Wipro France : "Nous ne sommes pas des patrons voyous"
Mis en cause par le ministre de l'Industrie pour son projet de fermeture du site NewLogic à Sophia-Antipolis, Wipro France s'apprête à adresser une réponse écrite à Christian Estrosi. Et s'étonne de l'amalgame qui est fait entre son dossier et celui de Molex, l'équipementier automobile américain qui a suscité l'ire du gouvernement pour la fermeture brutale de son usine en Haute-Garonne.
"Il est légitime que le ministre de l'Industrie se saisisse de ce sujet. Mais il aurait été préférable que l'ensemble des données soient évaluées au préalable". En termes diplomatiques, Christophe Martinoli, le directeur général de la SSII indienne Wipro, pointée du doigt par Christian Estrosi pour les conditions de fermeture de son site de Sophia-Antipolis (NewLogic, spécialisée dans la recherche et le développement en semi-conducteurs), s'étonne de la violence de la campagne de presse déclenchée par les interventions du ministre de l'Industrie. Ce dernier a exprimé en début de semaine son "indignation". En cause : les 5 millions d'euros perçus au titre du Crédit Impôt Recherche (CIR) par la société en juin dernier, soit quelques jours avant l'annonce de la fermeture du site de Sophia, qui emploie 61 personnes.
Et le ministre de rapprocher "l'affaire Wipro" d'une autre fermeture de site très médiatisée, celle de Molex (usine d'un équipementier automobile américain située à Villemur-sur-Tarn). Ce matin sur France Inter, Christian Estrosi a déclaré : "vous avez déjà entendu des responsables politiques, comme le Président de la République ou comme moi-même, dire, comme nous l'avons dit hier à Molex, comme le le dis aujourd'hui à Wipro, une entreprise indienne : vous êtes en France, vous respectez les règles sociales de la France. Et, en plus, vous apportez des moyens sur la revitalisation pour qu'on accueille des repreneurs."
Un amalgame avec Molex "qui n'est pas justifié"
Pour Christophe Martinoli, "l'amalgame avec Molex n'est pas justifié". Après avoir été reçu par le directeur de cabinet du ministre lundi, la direction française de la SSII prépare une réponse écrite aux griefs de Christian Estrosi, avec la volonté de "rassurer sur l'ensemble des points". Un document en cours de finalisation. La défense de Wipro s'articule selon deux axes. Primo, les aides perçues en juin dernier au titre du CIR correspondent à des sommes dues sur la période 2006-2008. "Cet argent a servi à financer des projets et à payer une partie des salaires", explique Christophe Martinoli. Secundo, la direction française de Wipro a entamé des discussions dans les règles avec les instances représentatives des salariés de NewLogic. "Nous discutons des mesures pour les accompagner. Et, avant même l'interpellation du ministre de l'Industrie, nous avions budgété un plan de plus de 5 millions d'euros pour accompagner les salariés. Nous sommes d'ailleurs en relation étroite avec la région pour mettre au point un plan de revitalisation qui soit complémentaire de ceux décidés par d'autres acteurs, comme Texas Instruments ou ST Micro", explique le dirigeant.
L'image de la France écornée en Inde ?
Parlant d'une décision stratégique du groupe, face aux difficultés que traverse le marché des semi-conducteurs, Christophe Martinoli met aussi en exergue les conséquences possibles de l'affaire sur les décisions de ses patrons indiens. "L'escalade de la fin de semaine dernière n'est pas lisible de nos dirigeants en Inde. Alors qu'on essaie de vendre l'attractivité de la France à l'étranger, j'espère que cette affaire ne va pas écorner l'image de l'Hexagone en Inde. Le groupe Wipro a la volonté d'investir en France, où nous sommes en croissance et où nous créons des emplois. Je ferai tout ce qui est possible pour que cela ne soit pas remis en cause. Mais si on assiste à une nouvelle radicalisation sur l'affaire NewLogic, le risque d'une inflexion stratégique existe".
Wipro s'était implanté à Sophia-Antipolis à la fin de l'année 2005 suite au rachat (pour un peu moins de 60 M$) de l'entreprise NewLogic, spécialisée dans les communications sans fil. Selon Christophe Martinoli, l'activité était alors déjà déficitaire. Le projet de fermeture du site a été annoncé fin juin aux salariés.