Après Dell, Xerox pioche dans sa cagnotte pour entrer sur le marché des services
En rachetant un spécialiste de l'externalisation des processus métier (BPO), Xerox tente de muscler sa branche services, en pariant sur les synergies entre ses services autour du document et l'approche verticale déployée par ACS, dans les marchés gouvernementaux, de la santé ou des transports. Un pari inédit et qui laisse pour l'instant perplexe.
Après le rapprochement Dell-Perot, au tour de Xerox de s'engouffrer sur le marché de l'outsourcing. Le géant des copieurs, qui a déjà bâti au fil des ans une branche services autour de la gestion des documents, met la main sur ACS (Affiliated Computer Systems), un spécialiste texan du BPO qui emploie 74 000 personnes. Comme lors du rachat de Perot, l'acquisition se fait au prix fort, avec une prime de 34 % par rapport au cours de clôture de la cible vendredi dernier. Au total, l'emplette coûtera la bagatelle de 6,4 milliards de dollars à Xerox (en cash, pour environ 30 %, et en actions), somme à laquelle s'ajoute la dette d'ACS (2 milliards, plus 300 millions d'options convertibles). Trop cher, jugent les marchés financiers, où des analystes rappellent qu'au cours de son quatrième trimestre 2009, clos le 30 juin dernier, ACS n'a dégagé qu'un profit de 97 millions sur un chiffre d'affaires de 1,7 milliards de dollars.
Xerox (en photo son Pdg Ursula Burns - à gauche -, avec le Pdg d'ACS, Lynn Blodgett) se défend en promettant de dégager plus de 95 millions de synergies dès la première année. Selon les officiels de Xerox, une fois l'opération finalisée (au premier trimestre 2010, selon le géant de l'impression), le groupe réalisera environ 22 milliards, dont 10 dans les services. "C'est plutôt un pari de long terme, juge Dominique Raviart, analyste senior au cabinet NelsonHall, spécialiste du BPO. Financièrement, l'acquisition ne change pas grand chose dans l'immédiat. Je ne vois pas où Xerox va trouver des synergies significatives".
Michelin, Air France : quelques références en France
Comme le deal entre Perot et Dell, Xerox, entreprise mondiale, rachète avant tout un spécialiste américain du BPO. ACS réalise ainsi 92 % de son chiffre d'affaires (6,5 milliards de dollars pour son année fiscale 2009, en croissance de 6 %) aux Etats-Unis. Peu présent en France, ACS y a tout de même quelques références, notamment des contrats signés avec Michelin (BPO F&A, soit finance et comptabilité) ou Air France-KLM. "Dans l'Hexagone, ACS reste un acteur de niche, dans le ticketing ou le F&A", assure Dominique Raviart.
Comme le rapprochement Perot-Dell encore, l'opération du jour concerne deux entreprises aux activités assez éloignées. Si Xerox a bâti une offre de services autour du document, sa présence dans les processus métier reste faible. "L'intégration d'une société dans les services IT aurait été plus aisée pour Xerox, une société qui a une culture d'ingénieurs", juge Dominique Raviart. Signalons tout de même qu'ACS amènera dans la corbeille de mariée son activité dans les services IT, qui pèse 1,4 milliard de dollars.
25 000 personnes environ offshore
ACS réalise 40 % de son activité auprès des services publics américains (gouvernement fédéral, états et transport), part à laquelle il convient d'ajouter son chiffre d'affaires dans la santé. Des marchés considérés comme porteurs et moins volatils que ceux relevant du secteur privé. "ACS s'est d'abord développé sur des contrats d'outsourcing servis par ses centres aux Etats-Unis. Mais la société a aussi petit à petit développé une présence offshore", explique l'analyste de NelsonHall. Si le centre de gravité de la société de BPO reste aux Etats-Unis (avec 42 000 personnes), ACS dispose de centres offshore, notamment à la Jamaïque, au Mexique, en Inde ou en Argentine. Pour un total de plus de 25 000 personnes.
Avec cette nouvelle corde à son arc, Xerox espère bien sûr réaliser des ventes additionnelles, en amenant les offres de BPO d'ACS chez ses clients et en proposant son propre porte-feuille de services autour de l'impression aux comptes de la société qu'il rachète. De plus, le groupe compte tirer parti de ses technologies autour du document pour créer de nouvelles offres de BPO.
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