Intel achète la paix avec AMD pour 1,25 Md$
AMD et Intel ont hier mis un terme à la bataille juridique qui les oppose, le premier dénonçant depuis des années les pratiques jugées anticoncurrentielles de son concurrent. Le traité de paix s'accompagne de la signature d'un nouvel accord de licence croisé entre les deux sociétés et d'un versement de 1,25 Md$ à AMD. La fin des escarmouches juridiques pourrait signer le retour à une concurrence saine sur le marché des micro-processeurs.
Hier, AMD et Intel ont mis un terme au différend qui les oppose depuis plusieurs années en matière de concurrence et de propriété intellectuelle. Au terme de l'accord, les deux fondeurs ont convenu de mettre fin à l'ensemble des poursuites qui les opposent et Intel s'est engagé à verser 1,25 Md$ à AMD.
Dans une conférence avec la presse et les analystes, AMD a indiqué hier que l'accord porte sur quatre points principaux. Selon le fondeur texan, Intel s'est engagé à cesser toute pratique discriminante et notamment à ne pas conditionner la vente de ses processeurs aux grands constructeurs à l'absence de puces AMD dans leurs gammes. Une pratique qui avait déclenché les foudres de l'Union européenne, mais aussi, plus récemment, celles de l'Etat de New York. De même Intel s'est engagé à ne pas insérer dans ses compilateurs d'instructions susceptibles de nuire à la performance, sur les processeurs d'AMD, des programmes compilés avec les outils maison. Chez Intel, l'interprétation est bien sûr un tantinet différente. Comme l'explique Paul Otellini, le patron de la firme, "depuis plusieurs années, AMD explique que les pratiques d'Intel sur le marché viole un certain nombre de lois et de réglementations à travers le monde. Intel, de son côté, a toujours dit et pense toujours que ses pratiques ne violent aucune loi en matière de concurrence".
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Un accord de licence qui ouvre la voie à la séparation finale entre AMD et GlobalFoundries
Le second point porte sur la propriété intellectuelle. Les deux sociétés ont redéfini leur accord existant de licence croisée, ce qui va permettre à AMD de poursuivre sereinement le développement de ses microprocesseurs x86.
Le troisième point de l'accord découle directement du second. La trêve signée par Intel et AMD va en effet permettre à ce dernier d'achever sa séparation d'avec sa filiale de fabrication, GlobalFoundries. Intel expliquait jusqu'alors que l'accord de licence en place ne portait que sur AMD et ne permettait pas à la firme de séparer ses activités de design et de fabrication comme il entendait le faire. Selon Dirk Meyer, le patron d'AMD, la firme peut désormais mettre en oeuvre sa stratégie et GlobalFoundries va pouvoir librement fournir ses technologies. L'accord ouvre notamment la voie à un désengagement définitif d'AMD de GlobalFoundries (qui jusqu'alors devait rester sa filiale) et à une fusion à terme de GlobalFoundries avec Chartered Semiconductors.
"Pas une question d'argent"...
Enfin le dernier point de l'accord porte sur le versement de 1,25 Md$ par Intel à AMD. Pour le premier, ce paiement n'est, bien entendu, pas l'aveu d'une faute. Mais il permet d'éviter les risques qu'aurait fait peser un procès antitrust sur la firme de Santa Clara. "Les procès antitrust sont très complexes", a ainsi tenté de justifier Otellini. "Cela ne me fait pas plaisir de faire un chèque de 1,25 Md$. Mais, dans ce cas précis, je pense qu'il s'agit d'un règlement pratique qui satisfait les deux parties et qui, de bien des façons, n'est qu'une fraction des dommages que nous aurions pu être contraints de payer par un jury".
Chez AMD, la position est tout aussi hypocrite : interrogé sur la proximité du montant de 1,25 Md$ avec l'amende récemment infligée par l'UE à Intel, Dirk Meyer explique que l'accord n'était pas "une question d'argent"... mais avait plutôt pour objectif de rétablir une saine concurrence (sic). Reste que ces 1,25 Md$ ne feront pas de mal à la trésorerie de la firme qui peut aussi encore espérer améliorer ses comptes en cédant le solde de sa participation dans GlobalFoundries au fond souverain d'Abu Dhabi, ATIC, qui contrôle aujourd'hui la majorité du capital de l'ex-activité de fabrication d'AMD.
Pour Intel, faire exister AMD pour éviter le monopole
En fait, l'accord profite sans aucun doute aux deux sociétés. Grâce à lui, AMD retrouve la stabilité financière qui lui faisait défaut et voit se lever l'ensemble des obstacles qui auraient pu entraver son développement. Intel, de son côté, s'assure de la paix juridique vis-à-vis des autorités antitrust américaines et garantit aussi la survie d'un concurrent précieux. Sans AMD, la firme se retrouverait en effet en situation de monopole sur le marché des puces x86 et pourrait avoir à faire face à des menaces antitrust encore plus lourdes que celles qui pesaient jusqu'alors sur elle du fait de ses pratiques vis-à-vis d'AMD. Le même style de raisonnement avait sans doute présidé à l'investissement de Microsoft dans Apple à la fin des années 90...
Terminons en signalant que les deux sociétés se sont engagées à rendre public l'ensemble des éléments de leur accord.