Tech@work 2010 : Le Superdome réincarné sous forme de serveur en lames.

A Francfort, HP a profité de sa conférence utilisateurs annuelle pour dévoiler les premiers éléments sur son futur serveur Unix haut de gamme, le Superdome 2. Attendu en septembre, ce serveur s'appuiera sur une architecture Numa à base de serveurs en lames. Reste que de nombreuses questions restent en suspens sur les capacités réelles de la machine et sur ses performances, HP n'ayant pour l'instant communiqué qu'avec parcimonie sur les capacités du Superdome 2.

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Le nouveau chassis lame 19'' du Superdome 2
avec ses huit lames bi-processeur peuplées
de processeurs Intel Itanium 9300.

En annonçant hier la disponibilité de ses nouveaux serveurs Unix d’entrée de gamme à base d’Itanium 2 quadri-socket «Tukwila», HP a aussi levé le voile sur son prochain serveur haut de gamme, le Superdome 2. La principale nouveauté de cette dernière incarnation du fleuron de la gamme Unix d’HP est qu’elle s’appuie sur un nouveau grand châssis à base de serveur lames reprenant une large partie des caractéristiques du BladeSystem c7000, avec toutefois une sauce spéciale : la mise en oeuvre d’un système d’interconnexion Numa à très hautes performances entre lames leur permettant de fonctionner comme un système unique. Comme tout cela demande de la place et qu’HP entendait aussi maximiser la capacité mémoire de son nouveau haut de gamme, le châssis du Superdome 2 occupe 18U en hauteur et les lames sont considérablement plus hautes. Reste que le système de connectique avec le fond de panier est similaire à celui du c7000, à tel point que le nouveau châssis, baptisé c9000, peut aussi accueillir des serveurs lames conçus pour le c7000 (même si cela ne présente pas grand intérêt, ces lames étant incapable d'utiliser le système de fédération du chassis c9000).

Un peu d’histoire
Le premier Superdome est né en 2000, pour succéder à la précédente offre haut de gamme d’HP qui permettait d’assembler 4 serveurs HP9000 V2500 en une machine NUMA unique au moyen d’une matrice de commutation nonbloquante (ou crossbar). L’architecture interne de cette première mouture du fleuron de la gamme HP a en fait repris largement le concept des V2500 mais sous une forme plus monolithique. HP a en fait développé un nouveau chipset cc-Numa, baptisé «Yosemite», permettant de fédérer en un système unique ce que HP appelle des quadrants. Chaque quadrant assemblait jusqu’à 4 lames processeur PA-Risc (ou cellules) au moyen d’un crossbar. Les différents quadrants pouvant ensuite être agrégés au sein d’une entité physique unique grâce à un autre crossbar. En configuration maximale, un Superdome disposait alors de 64 processeurs (soit quatre quadrants chacun doté de 4 cellules de 4 processeurs).

Cette architecture n'a finalement que peu évolué dans le temps. Ainsi, en 2002, HP a concentré ses efforts sur le support de l'Itanium dans le Superdome, rebaptisée pour l’occasion Integrity Superdome. Cette mouture s’appuyait sur un nouveau chipset  développé par HP, le sx1000 «Pinnacle». En 2006, HP a dévoilé  le sx2000 «Arches» plus performant, en amont de l’arrivée des Itanium 2 bi-coeurs «Montecito». Le sx2000 a notamment permis de doper les performances de communication entre les cellules d’un même quadrant (via l’ajout d’un lien crossbar additionnel). Il faut en effet savoir que comme dans toute configuration NUMA, les performances sont maximales lors qu’une application ou une partition est limitée à un quadrant. C’est en effet à l’intérieur d’un quadrant que les communications entre les composants se font avec les performances les plus élevées. Lorsqu'une application ou partition englobe plusieurs quadrants, il faut en effet subir les pénalités liés à l’utilisation du bus NUMA (notamment pour ce qui est de la gestion de la cohérence de cache).

Superdome 2 : une architecture NUMA rénovée

Pour le Superdome 2, HP a encore une fois fait évoluer son architecture de crossbar NUMA en développant le chipset sx3000.L e sx3000 est à la fois un contrôleur d’entrées/sorties (il remplace à cet égard le chipset Intel 7500 des lames BL8xx), un contrôleur de noeud et un crossbar NUMA. C’est la présence du chipset sx3000 sur les lames du Superdome 2 qui permet à HP d’assembler plus de 8 processeurs et donc de faire la différence avec les lames Itanium de la série BL860c i2 qui donnent naissance aux nouveaux serveurs Integrity d’entrée de gamme. Le bus QuickPath est en effet limité à un maximum de 8 processeurs dans un même système et il faut un bus système de plus haut niveau pour aller au delà de cette limitation.

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Martin Fin, le patron de la division serveurs critiques d'HP, montre une lame Superdome 2

Le sx3000 fournit ce bus en mettant en oeuvre un protocole d’encapsulation des messages Quickpath à base d’annuaire qui assure la communication entre les différentes lames insérées dans le châssis Superdome 2. Pour des raisons de redondance et de performance, chaque lame embarque deux puces sx3000 reliées aux processeurs de la lame. Ces puces communiquent entre elles d’une lame à l’autre au travers de modules crossbar redondants situès à l’arrière du châssis lame. Les modules redondants fonctionnent en mode actif/actif et les chipsets présents sur chacune des lames  suivent toutes les transactions sur le bus  jusqu’à leur bonne exécution. En cas de défaillance, le chipset est capable de détecter l’erreur et de basculer, si nécessaire, la transaction sur le second crossbar, le tout sans aucun impact sur l’intégrité des applications s’exécutant sur la machine. Il est à noter que le c9000 étant dérivé du c7000, ce nouveau châssis haut de gamme partage les mêmes composants (ventilateurs, alimentations...) ce qui devrait singulièrement réduire le coût des pièces détachées mais aussi assurer une disponibilité optimale de ces pièces.

