Collaboration : l'entreprise 2.0 est encore un mythe
Selon une analyse de Jemm Research, cabinet français, les nouveaux usages collaboratifs peinent à faire leur trou dans les entreprises hexagonales. Avec des salariés attachés à leurs outils 1.0. Et une génération Y qui n'a pas le poids suffisant dans les organisations pour imposer ses choix.
Réseaux sociaux, messagerie instantanée, messagerie unifiée : tous ces nouveaux usages, parfois regroupés sous l'étiquette commode du 2.0, peinent à faire leur trou dans les entreprises françaises. A l'inverse, les utilisateurs (le panel choisi par Jemm pour son étude sponsorisée par IBM se composait à 50-50 d'utilisateurs métiers et d'informaticiens) continuent à plébisciter les outils traditionnels, notamment l'e-mail . "Sa suprématie n'est absolument pas remise en cause, observe Christophe Toulemonde, directeur du cabinet. Il y a un consensus autour des outils traditionnels et la méconnaissance des outils modernes ne plaide pas pour le remplacement d'Office ou du mail".
Si le constat est brutal, il masque tout de même la lente progression des outils 2.0 dans les organisations... ou, à défaut, leur usage via des terminaux mobiles (qualifiée "d'informatique souterraine" par Jemm). Ainsi, l'usage des réseaux sociaux atteint les 40 %, tandis que le messagerie instantanée peine à dépasser les 30 %. A comparer aux 65 % d'utilisation de la téléconférence téléphonique. Blogs, wikis, téléphonie unifiée et microblogging restent eux largement en-deçà des 10 %.
"La DSI impose ses choix"
Un état de fait que les utilisateurs ne remettent pas vraiment en cause. Seuls un peu plus de 20 % d'entre eux réclament le messagerie instantanée, les réseaux sociaux peinant à mobiliser 1 utilisateur sur 10. "Car, in fine, les utilisateurs ne sont pas décisionnaires, explique Jemm. L'alignement IT et métiers, on en est encore bien loin. Les outils sont encore largement imposés par la DSI". Selon le cabinet, 8 utilisateurs métier sur 10 se déclarent d'ailleurs non-décisionnaires dans les choix technologiques. Et presque autant affirment tout bonnement ne pas être informés des choix de la DSI en matière d'outils de collaboration.
Selon le cabinet, l'arrivée des outils 2.0 dans l'entreprise à la faveur de l'embauche des jeunes de la génération Y serait d'ailleurs un "mythe". Pour Jemm, l'arrivée de ces technologies est surtout le fait de la génération comprise entre 35 et 45 ans, car ce sont eux qui parviennent aujourd'hui à des postes à responsabilité.
Inadaptés aux structures très hiérarchisées
Au-delà, se posent les questions de l'utilité de ces outils pour les entreprises et de leur adaptation aux organisations en place. "Quand la décision est déléguée à un bas niveau, les outils 2.0 font sens. Mais pour des structures très hiérarchisées, comme dans le secteur financier, mieux vaut peut-être ne pas y aller", remarque Bertrand Garé, de Jemm Research.
Le cabinet relève d'ailleurs les difficultés des DSI à expliquer les apports de ces outils aux directions métiers et aux directions générales. De facto, l'absence de grands déploiements, associés à des retours quantifiables et à des analyses d'impact sur l'organisation, freine les appétits des directions informatiques en la matière. En dehors de l'email, l'outil le plus déployé - la téléconférence téléphonique - est d'ailleurs clairement associé à une volonté de réduire les coûts, en limitant les déplacements des collaborateurs. Pas réellement "une démarche conquérante", note Jemm, qui milite pour des porte-feuille de services 2.0 mis à disposition des utilisateurs et dans lesquels ces derniers viendraient piocher.