L'état du monde IT : 2009, année de tous les dangers pour Sun

Après une année difficile, Sun a terminé 2008 englué dans la crise financière avec des ventes de serveurs haut de gamme en chute libre, une réorganisation de ses activités logicielles et un plan de licenciements. Sous la houlette de Jonathan Schwartz, Sun n'est finalement pas si différent de l'époque Scott McNealy; et ses revenus dépendent encore largement du matériel et des services associés. Le vrai challenge de la firme pour 2009 sera donc de faire décoller son activité logiciel open-source, ou de changer radicalement.

Plutôt bien commencée, l'année 2008 de Sun s'est terminée comme un chemin de croix du fait de l'effondrement des commandes de plusieurs secteurs traditionnellement très consommateurs des équipements du constructeur. Sun qui n'a élargi son offre que très récemment aux plates-formes x86, est plus vulnérable que ses concurrents et sa stratégie logicielle Open source peine encore à porter ses fruits. La crise frappe donc au pire moment, alors que le constructeur est en pleine transition. 

Historiquement Sun a connu la gloire avec ses serveurs Unix lors de la première bulle Internet; et a bâti une réputation d'innovation dans le logiciel avec son système d'exploitation Solaris et des technologies comme Java. Mais la firme ne s'est jamais vraiment remise de l'explosion de la bulle. Concurrencé sur le haut de gamme Unix par un IBM de plus en plus agressif, Sun a tenté d'aller chercher une nouvelle source de croissance dans le logiciel, une tentative qui est à ce jour le plus grand échec de la firme. Pourtant, le logiciel est l'un des deux grands piliers stratégiques affichés par l'entreprise, au côté du développement des serveurs x86 et des serveurs massivement multithreadés.

Une conversion douloureuse à l'Open source

Cela fait près de 10 ans que Sun tente de développer une solide activité dans le logiciel d'infrastructure pour compléter son offre de système d'exploitation Unix Solaris et sa géniale intuition de faire de Java une plate-forme d'infrastructure serveur. Dix ans de errements, de ratés et de gaspillage, qui ont finalement convaincu Jonathan Schwartz, le patron de Sun, que le salut passait par la mise en open source de l'ensemble du catalogue logiciel de la firme et par le développement d'un modèle similaire à ceux d'un Alfresco ou d'un Novell. Cette transition abordée en 2007 et largement concrétisée en 2008 semble commencer à porter ses fruits. Mais entre les discours enthousiastes de Jonathan Schwartz et la froide réalité des chiffres, il y a un gouffre et un noir constat : le logiciel ne pèse qu'à peine 5% des revenus de Sun, soit 644 M$ sur l'année fiscale 2008 sur un total de 13,8 Md$ de CA. 

Sun appuie son activité logicielle sur trois piliers : la technologie Java et ses dérivées (JavaCard, JavaFX...), les outils de middleware et d'infrastructure (dont MySQL) et les systèmes d'exploitation et outils de virtualisation. Le premier pilier dépend largement d'un modèle de licence et de support, où Sun fournit sa technologie de machine virtuelle et ses licences technologiques à des tiers (opérateurs, constructeurs de set-topbox, de lecteurs Blu-Ray, de téléphones mobiles, fabricants de cartes SIM...). C'est aujourd'hui une activité mature dont les revenus stagnent. Sun entend relancer l'adoption de Java sur le poste client avec sa technologie RIA, JavaFX. Mais, comme à son accoutumée, la firme n'a pas tenu ses délais et n'a livré sa technologie qu'avec de nombreux mois de retard. Sur un marché où les concurrents avancent vite mais où l'on en est encore qu'aux débuts, il faudra attendre 2009 pour savoir si ce retard aura des conséquences pour la technologie. 

Sur le marché des middleware et des outils de développement, Sun s'est laissé déborder par les concurrents et n'est plus qu'un acteur marginal face à IBM, Oracle, et même Red Hat. Au cours des dernières années, Sun a largement échoué à intégrer efficacement les technologies issues des rachats (coûteux) de Netscape/iPlanet, Forté, Netbeans et SeeBeyond; et il a été distancé par ses concurrents commerciaux. Sun a ensuite commis l'erreur de trainer à ouvrir Java et a été débordé par la première vague des outils et middleware open-source, incarnée par Eclipse et par Jboss. Aujourd'hui, la firme dispose avec GlassFish d'un serveur J2EE libre qui fait office de référence pour les spécifications Java. Mais face aux acteurs établis, Sun devra batailler ferme pour regagner le terrain perdu depuis l'époque iPlanet. Si l'Open source lui confère sans doute un avantage tarifaire face à un IBM ou à un Oracle, surtout en ces temps de crise, la vraie question est aujourd'hui de savoir si ces acteurs ne sont pas tout simplement trop installés pour être délogés. 2009 devrait apporter une partie de la réponse, de la même façon que les chiffres de ventes de MySQL permettront de savoir si le pari à un milliard de Schwartz était judicieux, ou si MySQL finira lui aussi comme l'une des acquisitions ratées de Sun...

