Rachat de la SSII Perot : Dell suit la voie tracée par IBM et HP
C'est fait. Après avoir tergiversé, Dell se renforce dans les services en mettant la main sur la SSII américaine Perot Systems. Un renfort qui pose toutefois deux questions : le prix de cette acquisition, jugé trop élevé, et sa portée. La présence de Perot en Europe et en Asie reste en effet très limitée.
Mise à jour à 18h30, avec les commentaires de Frédéric Giron (PAC).
Après de multiples rumeurs de rachat d'une SSII (notamment d'Atos) par le constructeur texan, Dell a confirmé le rachat de l'Américain Perot Systems (23 000 personnes), pour 3,9 milliards de dollars. Un montant qui paraît bien élevé selon les premières analyses : le prix de l'acquisition représente une prime de 68 % par rapport au cours de clôture du titre Perot vendredi dernier. Le rachat s'effectue à un ratio d'environ 1,4 fois le chiffre d'affaires du groupe. Rappelons, par exemple, qu'en mai 2008, HP avait racheté EDS à un ratio de 0,6 fois le CA de sa cible (14 milliards pour un CA de 22 milliards).
Pour Brice Thébaud, analyste chez Aurel BGC, "Dell paie Perot 18 fois son Ebit (résultat d'exploitation, ndlr). C'est complètement fou. Et l'opération ne devrait être relutive (amélioration du bénéfice par action, ndlr) qu'à partir de 2012. On a l'impression que Dell est dans l'impasse et n'avait d'autre choix que de répliquer le modèle mis en place par IBM et HP". Lors de son dernier trimestre fiscal - avec un CA en recul de 22 % -, Dell témoignait de ses difficultés auprès des entreprises. Frédéric Giron, directeur des études au cabinet Pierre Audoin Consultants (PAC), s'interroge lui sur les différences de modèles entre les deux sociétés : "Ca ressemble à un grand écart stratégique pour Dell. Si le rapprochement rappelle celui entre HP et EDS, le niveau de maturité des acquéreurs dans les services est très différent. Au moment du rachat d'EDS, HP était beaucoup plus avancé dans le conseil, l'intégration et l'outsourcing que ne l'est Dell aujourd'hui."
Pour Brice Thébaud, la cible aussi est surprenante : "on aurait pu penser qu'il ferait une opération sur une SSII de dimension mondiale". Alors que Perot réalise 85 % de son CA aux Etats-Unis. Reste que Dell dispose d'un trésor de guerre de 9 milliards, complété par 1 Md$ récemment levés sous la forme d’un emprunt obligataire, qui lui permet d'envisager d'autres emplettes.
Un profil solide
Si le prix et l'implantation de la cible font débat, la récurrence des revenus de Perot rassurent dans un contexte toujours troublé pour les services. La SSII réalise près de trois-quarts de son activité dans la santé (47 % pour ce seul secteur) et auprès du gouvernement. Et la répartition des activités paraît bien équilibrée, entre conseil-intégration (40 %), BPO (24 %) et infrastructures (36 %).
Dell espère finaliser l'acquisition au cours de son prochaine trimestre fiscal (de novembre à janvier). Une fois l'opération finalisée, Perot Systems deviendra le bras armé du groupe dans les services - un peu sur le modèle de ce qu'est devenu EDS pour HP. La branche sera dirigée par Peter Altabef, l'actuel Pdg de la SSII. Le président du conseil d'administration de cette dernière, Ross Perot Jr (fils du fondateur qui fut candidat par deux fois à la présidence des Etats-Unis), devrait rejoindre le conseil d'administration de Dell.
Basé au Texas - tout comme le constructeur -, Perot Systems a réalisé un chiffre d'affaires de 2,8 milliards de dollars sur son année fiscale 2008 (+ 6,4 %). Dont 208 millions de dollars sur le Vieux Continent, presque totalement en Grande-Bretagne et en Allemagne. Le groupe a réalisé 117 millions de bénéfices.