VMware met un pied sur le marché du stockage

En dévoilant la semaine dernière son appliance virtuelle de stockage VMware VSA, l'éditeur américain propose aux PME de se passer d'une vraie baie de stockage physique pour le déploiement de leurs serveurs virtuels. Cette première mouture semble toutefois manquer de fonctions importantes et son prix est finalement proche de celui des baies de stockage d'entrée de gamme des grands constructeurs. VMware parviendra-t-il à convaincre ?

Cela devait finir par arriver. Alors que toute l’industrie informatique se gargarise du mot convergence, l’éditeur qui a sans doute fait le plus pour amorcer cette convergence, VMware s’intéresse à son tour au lucratif marché des baies de stockage.

VMware, rappelons-le, est déjà capable de virtualiser des ressources processeurs, mémoire et réseau avec son hyperviseur vSphere. Et l’éditeur offre déjà beaucoup dans le monde du stockage avec le développement de son propre système de gestion de fichiers en cluster -  VMFS -, une API pour la gestion des baies de stockage – vStorage -, une API pour la sauvegarde (avec au passage son propre produit de backup et de déduplication)… L’éditeur a aussi adopté très tôt certaines technologies émergentes comme le thin provisionning.

L’an passé lors de VMworld Europe, lors d’une discussion avec Raghu raghuram, le vice-président et patron des activités virtualisation et cloud de VMware, LeMagIT avait toutefois pointé du doigt l’absence d’une vraie offre de stockage de la part de VMware, alors qu’autour de l’éditeur, d’autres acteurs du cloud comme RackSpace – avec OpenCloud - ou Joyent, ont tous développé une offre de stockage distribuée. Nous avions aussi utilisé l’exemple de l’appliance de stockage HP Lefthand VSA (aujourd’hui rebaptisée P4000 VSA).

« Vous soulevez une bonne question, il y a une augmentation de la capacité de stockage locale, est-il possible d’en faire quelque chose d’intéressant ? » nous avait alors répondu Raghuram, sans toutefois aller plus loin. À l’époque pourtant, VMware travaillait déjà sur sa réponse à la questions.

Le stockage, sous forme d’appliance virtuelle

Les détails ont été révélés la semaine passée lors du lancement de vSphere 5 avec l’arrivée du VMware vSphere Storage Appliance (VSA). Le VSA est une machine virtuelle que l'on déploie sur deux ou trois serveurs physiques et qui transforme les ressources de stockage des serveurs concernés en une ressource de stockage partagée en réseau. L’avantage principal est que l’on peut bénéficier des fonctions avancées de VMware et notamment la mobilité des machines virtuelles entre serveurs ou la haute disponibilité sans avoir à investir dans une baie de disques SAN ou NAS. Pour l'instant la cible de VMware avec sa VSA reste le marché des TPE/PME et celui des agences de grands comptes.

Techniquement, VMware recommande d’utiliser du Raid 10 matériel sur chaque serveur, de façon à garantir la protection locale des données. Si une machine est équipée de 4 disques de 1 To, cela veut dire qu’un total de 2 To est disponible sur chaque serveur.  À ce premier niveau de protection, physique, le VSA de VMware ajoute un second niveau, logique cette fois-ci, qui consiste à créer systèmatiquement un mirroir des volumes locaux d'un serveur sur un second serveur équipé de l'appliance VSA (via réplication synchrone). Dans la pratique, pour 4 To de disque installés dans une machine, on obtient donc 1 To utilisable (mais avec l’avantage de la protection contre la panne d’un serveur, en plus de la protection contre la panne d’un disque que permet le Raid 10 local). À l’échelle de trois serveurs, 12 To de capacité brute se transforment donc en environ 3 To de capacité utile (cf schéma ci-dessous). 

vspherevsa

L'architecture de VMware vSphere Storage Appliance

Cette capacité est exposée par l’appliance VSA via le protocole NFS. Un choix qui montre que l’éditeur n’est pas forcément attaché qu’aux seuls protocoles de stockage en mode bloc comme FC ou iSCSI. Il est à noter que la première mouture de l'appliance VSA ne permettra pas de modification de la capacité installé ou d'ajout d'un noeud VSA additionnel dans la première mouture du logiciel. Il faudra donc d'emblée voir suffisamment large d'un point de vue configuration de stockage afin de ne pas avoir de mauvaises surprises. VMware promet toutefois d'ajouter ces fonctions dans une prochaine version, sans en préciser la date d'arrivée.

Le jeu en vaut-il la chandelle ?

Le tarif officiel de l’appliance VMware VSA sera de 5 995 $, mais VMware devrait proposer un bundle alliant l’appliance et le package VMware vSphere5 Essentials plus (qui permet de virtualiser trois serveurs) au prix de 7 995 $(soit 40 % de remise sur les prix des composants vendus séparément).  Un tel package devrait bien sûr attirer par sa simplicité d’autant que l’administration de l’appliance VSA est totalement intégrée à vCenter, la console d’administration de vSphere. De plus, certains revendeurs et intégrateurs, devraient naturellement pousser ce bundle car la marge sur la licence logicielle VSA devrait être supérieure à celle qu’ils obtiennent sur une vraie baie de stockage.

D’un autre côté, on ne peut s’empêcher de considérer que si la perspective d’une intégration complète entre virtualisation et stockage est alléchante, la solution proposée par VMware est pour l’instant assez coûteuse et surtout assez pauvre fonctionnellement par rapport à des solutions équivalentes comme l’appliance HP P4000 VSA. Pour un prix identique (5 995 $), l’appliance P4000 VSA offre des fonctions avancées de snapshot et de réplication et une bien meilleure utilisation de la capacité disponible (et ce sans exigence de Raid matériel sous-jacent). Elle est de plus capable d'utiliser des ressources de stockage externes au serveur (type JBOD) ce dont l'appliance de VMware est incapable.

Rappelons aussi qu’à près de 5 000 € HT, l’appliance VMware VSA n’est finalement que marginalement moins chère qu’une vraie baie de stockage iSCSI ou NFS d’entrée de gamme comme une baie de stockage Dell Powervault MD3200i (5 500 € HT avec deux contrôleurs redondants et 6 disques SAS 7 200 tr/mn de 500 Go), une baie EMC VNXe 3100 (environ 7 500 € avec 6 disques de 450 Go et deux contrôleurs redondants) ou une baie NetApp FAS2020 (env. 7 300 € HT avec 6 disques SATA de 1To et deux contrôleurs redondants). Et que ces baies de stockage n’ont pas l’inconvénient d’emprunter aux serveurs virtualisés de la mémoire et des cycles CPU pour fournir leurs services de stockage (contrairement aux appliances de stockage). Selon les situations, il faudra donc évaluer très précisément  les besoins avant de se laisser séduire par la VSA de VMware. Pour cela VMware proposera comme pour son hyperviseur une licence de test de 60 jours dès la rentrée.

En savoir plus sur le web :

le descriptif technique de l'appliance de stockage vSphere par VMware (PDF)

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