Solaris x86 : le cheval de bataille de Sun face à Linux et à Windows

Sur le segment des systèmes d'exploitation, la mise en open source de Solaris doit encore faire ses preuves même si, après 18 mois d'intenses développements, l'OS n'a plus grande chose à envier à son principal concurrent, Linux. Venu du monde Sparc, l'OS de Sun est sans doute le plus respecté des OS Unix du fait notamment d'innovations continues comme ZFS ou DTrace, mais aussi du souci de la firme pour la compatibilité applicative. Solaris est aussi le seul Unix industriel à tourner aussi sur plates-formes x86, offrant ironiquement aux clients Sun une éventuelle porte de sortie à moindre coût depuis les plates-formes Sparc. Logiquement, Sun a pour l'instant assigné à Solaris x86 la mission d'endiguer la cannibalisation de sa base installée par Linux, mais 2008 a vu le constructeur afficher des ambitions plus élevées notamment dans la virtualisation de serveurs x86, ou dans le stockage avec la communauté Solaris OpenStorage. 

Afin de faire de Solaris une alternative à Linux, Sun a beaucoup investi dans le développement d'OpenSolaris. Mais on ne peut s'empêcher de penser que ces développements ont été insuffisants. Plutôt que de gaspiller 3 Md$ en rachats d'actions, on se demande si Sun n'aurait pas mieux fait de mettre quelques centaines de millions de dollars additionnels en R&D et en marketing pour accélérer les développements autour de l'OS, doper son écosystème et mieux le promouvoir auprès des clients. Les mêmes questions se posent d'ailleurs pour la couche de virtualisation xVM Server.

Sun est le seul constructeur a avoir annoncé son intention de développer un hyperviseur pour serveurs x86, en l'occurrence xVMServer, un hyperviseur Xen s'appuyant sur le noyau Solaris. Présenté début 2008, annoncé pour la mi 2008, puis pour la rentrée, puis pour novembre, xVM Server 1.0 n'est toujours pas disponible et l'état de la dernière bêta installée par LeMagIT montre des faiblesses crasses face à la concurrence (notamment en matière de compatibilité matérielle et de gestion du réseau et du stockage). Pour un produit lancé officiellement en septembre 2008, cela commence à faire désordre. 

S'il est en revanche un domaine où la stratégie open source semble commencer à porter ses fruits c'est celui du stockage. Dans ce secteur, Sun a choisi de développer une nouvelle ligne de systèmes combinant composants banalisés (serveurs x86 et baies de disques) avec une version embarquée et optimisée stockage de Solaris. Avec ces machines, Sun affiche un rapport performance/fonctionnalités/prix défiant toute concurrence et espère grignoter du terrain tout d'abord sur le segment des serveurs NAS, avant de s'attaquer courant 2009 aux baies SAN. Une façon originale pour le constructeur de rentabiliser ses investissements dans sa pile logicielle libre et qui a le mérite de faire rentrer des dollars dans les caisses à l'heure où la firme peine à monétiser les différents éléments de son offre libre. Que Schwartz se rassure toutefois : si sa stratégie logicielle venait à échouer, son successeur pourra lui aussi modifier l'intitulé boursier de Sun et ramener l'actuel JAVA à l'historique SUNW, à moins que d'ici là un concurrent ne décide de manger Sun. Ce serait un investissement abordable : la capitalisation boursière de Sun est aujourd'hui de 2,78 Md$ soit moins que les 3 Md$ de trésorerie qu'il détient dans ses caisses...

   

Toute l'année de Sun en une vingtaine d'articles publiés sur LeMagIT :

- Décembre 2008

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Fermeture de Network.com : Schwartz tue l'avenir de l'informatique

Le fonds qui détient 22% de Sun veut plus de place au conseil d ...

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Sun fait enfin de l'oeil aux PME européennes

- Novembre

Sun dope son offre NAS à l'Open Source

Rincé, Sun se régénère en licenciant et en se jetant dans l'open source

- Octobre 

Lourdes pertes pour Sun dont la stratégie logicielle peine à porter ses fruits

Sun T5440 : des performances Unix haut de gamme à des prix proches de l'entrée de gamme

- Septembre

Avec Kenai, Sun veut se créer un bonne conduite Open Source

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- Août

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