Carol Bartz s’embarque à la tête de Yahoo
Yahoo a enfin trouvé un remplaçant à Jerry Yang démissionnaire. Carol Bartz – actuelle présidente d’Autodesk – a accepté de s’y coller et demande un peu de patience et moins de conseils de la part des « amis » de l’extérieur. Elle aura du travail, tant le portail - pourtant en mal de stratégie et en pleine hémorragie de cadres - suscite la convoitise.
C’est désormais officiel. Comme une information du Wall Street Journal le laissait entendre la semaine passée, Yahoo a finalement dégoté son nouveau PDG et il s’agit bien de Carol Bartz (photo), l’actuelle présidente d’Autodesk.
La nomination d’un profil tel que celui de Bartz semble vouloir dire que Yahoo s’est choisi un patron habitué des entreprises cotées - plus classiques -, plutôt qu’un roi de l’Internet ou de la publicité en ligne. De fait, à peine sa nomination entérinée, Carol Bartz a évoqué la suite dans des termes très généraux. Selon elle, la première chose à faire est de protéger l’entreprise des pressions externes qu’elle subit depuis trop longtemps. « Trop de gens à l’extérieur expliquent ce que Yahoo doit faire ou ne pas faire, ce qui est le mieux pour lui. Ca va cesser », a-t-elle affirmé en conférence de presse. Elle suggère que le portail doit suivre sa propre voie.
Toujours pas de stratégie claire
Une déclaration d’intention bienvenue mais qui ne doit pas masquer la réalité : en manque de stratégie et sortie exsangue des luttes du printemps qui ont conduit au départ de Jerry Yang et à l’arrivée en force de Carl Icahn au conseil d’administration, l’un des fleurons de la toute première génération d’entreprises Internet est toujours la proie de ses deux principaux concurrents, Microsoft et Google. Chacun à leur manière, ces deux acteurs ont intérêt à voir Yahoo diminué, tout en espérant pouvoir récupérer tout ou partie des actifs – audience, mais également technologies de recherche – de la société en cas de défaillance ou de décision des actionnaires.
Tout au long de l’automne, Microsoft ne s’en est pas caché, réitérant régulièrement ses offres de rachat partiel. De son côté, Google a froidement rompu un partenariat qu’il avait pourtant suscité afin de ne pas subir l’ire des autorités antitrust américaines, sans proposer d’alternative. Et laissant Yahoo au milieu du guet.
Côté actionnaires, Carol Bartz aura d’autant plus leur confiance que - selon Roy Bostock, président du conseil d’administration de Yahoo, – ceux-ci recherchaient ce type de profil mixte, de connaisseur de l’univers IT et de celui des arcanes de Wall Street. Toujours selon Bostock, elle serait la seule à qui le poste aurait été proposé… En novembre, le nom d'Arun Sarin, ancien patron de Vodafone, avait cependant été cité avec insistance sur la blogosphère.
Sans Jerry Yang... ni Susan Decker
Reste que Carol Bartz débarque nantie d’un bon CV, mais sans réelle expérience du Web, ce qui tendrait à conforter l’hypothèse de la future nomination d’un n°2 avec une forte sensibilité Web et orienté grand public. D’ici là, la nouvelle égérie de la Silicon Valley explique vouloir en priorité dresser un audit de la situation - « qui prendra le temps qu’il faudra », précise-t-elle – en interrogeant les clients, les employés et les partenaires du groupe.
Par ailleurs, Roy Bostock a tenu à remercier Jerry Yang pour ses 18 mois à la tête du groupe en revenant sur son poids d’icône de Yahoo. Sans aucune autre précision, il a évoqué une éventuelle participation à venir dans la vie du groupe. Carol Bartz reprenant la totalité des prérogatives de PDG, Susan Decker – actuelle présidente – a remis sa démission au conseil d’administration et exprimé le souhait de quitter le groupe dans lequel elle aura passé près de 9 ans, y occupant différents postes de direction, dont la direction financière jusqu'à récemment. Selon le Wall Street Journal, Susan Decker aurait été candidate au poste de PDG. Il s’agit là du énième départ d’un des cadres historiques de la société. Au-delà de la stratégie du portail – notamment face à l’émergence des réseaux sociaux –, retenir ceux qui restent ne sera pas le moindre des soucis de Carol Bartz.