Le divorce entre HP et Cisco pourrait n'être que le premier d'une longue série
En coupant les liens avec HP en le privant de son statut de partenaire privilégié, Cisco a officiellement tiré les conclusions de la guerre larvée qui faisait rage entre les deux sociétés depuis plusieurs mois. Reste que le cas HP n'est que le premier d'une série pour Cisco. S'il est logique, ce dernier devrait en effet finir par rompre avec ses partenariats Dell et IBM. Mais Cisco peut-il se payer le luxe d'une guerre contre IBM et son bras armé, IBM Global Services ?
Sans cérémonie, Cisco a décidé de mettre un terme au partenariat commercial qui l’unissait à HP, une rupture qui sera consommée au 30 avril. Comme l’explique Keuth Goodwin, le patron des alliances de Cisco, « le fait d’être un partenaire certifié Cisco inclut de nombreux bénéfices dont l’accès à des informations privilégiées (comme les plans produits) et une rémunération accrue. Au vu de l’évolution de notre relation, cela ne fait tout simplement plus sens de continuer à donner à HP ces avanatages».
Les relations entre les deux sociétés autrefois plus que cordiales, ont pris un tour plus amer avec la montée en puissance progressive de la division réseau d’HP, Procurve, aujourd’hui le principal concurrent de Cisco sur le marché Ethernet, et elle se sont encore détériorées depuis le lancement par ce dernier de son offre de serveurs, vu par HP comme une agression sur son territoire.
Depuis la situation n’a fait qu’empirer. Soucieux de muscler son offre réseau, HP a fait l’acquisition de 3Com, un rachat qui devrait logiquement être finalisé d’ici l’été et qui fera de HP un concurrent frontal de Cisco sur plusieurs marchés clés pour le géant des réseaux, et notamment celui des réseaux pour DataCenter. La division sécurité de 3Com, TippingPoint, dont les produits sont utilisés par nombre de grands comptes pourrait aussi permettre à HP d’affronter Cisco sur le thème de la sécurité.
Paradoxalement, toutefois, la principale menace pour Cisco n’est pas tant sur le marché des réseaux, où le constructeur truste 85% des réseaux d’entreprise, mais sur le marché des serveurs, où une riposte brutale d’HP pourrait tuer dans l’oeuf les tentatives de Cisco de s’implanter avec sa gamme UCS. Déjà, HP a riposté à UCS en mai dernier avec le lancement de sa propre offre de serveurs convergents, le BladeSystem Matrix. Depuis, la rhétorique guerrière entre les deux groupes n’a fait que s’amplifier et HP a encore renforcé sa communication sur la convergence, en promettant des offres virtualisées et prêtes à l’emploi combinant serveurs, stockage et réseaux. Et pour mettre les points sur les «i» HP a noué un accord à 250 M$ avec Microsoft sur les architectures convergentes virtualisées, un accord qui sonne comme une réplique à l’alliance nouée entre Cisco, VMware et EMC.
En punissant HP, Cisco a donc choisi le plus en pointe de ses contradicteurs sur le marché. Pour l’instant, Dell et IBM sont épargnés par la fureur du constructeur californien. Reste que si ce dernier appliquait à IBM et à Dell la logique utiisée pour rompre avec HP, il devrait aussi couper les ponts avec les deux constructeurs. Dell et IBM ont en effet musclé leur discours anti-Cisco au cours des derniers mois et ils ont noués des accords OEM avec Brocade et Juniper pour muscler leurs offres de convergence et surtout pour préparer une alternative aux offres intégrées de Cisco. Le problème, notamment pour ce qui concerne IBM, est que Cisco ne peut sans doute pas se permettre de se fâcher brutalement avec IBM Global Services, qui a été un allié précieux dans sa conquête des grands datacenters.
En fait l'avenir de la relation entre Cisco, Dell et IBM devrait dépendre du succès de l'offensive du Californien sur le marché des serveurs. Si les systèmes UCS décollent, la rupture sera de toute façon consommée, IBM et Dell n’ayant aucun intérêt à mettre en avant les équipements permettant de financer la guerre que leur mène Cisco sur le marché des serveurs. Si, en revanche, l’offre UCS ne décolle pas, Dell et IBM pourraient vouloir faire payer cher à John Chambers le simple fait d'avoir tenté une intrusion sur leur pré-carré .