Collectivités locales : la ruée vers l’or des datacenters
Les datacenters seraient-ils la nouvelle richesse méconnue des collectivités territoriales françaises ? Une réponse positive à cette question semble assez largement partagée. Et tant pis si, en termes d’emplois directs, les centres de calcul n’ont rien d’une poule aux œufs d’or. Le pari des collectivités tient plus du moyen-long terme avec deux composantes : les emplois indirects et l’effet structurant de l’implantation de datacenters pour l’ensemble du tissu économique local.
Les datacenters, un remède anti-crise ? Cela se pourrait bien, si l’on en croît une étude du cabinet de conseil en développement économique local Regional Partner. Selon celle-ci, le marché de l’hébergement d’infrastructures informatiques devrait progresser de 23 % par an durant encore quelques années, en France, au Royaume-Uni, en Allemagne et aux Pays-Bas. Concrètement, cette croissance devrait se traduire par la création de 500 000 nouveaux mètres carrés de centres de calcul, en Europe de l’Ouest, au cours des 5 prochaines années, selon le spécialiste des systèmes de distribution électrique Legrand, cité dans l’étude. Bref, un véritable boom.
Pour l’heure, toujours selon l’étude de Regional Partner, c’est l’Ile-de-France qui se taille la part du lion, dans l’Hexagone, avec 43 % des principaux datacenters, à fin 2008, répartis sur 26 sites. La Seine Saint Denis, profitant de sa proximité avec Paris et du passage de la plupart des dorsales télécoms sur son territoire : ce n’est pas un hasard si Telecity Group vient d’y inaugurer son troisième datacenter parisien. En province, les implantations apparaissent moins concentrées, avec 34 sites.
Avec son initiative ITerritories, Regional Partner entend permettre aux collectivités locales attirées par la manne des datacenters d’améliorer la visibilité de leur offre et, ainsi, d'augmenter leur attractivité. En l’état, l’initiative regroupe six territoires : Lyon et sa région (Aderly), la région Artois (Osartis), les communautés d’agglomération de Caen et de Dunkerque, ainsi que les départements de l’Yonne et de Seine-et-Marne.
Des bénéfices attendus sur le long terme
Mais quel or représentent les datacenters pour qu’une telle course mérite d’être engagée ? La question est d’autant plus prégnante que la taxe professionnelle doit disparaître et que les datacenters ne sont pas de grands pourvoyeurs d’emplois directs. Bernard Leroy, maire de Vaudreuil et vice-président de la commission Développement Economique de la Communauté d’agglomération Seine-Eure – sur le territoire de laquelle se trouve notamment la zone d’activité Val de Reuil, où EDF achève actuellement la construction d’un centre de calcul – apporte un éclairage : « Il est toujours intéressant de voir s’implanter une activité économique fortement capitalistique, avec de hauts niveaux d’investissement, même si cela doit le devenir peut-être un peu moins que par le passé. Les datacenters apportent certes peu d’emplois directs mais génèrent toute une activité de services connexes. »
Pour lui, par analogie avec d’autres industries fortement capitalistiques, le ratio pourrait être d’un 1 pour 3, voire 1 pour 4, entre emplois directs et emplois indirects. Localement, pour Val de Reuil, l’ambition est également de « diversifier » les activités économiques locales, avec une implantation historique importante d’entreprises des secteurs de la pharmacie, de la cosmétique ou encore de la logistique. Outre la taxe professionnelle, l’arrivée d’un centre de calcul n’est pas non plus forcément anodin, en termes de fiscalité : tout autour de lui peuvent s’installer des activités d’hôtellerie, de restauration. Et les populations affectées au centre de calcul sont « plutôt qualifiées », avec des niveaux de revenus en conséquence. Mais, pour Bernard Leroy, un datacenter ne se résume pas à un calcul à court terme. Selon lui, il faut voir plus loin : « c’est un élément structurant qui peut servir de base au développement d’autres activités, dans le tertiaire notamment. »