L'état du monde IT : l'inquiétant Monsieur Google
Autrefois vu comme un modèle idéal de société Internet, Google fait aujourd'hui figure de pieuvre au point que la société a été a plusieurs reprises menacée de poursuites antitrust cette année. Avec un flair indéniable, le moteur de recherche a su encore investir dans toutes les technologies émergentes qui comptent. Mais son omniprésence inquiète de plus en plus les autorités de la concurrence et les défenseurs de la vie privée. Le prix à payer pour la fin de la naïveté ?
Plus de deux tiers des parts de marché de la recherche aux Etats-Unis, plus de 85 % en Europe : on connaissait depuis longtemps la puissance de Google dans son domaine historique. Mais 2008 aura confirmé la volonté du moteur de recherche d'étendre son emprise à d'autres secteurs, avec pour objectif d'assoir sa domination sur l'Internet et de devenir un point de passage obligé aussi bien pour les particuliers, que, et c'est nouveau, pour les entreprises.
La pieuvre Google que décrivent certains analystes n'est pas si loin de la grenouille qu'a choisi notre dessinateur Cointe pour dépeindre le géant de l'Internet, a ceci près que la grenouille s'est faite boeuf à une vitesse jusqu'alors inconnue. La firme est devenue tellement incontournable sur son secteur que sa domination a commencé à faire raisonner les sirènes d'alarmes des autorités de la concurrence mondiale. Il aura fallu un peu plus de cinq ans à Google pour réaliser cet exploit quand il en avait fallu plus de vingt à Microsoft et près de quatre-vingt à IBM. Et ce n'est sans doute pas parce que les autorités de la concurrence sont devenues plus performantes...
Menace pour la vie privée, la presse et le droit d'auteur ?
Google fascine, mais Google inquiète. En constituant de vastes entrepôts de données sur les habitudes de navigation et de recherche de ses utilisateurs, mais aussi en indexant leurs e-mails, en analysant les usages de ses applications (Google Apps, Google Maps, Google Earth...), la firme est devenu un Big Brother en puissance que dénoncent les défenseurs des libertés individuelles. Et le lancement récent de Google Health (gestion du dossier médical aux US) n'arrange rien à l'affaire.
Google est aussi devenu le bouc émissaire des journalistes et des éditeurs de presse qui l'accusent d'abuser de sa puissance pour profiter indument de leurs oeuvres, mais aussi pour tirer vers le bas les prix de la publicité et s'accaparer une part disproportionnée des revenus de ladite publicité sur les contenus. L'incontournable intermédiaire serait devenu un Gripsou trop gourmand, selon de nombreux confrères, et menacerait l'économie entière du secteur. Et c'est encore sans s'attarder sur le cas YouTube (racheté par Google) qui fait l'objet de multiples procès des deux côtés de l'Atlantique pour piratage massif de contenus audio et vidéo (avec notamment en France des poursuites émanant de l'INA et de TF1).
Un pied dans toutes les technologies émergentes
Les velléités récentes de Google en matière applicative fascinent et inquiètent aussi. En 2007, Google avait marqué les esprit en lançant sa suite bureautique en ligne Google Apps, un lancement qui avait déclenché le tocsin chez Microsoft et contraint le géant du logiciel à réagir – il ne serait pas le seul puisqu'il se murmure qu'Apple travaillerait lui aussi au développement d'applications en ligne.
En 2008, le géant a encore accéléré, en dévoilant tour à tour sa plate-forme Web Riche (Gears), une plate-forme système d'exploitation pour téléphone mobile (Android), un navigateur Web (Chrome), un service d'informatique en nuage (App Engine) et une technologie de client serveur modernisée pour le Web 2.0 (Native Client). Plus proche des préoccupations des DSI, Google a aussi amélioré son offre Apps à destination des entreprises (offre « Premium »), a renforcé ses appliances de recherche pour entreprises et a noué un partenariat stratégiques avec SalesForce.
Certes, Google n'est pas non plus tout-puissant et la fin de l'année l'a aussi contraint à réduire la voilure en supprimant près de 10 000 emplois de contractuels et en fermant certains de ses services comme le monde virtuel Google Lively. Mais l'omniprésence de la firme sur le Web et son infiltration dans un nombre croissant de secteurs de l'informatique et des télécoms, si elles fascinent, inquiètent également.
Ne pas vendre son âme au diable
Dans sa philosophie d'entreprise, Google explique qu'il « est possible de gagner de l'argent sans vendre son âme au diable ». Pour certains, la vraie question est surtout de savoir s'il est possible de ne pas en gagner trop sans le devenir. Pour mémoire, Google devrait réaliser près de 22 Md$ de CA en 2008, soit 3,5 fois plus qu'en 2005, et générer un excédent de trésorerie de plus de 5 Md$ net après des investissements records en infrastructures. La firme devrait ainsi terminer l'année avec près de 16 Md$ de cash en banque. D'accord, Microsoft et Apple font encore mieux. Mais qui a dit que la recherche ne payait pas ?
L'actualité 2008 de Google en une vingtaine d'articles publiés sur LeMagIT
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