Mahindra Satyam se débat face à la dette créée par le Enron indien
La première réplique sérieuse du séisme Satyam est-elle sur le point de survenir ? On peut le craindre. La SSII vient d’indiquer qu’elle fait face à des dettes « intenables », sur le plan légal. Une façon de les contester. Mais ces dettes officiellement dénoncées ne constitueraient qu’une part très limitée de la créance potentielle de celle qui était, il y a encore un an, la quatrième SSII indienne.
Tout a presque commencé il y a près d’un an. Quand Richard Behard, journaliste d’investigation de Fox News, a obtenu la confirmation de l’exclusion, jusqu’en 2016, de Satyam des marchés de la Banque Mondiale. Ce n’était qu’un début, mais il préfigurait, d’une certaine manière, la suite. Et celle-ci n’a pas tardé à survenir : en janvier dernier, Ramalinga Raju a démissionné de son poste de Pdg de la quatrième SSII indienne dans ce qui ressemblait à un « Enron à la sauce Curry ».
Dans une confession étonnante, l’ex-Pdg de Satyam expliquait alors avoir artificiellement gonflé les comptes de la SSII, et ce depuis plusieurs années. Un coup de pouce de plusieurs millions de roupies par exemple, soit plus de 150 000 euros, au second trimestre du dernier exercice fiscal – qui s’est achevé le 31 mars 2009 –, le tout en gonflant ses chiffres de trésorerie de près de 800 000 euros. Des aveux qui ont fait plonger l’action de Satyam à moins de 2 euros. Les autorités indiennes ont tout fait pour limiter l’impact du scandale : prise de contrôle, organisation d’un rachat par enchères, etc. C’est Tech Mahindra qui a finalement pris les commandes du mouton noir des services indiens. Et, en septembre, on pouvait relever un léger mieux dans la situation de la SSII. Mais celui-ci pourrait bien n’avoir été qu'une rémission toute temporaire.
Dettes : le tonneau des Danaïdes
Mahindra Satyam, la SSII issue du rachat de la déchue Satyam par Tech Mahindra, vient en effet de signifier à la SEC, le gendarme des marchés boursiers américains, que les demandes de remboursement issues de quelque 37 entreprises distinctes pour un montant total de près de 180 M€ étaient « légalement intenables », selon nos confrères de l’Economic Times of India. Une façon de contester la réalité et la pertinence de dettes qui, selon les créditeurs de la SSII indienne, ne constitueraient qu’une première provision. Des dettes qui ne devraient pourtant en rien surprendre l’actuelle direction de Mahindra Satyam : en janvier dernier, Ramalinga Raju reconnaissait effectivement une dette de 12,3 MdRs, tout en estimant qu'elle était certainement "sous-estimée" (sic).
En fait, début juin, Mahindra Satyam a reconnu être potentiellement redevable d’un total de près de 1,5 Md€, selon nos confrères de l’Economic Times of India. Ce colossal passif intègre les montants signifiés par les créditeurs de la SSII, ceux relatifs à quatre acquisitions à l’étranger et 1 Md$ demandé en justice par le britannique Upaid – en dommages et intérêts, pour falsification de documents. Ironie du sort, une part de cette dette globale est réclamée par les entreprises Maytas Infra et Maytas Properties, celles-là même que Ramalinga Raju voulait faire racheter par Satyam pour cacher ses malversations…
Le flou des chiffres
S'y ajoute environ 1 Md$ de dommages et intérêts demandés par des plaignants outre-Atlantique, suite au scandale qui a émergé entre la fin 2008 et le début 2009. Bref, au total, Mahindra Satyam pourrait être redevable de plus de 2 Md€. Pas sûr que, compte tenu de sa situation actuelle, la SSII ait les moyens d'éponger une telle dette. Au 30 septembre 2008, les comptes – non apurés – de Satyam faisaient état de 2,3 Md$ de liquidités ; un chiffre que l’on doit pouvoir considérer comme gonflé de près d’un milliard de dollars, si l’on en croit les déclarations de Ramalinga Raju.
PricewaterhouseCoopers partiellement blanchi par ses pairs |
Pour le moment, le très réputé cabinet PriwaterhouseCoopers (PwC) devrait opportunément éviter les éclaboussures liées au scandale Satyam. Ses pairs, en Inde, viennent en effet de lever les procédures disciplinaires engagées à son encontre. Motif ? Selon la communauté des auditeurs, ni PwC ni même la plupart de ses six franchisés à travers le sous-continent n'ont commis de faute dans la surveillance des comptes de Satyam à l’ère Raju. Selon le franchisé PwC de New Delhi, seul son homologue de Bangalore – qui a audité les comptes de la SSII – devrait être inquiété. Certes. Mais quid de la responsabilité du franchiseur sur ceux qui exploitent sa marque ? |