Et si HP préparait aussi un Superdome x86...
L’architecture du Superdome 2 et surtout le fait que son chipset soit vraisemblablement largement agnostique quant à l’architecture processeur des lames - pourvu que les processeurs et question utilisent le bus Quickpath -, nous a amené à interroger Martin Fink sur la possibilté de voir arriver des lames à base de Xeon pour le châssis du Superdome 2.

Un châssis c9000 pourrait en effet permettre d'obtenir un grand serveur x86 agrégeant jusqu’à 16 puces Xeon 7500, une capacité d’ailleurs similaire à celle que Bull proposera avec ses systèmes Bullion, dont on devrait voir une déclinaison Itanium à l’automne (Comme le Superdome 2, le Bullion utilise un chipset NUMA à base d’annuaire pour agréger jusqu’à 4 serveurs quadri-socket en un seul grand serveur). HP est resté toutefois muet sur ce sujet en notant que tout autant que l’architecture matérielle, il faut aussi le système d’exploitation pour gérer un tel grand système.

Reste qu’HP est bien placé pour savoir que certains de ses clients ont fait le choix de Windows sur grands serveurs Itanium notamment pour héberger des grandes bases de données SQL Server. Ces clients pourraient être séduits par les promesses d’un grand serveur x86 doté des capacités de redondance du châssis C9000. Mais cela contraindrait HP à admettre qu’il est possible aujourd’hui de fabriquer un grand serveur x86 avec le niveau de fiabilité d’un serveur Unix et reviendrait sans doute à se tirer une balle dans le pied pour ce qui concerne Itanium. Reste que chez HP, on envisage sans doute le plan B. Car si les ventes d’Itanium venaient encore à reculer face à la montée en puissance des serveurs x86 concurrents et du Power7, il ne faudrait sans doute pas investir lourdement pour produire une version Xeon du Superdome 2 sous Windows et Linux et répliquer au Power7 avec tous les avantages économiques d’une architecture banalisée et tous les avantages d’une architecture matérielle héritée du monde Unix.
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De nombreuses questions en suspens
Bien des questions restent toutefois en suspens suite à la présentation effectuée en conférence de presse lors de Tech@Work. Ainsi le châssis montré par Martin Fink ne peut accueillir que huit lames bi-processeurs (chacune avec deux Itanium 9300, deux puces sx3000 et 32 emplacements pour barettes DIMM DDR3). Cela veut dire un maximum de 64 coeurs CPU et de 2 To de mémoire, soit deux fois moins de coeurs que l’actuel haut de gamme, mais dans un espace singulièrement réduit. Ainsi, le châssis Superdome 2 sans ses tiroirs d’extension d’entrées/sorties occupe 18 U dans un rack 19’’ standard, contre deux armoires pleines de 24’’ de large pour le Superdome actuel. Ces fameux tiroirs I/O externes - dont le nombre maximum n'a pas été précisé - sont une des autres nouveautés du Superdome 2. Ils permettent à la machine de disposer d’un nombre élevé de slots PCIe 2.0 pour ajouter des cartes d’entrées/sorties à la machine. Il devrait d’ailleurs être possible d’assigner n’importe quelle carte PCIe d’un tiroir I/O à n’importe quelle lame (c’est en tout cas ce que nous avons compris de l’explication rapide de Martin Fink, le patron des serveurs critiques d’HP).
Interrogé par LeMagIT, le même Martin Fink, n’a en revanche pas souhaité répondre à nos questions sur des configurations Superdome 2au delà de 64 coeurs. «Ce que vous voyez est ce que nous annonçons pour l’instant», a-t-il indiqué. Mais on peut légitimement penser que le châssis c9000 est l’équivalent moderne d’un quadrant dans l’ancien Superdome et qu’il sera sans doute possible de lier 4 châssis à terme dans un grand serveur Superdome 2. Un tel système disposerait de 64 processeurs (donc de 256 coeurs) et d’un maximum de 8 To de mémoire vive. De quoi affronter plus sereinement le futur haut de gamme IBM attendu pour le second semestre. Reste qu’HP a encore du temps pour fournir plus de détails sur son architecture. Les Superdome 2 ne sont en effet attendus que pour le mois de septembre.

HP-UX désormais facturé au socket processeur
Terminons enfin en abordant la question des OS qui fonctionneront sur la machine. Il semble que HP ne supportera que HP-UX sur cette machine au moins dans un premier temps. Microsoft et Red Hat ayant décidé d’abandonner Itanium, on voit mal HP mettre ces deux OS au catalogue du Superdome. HP explique que le nouveau Superdome 2 est conçu pour fonctionner nativement avec HP-UX 11i v3 Update 5 - le premier HP-UX 11i v3 remonte à février 2007 - , ce qui fait que toutes les applications certifiées pour cet OS fonctionnent sur le nouveau Superdome 2.
HP-UX 11i v3 Update 6, attendu au second semestre, devrait aussi être supporté en natif. Quant à HP 11i v4, il est attendu mi-2011 et devrait offrir de nouvelles fonctions de disponibilité et de virtualisation sur les Superdome 2.
En attendant, la bonne surprise est la décision d’HP de revoir le modèle de licence de son système d’exploitation Unix, qui sera désormais facturé au socket processeur, sans augmentation de prix. En clair, il ne faudra pas payer plus pour 4 coeurs que pour deux coeurs auparavant, une bonne nouvelle pour les clients et une incitation supplémentaire à migrer vers des systèmes plus denses.

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