Relations fournisseurs : le Cigref demande aux DSI de relâcher (un peu) la pression
De façon assez inhabituelle, le Club informatique des grandes entreprises françaises (Cigref), qui tenait son assemblée générale ce matin, a appelé à mots couverts ses membres à la retenue dans leurs négociations avec les fournisseurs. Car, pour le club, trop de déséquilibre aboutit à un appauvrissement de l'écosystème dans son ensemble.
A l'occasion de son assemblée générale, qui se tenait ce matin devant une salle bien remplie, le Club informatique des grandes entreprises françaises, qui réunit les DSI de nombre de grands comptes français, a tenu à faire passer un message de modération. Pourtant volontiers acerbe par le passé sur les pratiques des fournisseurs - on se souvient de violentes sorties, contre la Software Assurance de Microsoft notamment -, le club a cette fois fait passer un appel à la mesure qui visait également ses membres.
"On ne peut pas parler de ce sujet sans évoquer la crise", a expliqué à la tribune Jean-Marc Lagoutte, vice-président du Cigref et DSI de Danone. "Les comportements extrêmes qu'a fait naître la crise ont des conséquences importantes sur l'écosystème. On a besoin de trouver un équilibre". Un discours qui renvoie aux pratiques de certains grands comptes qui demandent, à la faveur de la crise, des rabais très importants à leurs fournisseurs, qu'il s'agisse de SSII, d'éditeurs ou de constructeurs. Ce durcissement des relations a été confirmé au MagIT par de nombreuses sources au fil des derniers mois. Si la négociation sur les prix est un exercice classique de la relation client-fournisseur, la crise a donné naissance à des "comportements extrêmes" pointés par Jean-Marc Lagoutte. Selon une étude récente du cabinet IDC, 73 % des grands comptes français ont utilisé l'arme de la renégociation des contrats pour faire baisser leurs coûts IT en 2009. C'est le premier levier actionné par les organisations, devant l'annulation ou le report des investissements planifiés.
Création de valeur : après les discours, le référentiel |
C'est bien sûr l'antienne préférée du Cigref : en montrant la création de valeur apportée par les systèmes d'information, le DSI renforce sa position dans l'organisation. Pour avancer dans cette direction, le club s'est rapproché de Capgemini - après avoir travaillé sur le sujet avec Mc Kinsey - pour produire un premier référentiel sur la création de valeur par le SI, un livrable attendu pour la fin 2010. Un des objectifs étant de rapprocher la DSI de directions métier de plus en plus motrices sur les nouveaux projets. "C'est vraiment important d'embarquer les métiers avec nous, a expliqué Bruno Ménard, président du Cigref, à la tribune. Par exemple en organisant des bilans post-projets sur la question des usages et de la valeur ajoutée apportée par ledit projet." |
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"Coopération sans complaisance"
Plus classiquement, le message s'adresse aussi aux fournisseurs, qui répondent aux pressions sur les prix et aux mécanismes de référencement des grands comptes par des rachats. Et Jean-Marc Lagoutte d'évoquer des "tensions suite aux rachats de petits éditeurs" et des difficultés nées "d'audits de licences de plus en plus fréquents". "Il faut s'éloigner des profits à court terme, sortir de la logique des fins de trimestres", a martelé le DSI, qui appelle à "une coopération sans complaisance". Selon le club, cette relation peut s'instaurer via des liens au plus haut niveau de l'entreprise, tant côté donneur d'ordre que côté fournisseur. Donc entre directions générales et non plus au seul niveau de la DSI.
Rappelons que le Cigref collabore avec six fournisseurs (IBM, SAP, Microsoft, Google, Oracle, Orange Business Services) en faisant remonter de ses adhérents des sujets concrets. Comme l'accompagnement de la fin de vie de l'atelier de génie logiciel Pacbase (IBM), l'organisation des forces commerciales (Orange et Oracle, notamment sur le dossier BEA) ou la flexibilité des offres commerciales (Google, Oracle, Orange). "Nous ne voulons pas acheter des paquets où 90 % de l'offre ne nous intéresse pas", a rappelé Bruno Ménard, président du Cigref et DSI de Sanofi-Aventis.
Outsourcing : "toutes les réponses à nos besoins ne sont déjà plus sur le marché"
Et ce dernier d'éclairer le sujet des coûts sous un angle différent dans son discours de clôture, en contrant le discours sur la banalisation des systèmes d'information : "en cette rentrée, on assiste à une vague médiatique autour du cloud. Et un livre de Nicholas Carr (The Big Switch, ndlr) compare l'IT à l'électricité. Pour moi, on est complètement à côté de la plaque. Quid de la capacité à trouver tous les services attendus par une entreprise, de la continuité de services ou de la sécurité ? On peut certes payer moins cher un service banalisé, mais ce n'est pas le cas des services personnalisés." Pour le président du club, la réponse à ces sujets tient aujourd'hui plutôt dans l'outsourcing. "Mais, là aussi, nous trouvons de moins en moins de flexibilité dans l'offre des fournisseurs. Toutes les réponses à nos besoins ne sont déjà plus sur le marché". Une conséquence directe de la pression sur les prix, qui pousse les fournisseurs dans la voie de la mutualisation à outrance.