La Banque Mondiale a servi de poule aux œufs d’or aux SSII indiennes
La Banque Mondiale a révélé, ce 11 janvier, avoir également banni les indiens Wipro et Megasoft, en plus de Satyam. Evoquant des « bénéfices inappropriés aux personnels » de l’organisation pour les deux SSII, et un travail conjoint avec des salariés de la Banque Mondiale, dans une co-entreprise, pour Megasoft. Le tout pour ce qui prend la tourne d’une vaste affaire de collusion et d’enrichissement personnel indu.
Très en pointe sur le dossier du scandale Satyam à la Banque Mondiale, notre confrère Richard Behar, de Fox News, n’hésite pas : selon lui, Megasoft a été utilisé par Satyam pour monopoliser au maximum les marchés IT de la Banque Mondiale. Le journaliste fait ainsi référence à des éléments troublants des rapports d’activité annuels de Megasoft, mettant en évidence des liens assez étroits avec Satyam. Dans le rapport de 2003, on peut ainsi lire que Ravindra Sannareddy, fondateur de Megasoft aux Etats-Unis, connaît bien Satyam, dont il a dirigé la division services logiciels outre Atlantique pendant quatre ans.
Les soupçons de complicité entre Satyam et Megasoft sont d’autant plus grands que Srini Raju, l’un des fondateurs de Satyam, a racheté Megasoft en janvier 2004, par échange d’action, avec sa société personnelle Xius, qui fournissait notamment des cartes SIM prépayées pour l’itinérance aux opérateurs mobiles indiens. Une opération dont la valorisation avait été assurée par PwC. Peu après ce rachat, Megasoft a obtenu un contrat avec la Banque Mondiale.
Mais Megasoft avait plusieurs autres leviers pour séduire la Banque Mondiale : l’un de ses directeurs de septembre 2003 à avril 2007, Ben Li Hu, fut un temps directeur technique de l’institution ; ProLease, l’un de ses investisseurs, spécialiste du BPO et renommé TalentPro en 2006, travaillait déjà avec la Banque Mondiale en 2002. Et c’est en 2003 que Satyam a remporté un important contrat d’externalisation de cinq ans avec l’institution.
Chez Fox News, Richard Behar révèle de son côté que, selon des sources internes à la Banque Mondiale, Satyam aurait été informé qu’il lui serait impossible de postuler pour des contrats supplémentaires auprès de l’organisation. Mais, selon un ancien enquêteur de la Banque Mondiale, « de nombreux contrats que Satyam n’avait pas allaient à Megasoft. » A partir de 2005, Satyam aurait même « converti » certains de ses salariés détachés auprès de la Banque Mondiale, en salariés de Megasoft. Des liens étroits – avec plusieurs milliers de contrats différents - qui, toujours selon l’enquêteur interrogé par Fox News, auraient sensiblement retardé l’enquête interne de la Banque Mondiale.
Mais, non content de ses différents atouts pour entrer à la Banque Mondiale, Satyam aurait en outre permis au DSI de l’institution de s’enrichir indument. Celui-ci, Mohamed Muhsin, aurait notamment tiré près de 150 000 $ de plus value d’actions Sify, la branche services hébergés de Satyam. Muhsin aurait achetées des actions de la SSII à 18 $ lors de son introduction en bourse aux Etats-Unis fin 1999, alors que l’action a coté 45,5 $ dès l’ouverture. Selon un document internet de la Banque Mondiale, obtenu par Fox News. D’autres opérations, moins heureuses, ont suivi. Mais Mohamed Mushin a eu l’occasion de se refaire.
Wipro, Satyam et Megasoft dans le même bateau ?
En 2002, c’est Wipro qui a décroché un contrat avec la Banque Mondiale, à New Delhi, pour environ 250 000 $, selon Richard Behar, alors que Mohamed Muhsin était aux manettes. Rebelotte en 2005 avec un contrat à 650 000 $...pour l’implémentation de l'équivalent américain de la loi de sécurité financière, la fameuse réglementation Sarbanes-Oxley, à la suite du scandale Enron.
Et si Wipro s’est de son côté attaché à minimiser la portée de son offre de prise d’action en faveur des salariés de la Banque Mondiale, évoquant un montant de seulement 72000 $ pour 1750 actions, Fox News s’interroge sur le calendrier : ces actions n’ont été proposées aux collaborateurs de la Banque Mondiale que quelques semaines après que Wipro en soit devenu le fournisseur, en octobre 2000. Mohamed Muhsin aurait acquis 300 de ces actions à prix préférentiel. En octobre 2005, il a pris la porte de la Banque Mondiale. Reste que, selon The Australian, Joshua Hochberg, l’avocat de Mohamed Mushin, réfute tout interférence de son client dans les décisions de la Banque Mondiale.
Mais Fox News insiste, et s’interroge sur le fait que Satyam ait pu remporter un contrat auprès de l’Organisation des Nations Unis, en juillet 2008, alors que l’enquête de la Banque Mondiale était close depuis plusieurs mois. De son côté, le Programme de Développement des Nations Unies a décidé de ne pas renouveler un contrat d’un an conclu en décembre 2007 avec Satyam, à la suite des informations parues dans la presse.