meilleurs qu’attendu
Une chose est sûre, l’exercice fiscal entamé le 1er avril commence mieux que beaucoup ne s’y attendaient, tout particulièrement pour TCS et pour Wipro. Au cours du trimestre écoulé, TCS a ainsi réalisé un chiffre d’affaires de 1,48 Md$, soit un recul de moins de 3 % sur un an, contre -20,47 % au trimestre précédent. Avec 1,32 Md$ de chiffre d’affaires, Wipro fait un peu moins bien mais redresse sensiblement la barre, avec un recul sur un an de 4,68 % contre -7,01 % au trimestre précédent. Infosys s’en tire finalement moins bien avec un chiffre d’affaires de 1,12 Md$, soit 0,09 % de mieux qu’au trimestre précédent mais 2,8 % de moins qu’un an plus tôt.
Satyam empoisonne Tech Mahindra |
Tech Mahindra a finalement réussi à prendre le contrôle de plus de 40 % du capital de feu la 4ème SSII indienne, Satyam. C’est moins que prévu initialement mais le nouveau propriétaire devra s’en contenter, au moins pour le moment. Car d’autres soucis ont de quoi l’occuper. Il faudra ainsi attendre le avril 2010 pour disposer d’une vision corrigée des comptes de Satyam, falsifiées par son ancien PDG, Ramalinga Raju, aujourd’hui incarcéré. Selon Vineet Nayyar, vice-président exécutif du nouvel ensemble Mahindra Satyam, il faudra 12 à 24 mois pour effacer les stigmates du scandale. Dans l’immédiat, le rachat de Satyam s’est notamment traduit par un recul de 1,3 % du bénéfice opérationnel de Tech Mahindra au second trimestre 2009 par rapport à l’année précédente. Dans ce contexte, le renouvellement récent d’un contrat de support SAP pour 5 ans avec Glaxo, pour un montant non communiqué, apparaît comme une bouffée d’air frais. De son côté, le gouvernement indien, selon lequel l’affaire Satyam est une « aberration », prévoit de faire rapidement évoluer la législation afin d’éviter d’autres scandales de même nature. |
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L’ère de la rigueur n’est pas finie
Pour autant, les SSII indiennes n’en ont pas fini avec l’austérité. Et le front de l’emploi semble parti pour se tendre durablement. Les effectifs d’Infosys ont ainsi reculé de 945 personnes au second trimestre 2009, pour s’établir à 103 905 collaborateurs au 30 juin. Chez TCS, le recul a été plus marqué avec 2 119 collaborateurs de moins.
Une situation qui ne va pas sans créer certaines tensions sur les campus indiens. Infosys a renoncé à y recruter pour l’exercice fiscal en cours ; 18 000 employés en été placés en formation « étendue » jusqu’en janvier prochain – une logique appliquée également par TCS. Les autres SSII ne feront pas, comme c’était la coutume jusqu’ici, d’offres d’embauche avec un an d’avance : les offres individuelles n’interviendront qu’au cours du dernier semestre d’études.
Un recours plus limité à l’expatriation
Mais les SSII indiennes jouent aussi sur d’autres variables d’ajustement. Au second trimestre 2009, TCS a exécuté plus de 50 % de ses prestations offshore et 44,4 % sur site ; un ratio qui était de 40,9 % / 54,9 % un an plus tôt. Une stratégie à la logique presque évidente : dépêcher sur site un ingénieur indien coûte bien plus cher que de le maintenir en Inde. Infosys l’assume pleinement a fait baisser en un an de 8700 à 8200 le nombre de ses collaborateurs détenteurs d’un visa de travail (H1-B) pour les Etats-Unis. TCS a récemment rapatrié 1200 collaborateurs travaillant auparavant outre Atlantique. Et la SSII ne prévoit pas de demander de nouveaux visas H1-B cette année – elle dispose déjà de 18 000 collaborateurs ainsi dotés. Wipro, de son côté, mise de plus en plus sur le recrutement de collaborateurs locaux dans les pays où il veut développer son activité, comme la France.
Vers une fiscalité moins avantageuse ? |
SEZ, STPI… derrière ces sigles se cachent des régimes fiscaux avantageux dont profitent largement les SSII indiennes. Las, le régime des STPI devait initialement disparaître fin mars 2010, après 10 ans d’existence. Pour le plus grand soulagement d’une industrie souvent présentée comme le meilleur employeur de la région, le gouvernement indien vient de décider de proroger le dispositif d’un an. Une mesure saluée par le Nasscom compte tenu du contexte économique mondial. Mais la chambre syndicale du patronat des SSII indiennes a néanmoins rappelé qu’elle demandait une extension de 5 ans du dispositif. Car, la prorogation du dispositif annoncée par le gouvernement signale, dans la pratique, un retour progressif à une fiscalité normale. De fait, l’année de répit n’est applicable qu’aux sites vieux de moins de 10 ans. Selon The Hindu Business Line, le taux effectif d’imposition d’Infosys devrait ainsi passer de 17 à 20 % cette année, de 14,3 à 17 % pour TCS, et de 13 à 15 % pour MindTree. Infosys prévoit un taux d’imposition effectif de l’ordre de 24 % pour l’exercice fiscal 2010-2011. |