IDC abaisse encore ses prévisions, le risque de récession se précise pour l'IT
Le pire est désormais certain. Après avoir prévu un ralentissement mesuré des dépenses du secteur - tout en établissant des scenarii bien pires "au cas où" -, les cabinets d’étude reviennent peu à peu sur leurs prévisions. IDC en tête, qui estime que la récession n’est plus très loin avec une croissance prévisionnelle pour 2009 désormais ramenée à 0,5%. Et la visibilité ne s’améliore pas.
Revoir les prévisions à la baisse est devenu une sorte de sport dans le petit monde des cabinets d’étude. Depuis l’automne, l’absence de visibilité impose une navigation à vue aux analystes. Et ça ne s'améliore pas. Cette fois, c’est IDC qui revient avec ses nouveaux chiffres sur le niveau mondial de la dépense IT pour 2009. Elle ne devrait plus progresser que de 0,5 %, à 1 440 milliards de dollars. Lors de sa précédente estimation – fin novembre - le groupe de Framingham (Massachusetts) tablait encore sur une croissance de 2,6 %. Entretemps, les économies avancées sont toutes entrées en récession, et les pays émergents – qui étaient censés amortir le choc – montrent des signes de ralentissement important. Du coup, le spectre de la récession, avec une dépense qui reculerait, n’est plus très loin pour l’informatique. Un pas vers le pire qu'avait déjà fait Forrester en janvier anticipant - sur une autre base de calcul - un recul des dépenses de l'ordre de 3 % au niveau mondial.
Les constructeurs s’enfoncent, éditeurs et SSII surnagent encore
Reste que tout les segments du marché IT ne sont pas logés à la même enseigne. Selon IDC, ce sont les constructeurs qui devraient le plus pâtir de la crise avec une baisse des dépenses en matériel estimée à 3,6 %. A la clef, de fortes chutes sur les marchés serveurs, PC traditionnels et imprimantes. Du côté du logiciel et des services, l’année sera difficile mais tout de même positive avec une croissance attendue à 3,4 % en 2009. Les services semblent d’ailleurs devoir tenir le coup. Les prévisions d’activité en novembre sur ce segment s’établissait à 3,7 %, la révision est donc limitée. Moins favorable semble être la tendance côté logiciel, puisque, toujours en novembre, IDC prévoyait une croissance de 4,6 %, qui s’est bien érodée depuis.
Pour John Gantz, patron de la recherche du cabinet d’étude, « les données montrent une image claire de la manière dont les entreprises ont infléchi leurs dépenses. Les investissements en logiciels et services ont été maintenu afin de poursuivre la recherche de gains de productivité, mais les dépenses en matériel ont été abandonnées afin d’étirer le cycle de vie des infrastructures et de réduire leur nombre ».
La France recule, le Royaume-Uni résiste, les pays émergents craquent
Au niveau géographique, les Etats-Unis et l’Europe devraient enregistrer une croissance très faible des dépenses IT, de l’ordre de 0,1 % selon IDC. La chute la plus sévère touche l'Europe, où en novembre, le niveau attendu s’établissait encore à 1,2 %. Etonnamment, IDC estime que le marché devrait se maintenir en Allemagne et au Royaume-Uni, mais chuter en France et en Italie. D’autres analystes sont beaucoup moins confiants quant à la tenue des dépenses IT en Grande-Bretagne, pays durement affecté par la crise bancaire. Pour la France en revanche, IDC confirme des analyses plus locales qui n’hésitent plus depuis plusieurs semaines à évoquer une forte décrue des dépenses.
L’Asie devrait mieux se comporter. Mais, avec une croissance moyenne des dépenses autour de 1,4 %, on est loin des chiffres escomptés alors que les économies chinoises et indiennes étaient en plein essor. Ainsi la croissance en Chine est désormais attendue à 6,5 %, contre 9,1 % en novembre ; celle attendue en Inde est de 5,7 %, contre 10 % en novembre. La correction la plus brutale est enregistrée par le Japon avec une récession sévère des dépenses IT qui reculeront de 1,8 % selon IDC, là où le cabinet d’étude tablait encore sur 1 % de croissance en fin d'année dernière.
Autre région dite « émergente » - tout du moins en terme d’infrastructures IT – et connaissant une correction sévère : l’Europe de l’Est et la Russie qui devraient carrément voir les dépenses informatiques reculer de 7,5 %.
Le pire du pire… mais IDC voit toujours la lumière
Au total, Stephen Minton, vice-président d’IDC en charge des marchés mondiaux, explique que « les prévisions révisées sont finalement très proches du scénario le plus défavorable qui avait été développé par IDC en novembre, lequel se fondait sur la pire croissance du PIB mondial enregistrée depuis la seconde guerre mondiale ». Avant d’ajouter qu’en dépit du fait que « les prévisions pour 2009 sont pires que celles que nous estimions il y a tout juste trois mois, nous continuons de prévoir un léger rebond des dépenses IT en 2010 et un nouvel élan pour les années à suivre ». Une belle profession de foi pour des analystes que l’on pourrait bien de nouveau entendre d’ici le mois de juin tant chaque semaine apporte son lot de mauvaises nouvelles, que ce soit sur le front des fournisseurs, des projets ou encore de l’emploi.