36 700 recrutements de cadres IT en 2009 : il n'y a que le Pôle Emploi pour y croire
L'enquête publiée en fin de semaine dernière par le Pôle Emploi se montre optimiste quant aux recrutements de cadres en informatique en 2009. Trop optimiste pour la plupart des observateurs, qui pointent notamment des SSII qui, pour la plupart, ont gelé leurs recrutements...
Pour le Pôle Emploi, les recrutements de cadres en informatique vont se poursuivre à un niveau soutenu en 2009, et la majorité de ces recrutements resteront difficiles. Cette conclusion, issue de l'enquête annuelle sur les besoins en main d'oeuvre (BMO) qu'effectue le Credoc pour le Pôle Emploi (et hier pour les Assedic), apparaît bien sûr surprenante à l'heure où la plupart des SSII - le poumon de l'emploi IT du fait de leur taux de turnover notamment - ont pris des mesures de gel des recrutements. Et que les donneurs d'ordre se sont massivement engagés dans des mesures de réduction des coûts. Des mesures qui se sont traduites dans le nombre d'annonces recensées notamment par l'Apec (Agence pour l’emploi des cadres) : en février dernier, cette dernière enregistrait ainsi une chute de 40 %.
Imperturbable, l'enquête sur les besoins de main d'oeuvre des entreprises pour 2009 prévoit 36 717 recrutements dans la catégorie "ingénieurs et cadres de l'informatique (sauf technico-commerciaux)". Soit à peine moins que les 39 390 comptabilisés l'an dernier à la même époque. Une "légère" chute de 7 %. Et ces projets de recrutement sont jugés à peine moins difficiles qu'en 2008 (54 % des cas contre 65 % un an auparavant).
L'effondrement du turnover
Des résultats qui font sourire, côté syndical. Pour Ivan Béraud, secrétaire national de la F3C (Fédération Communication, Conseil, Culture) CFDT, l'effondrement du turnover en 2009 va "mécaniquement faire chuter les recrutements même sans destruction d'emploi". De facto, les chiffres de l'étude Credoc intègrent toutes les variétés de recrutement, promotions internes y compris. "Sur 10 embauches réalisées par les entreprises, quatre le sont en interne, trois par appel à des candidats débauchés dans une autre entreprise, deux viennent diminuer les rangs des chômeurs ou des inactifs et une correspond à un "primo arrivant" sur le marché du travail", détaille le Munci dans un article disséquant l'étude.
De facto, le Mouvement pour une union nationale et collégiale des informaticiens se montre critique vis-à-vis de cette étude. Ou plus exactement vis-à-vis de ses conséquences. "Dans le secteur, les prévisions de recrutement sont gonflées, et in fine jamais concrétisées. Mais là, on atteint un niveau ahurissant", explique le porte-parole du Munci, Régis Granarolo. Qui s'inquiète de l'impact possible de cette étude sur l'orientation des politiques publiques : "il y a certes un effet positif, puisque ce type d'étude favorise l'accès à la formation dans la branche. Mais c'est aussi une légitimation des délocalisations et de l'immigration économique sans condition", explique Régis Granarolo. Qui déplore également l'absence de suivi, l'enquête BMO n'étant pas assortie pour l'instant d'une étude sur les recrutements réellement réalisés. Une demande que le Munci compte formuler très officiellement auprès des services du Pôle Emploi.
Attentisme pour l'instant, verdict après l'été
Si le doute s'installe sur les résultats communiqués par le Pôle Emploi, c'est que cette édition 2009 de l'étude du Credoc est avant tout victime du timing : effectuée en novembre et décembre 2008, elle reflète l'opinion de DRH n'ayant pas encore pleinement pris la mesure de l'ampleur de la crise. "A cette période, les plans de recrutement étaient encore assez élevés, relève Ivan Béraud. Nous avions d'ailleurs protesté à l'époque en mettant en doute la réalité de ces prévisions". Pour le syndicaliste, les directions des entreprises du secteur - SSII en tête - sont aujourd'hui dans une position d'attentisme. "Tout va se jouer autour de l'été. Fin juin, les dirigeants auront une idée réaliste de leur exercice budgétaire. Si les projets ne redémarrent pas d'ici là, on aura une année sans recrutement". Autant dire que les 36 700 recrutements du Pôle Emploi apparaîtront alors comme une douce chimère.
Interrogé sur le sujet, le Pôle Emploi ne nous a fourni aucune réponse.
En savoir plus :
Accéder aux rapports publiés par le Pôle Emploi (y compris les études par région).