Crédit Agricole : le projet Nice « n’est pas un projet de restructuration de l’informatique »
Confrontée à une fronde syndicale forte, la direction de la Fédération Nationale du Crédit Agricole cherche à défendre un projet qui doit conduire, avec la consolidation des systèmes d’information, à la suppression d’un millier de postes d’informaticiens. Quitte à adopter un discours peu susceptible de déminer le conflit.
Pour Patrick Kleer, directeur général adjoint de la Fédération Nationale du Crédit Agricole (FNCA), le très controversé projet Nice n’est pas « un projet de restructuration de l’informatique, mais un projet au service d’une ambition client et d’une ambition d’entreprise. » De fait, pour lui, afin soutenir l’ambition de la FNCA d’adaptation à l’évolution de la relation client, « on doit repenser nos modèles de distribution, mais aussi les agences et ce qu’on y fait, les métiers, etc. » Surtout, « dans un monde de plus en plus multi-canal, l’outil doit répondre à l’impératif d’interruption des processus (un client pouvant par exemple commencer une opération sur un canal Web, l'interrompre et la reprendre en agence, NDLR). » Selon lui, si les systèmes d’information actuels des caisses régionales du Crédit Agricole « fonctionnent bien, pour pas très cher », « ils ne permettent pas d’aller vers les objectifs que l’on vise. Nous avons commencé par étudier la rénovation des interfaces métiers clients. Mais refaire ça, en une fois, tous ensemble, ça embarque l’ensemble des systèmes. »
Du coup, concrètement, le projet Nice se traduira bien par une restructuration de l’informatique des caisses régionales du Crédit Agricole. Un point largement souligné et dénoncé par les organisations syndicales.
Des inquiétudes justifiées
Mais, pour Patrick Kleer, l’expression actuelle des besoins en informatique, par les métiers dans les caisses régionales, se traduit par « 60 000 à 70 000 jours homme » pour chaque organisation. A comparer à une capacité, en 2005, de 30 000 jours homme pour chacun des cinq GIE chargés de l’informatique des caisses régionales du Crédit Agricole. Bref, en l'état, les études ne seraient pas en mesure de répondre aux attentes des métiers. Alors que, via le regroupement des équipes, la direction de la FNCA se fixe pour objectif une capacité de 110 000 jours homme dans le cadre du projet Nice.
Du coup, Nice doit permettre de sortir l'informatique du groupe de son exercice d'arbitrage permanent, qui, depuis « 4 à 5 ans a été, en gros, de couper les plans informatiques par deux », selon Patrick Kleer. Car, dans le cadre du projet Nice, il ne doit rester qu’une seule organisation chargée de la gestion des SI des caisses régionales, des SI consolidés sur une base unique – « on ne fera qu’une fois l’ensemble des tests et des plans de développement ». Pour le directeur général adjoint de la FNCA, il y aurait donc « un coefficient multiplicateur de 2,5 à 3 dans les capacités de développement. »
La gestion de l’historique passera par l’externalisation |
Si Patrick Kleer assure que l’externalisation n’est pas une composante importante de la culture informatique des caisses régionales du Crédit Agricole, le recours à des prestataires externes pourrait bien progresser pendant la phase de construction du SI lié au projet Nice, pour assurer la maintenance de l’existant. De quoi, peut-être éviter l’écueil potentiel récemment évoqué par la CGT, celui consistant à « abandonner » l’existant « à des informaticiens démotivés par la perte de leur métier. » La logique organisationnelle défendue par Patrick Kleer nécessitera une « montée en compétences » des personnels existants et « probablement des recrutements parce que l’on aura besoin d’inclure de nouvelles compétences. » |
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Quant à la gestion sociale du projet, Patrick Kleer ne conteste pas la pertinence des inquiétudes des syndicats sur la question des reclassements. Pour lui, il est évident que tous les informaticiens concernés par les suppressions de postes ne pourront pas être reclassés dans leur métier : « nous avons 61 unités informatiques. Dans certaines, il y a deux personnes. » Celles-ci semblent clairement appelées à disparaître : « on aura à peu près 700 développeurs demain ; on va faire des ‘paniers’ de taille significative, de 50 ou 80 personnes. »
La production, source clé d’économies
Mais les vraies sources des économies attendues avec le projet Nice résident, selon Patrick Kleer, dans « les infrastructures, le pilotage d’exploitation, les sites de production. » Une réflexion susceptible de conforter les syndicats dans leur analyse du récent choix, par les GIE Exa et AMT, de faire centres de calcul communs : fin novembre, une source syndicale indiquait ainsi au MagIT que « l’objectif affiché de ce projet n’était pas de s’inscrire dans l’optique de Nice mais, manifestement, nos dirigeants préparaient déjà ce programme. »
Quant à la consolidation des SI de la FNCA et de LCL, enfin, officiellement « elle n’est pas à l’ordre du jour. » Pour Patrick Kleer, d’ailleurs, s’il peut être envisageable de partager certaines fonctions ou applications, pour des éléments de « cœur de métier, comme la gestion de la relation client, il n'est pas évident que l’on ait envie de partager. »
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