IP Convergence : le marché français de la ToIP encore à la traîne face à ses voisins
Malgré la crise, les allées du salon IP Convergence, qui s'est tenu du 6 au 8 octobre à Paris, étaient plutôt fréquentées. Cela tombe bien, les grands du secteur s'étaient donné rendez-vous pour mettre en avant leurs dernières innovations. Ce qui ne les empêchent pas de constater le conservatisme français en matière de téléphonie et l'obsession portée sur les coûts plutôt que sur les usages. Pour certains, le marché de la ToIP français reste un OVNI.
Dans une conjoncture encore déprimée et alors que le marché de la téléphonie a largement souffert de la crise, le salon IP Convergence, qui se tenait à Paris Expo (Porte de Versailles) du 6 au 8 octobre, était l'occasion de faire un bilan sur un secteur que les analystes disent toujours promis à un bel avenir.
Premier constat, le salon a su trouver un vrai public, avec des allées finalement assez occupées et des exposants plutôt satisfaits de trouver des interlocuteurs intéressés. Second constat, les grands du secteurs de la téléphonie IP étaient présents à commencer par Alcatel, Cisco, Avaya, Mitel, Siemens, ainsi que de nouveaux entrants tels que Microsoft (pour son offre Office Communications Server ou MOCS), l'Américain PBXnSIP (PABX SIP) ou le Français Xivo (offre de PABX libre sur base Asterisk).
Au programme rien que de très classique (difficile de faire rêver avec un PABX IP), mais un constat général : le marché français de la téléphonie reste un OVNI à l'échelle mondiale avec une adoption de la ToIP à un pas de sénateur et surtout une vraie bascule vers des postes IP au quasi point mort. Les différents constructeurs que nous avons interrogés estiment ainsi que seulement 15 à 25 % des postes basculent en IP à l'occasion d'une migration de l'autocommutateur vers IP.
L'évolution des habitudes ne suit pas celle des technologies
Plus grave, l'adoption de la téléphonie IP ne se traduit que rarement par une modification des processus. Tous nos interlocuteurs évoquent, avec le sourire, l'obsession française pour le filtrage patron/secrétaire et la réticence de leurs clients à opter pour les fonctions logicielles avancées entourant leur offre de PABX IP (et notamment les fonctions de communications unifiées, de mobilité ou de conférence audio et vidéo). Comme nous l'explique un fournisseur, "tous les DSI et direction télécoms ont des grands discours de convergence, mais dans la pratique, nombreux continuent à traiter les communications téléphoniques comme au vingtième siècle".
Lionel Hovsepian, le patron de la filiale française de Mitel, est un tantinet plus optimiste. S'il concède qu'il a été difficile pour le Canadien de séduire les téléphonistes et que les entreprises françaises sont effectivement plus lentes que les autres à vraiment migrer vers l'IP. Il souligne notamment que le duopole historique constitué de Matra (aujourd'hui Aastra) et d'Alcatel (aujourd'hui Alcatel-Lucent) n'a pas vraiment aidé à la migration. Dans un pays qui a longtemps préché les vertus du PABX hybride (capable à la fois d'accomoder IP et traditionnel), la téléphonie a naturellement pris plus de temps qu'ailleurs à évoluer.
Pour Hovsepian, il n'y a toutefois pas de fatalité : Mitel compte par exemple l'une des plus grandes installations françaises de téléphonie IP couplée à MOCS, chez Bouygues Construction. Selon lui, "des phénomènes comme la pandémie de grippe ont aussi amené certaines entreprises à s'intéresser de plus près aux fonctions de communications unifiées afin de faciliter le télétravail de leurs salariés". Mais pour le patron de Mitel, la révolution de la téléphonie passera par un changement de modèle couplant plus de simplicité, tant pour l'utilisateur que pour l'administrateur, et une intégration en profondeur de la télephonie aux autres composants du SI. Sur le premier point, Mitel met en avant la disponibilité du Call Manager en environnement virtualisé (sous VMWare), qui en fait une application comme les autres pour les exploitants informatiques. Sur le second point, la société souligne sa volonté de faciliter l'intégration de ses briques de communication dans les applications métiers sur un mode quasi OEM : "la convergence et les communications unifiées ne sont possibles que si elles deviennent transparente pour les utilisateurs", selon Lionel Hovsepian.
La nécessité de terminaux plus conviviaux
Le LG-Nortel 3270 couple SIP et Android |
A propos de transparence, ce dernier met aussi le doigt sur la nécessité de proposer des terminaux plus proche des habitudes des utilisateurs et dont l'ergonomie se rapproche de celles des mobiles. "Nous proposons ainsi un terminal multimédia à écran tactile aux environs de 150 €", explique-t-il. Ce discours semble partagé par d'autres. L'évolution la plus remarquable sur IP Convergence était d'ailleurs l'émergence d'une nouvelle génération de terminaux tactiles comme ceux présentés par Snom ou LG-Nortel. Le premier montrait ainsi son terminal SIP Snom 870. Le second dévoilait ses nouveaux téléphones optimisés pour fonctionner avec MOCS, ainsi que sa gamme IP 3800 s'appuyant sur l'OS Android de Google. LG Nortel a semble-t-il fait le pari de la convergence entre les interfaces du monde grand public et celles du monde professionnel, un pari qui, au vu de l'ergonomie de ses terminaux, pourrait s'avérer payant.