Internet des objets : Bruxelles veut reprendre l’avantage
A l’occasion d’une conférence d’inauguration du salon Cartes et Identification 2010, la Commission européenne a montré son engagement à hisser l’Europe aux postes clés de l’Internet des objets. Aujourd’hui loin derrière les Etats-Unis et la Chine, le Vieux Continent, par la voix de Bruxelles, entend coordonner sa réponse.
Sur l’imposant échiquier mondial que représente l’Internet des objets, Bruxelles veut que l’Europe soit aujourd’hui l'un des moteurs principaux. A l’occasion d’une conférence de présentation autour de l’édition 2010 du salon Cartes et Identifications (du 7 au 9 décembre 2010) - qui ouvrira cette année ses portes à la thématique Internet des objets et Machine-to-Machine - , la Commission européenne est venue rappeler combien l’Europe reste aujourd’hui à la traine en matière d’Internet des objets. Loin derrière les Etats-Unis et, surtout, la Chine dont la montée en puissance sur ce créneau se traduit par de lourds investissements consentis par Pékin et par une forte avancée technologique.
Dans un contexte où les enjeux sociétaux et géo-politiques sont omniprésents, Bruxelles a décidé de passer à la vitesse supérieure, et ce, en répartissant la pression sur les épaules des industriels européens. "Les industriels ont perdu le goût de la coopération", affirme ainsi Gérald Santucci, chef d’unité d’un groupe de 50 experts à Bruxelles, créé en août 2010, qui planche sur une réponse européenne. Tout en rappelant que "la notion d’Internet des objets a été posée pour la première fois en Europe, traduit avec la RFID aux Etats-Unis, puis aujourd’hui étendu à la Chine et au Japon". Mais toujours pas en Europe.
Selon lui, "les européens ne peuvent pas en rester là. Il faut mobiliser les industriels, promouvoir le dialogue et éviter le refus", commente-t-il en s’étonnant de voir la très "insuffisante représentation d’entreprises européennes, lors de conférences internationales" autour de la thématique de l’Internet des objets.
50 experts peaufinent la réponse européenne
Justement. Ce groupe de travail de 50 experts, qui fédère notamment des philosophes, des académiciens, des techniciens, des industriels et également un représentant américain et un autre japonais, doit poser les règles afin de donner au Vieux continent une puissance dans cet Internet du futur. Parmi les priorités du groupe, le respect de la vie privée et la sécurité bien sûr, deux briques indéboulonnables lorsqu’on évoque la RFID ou le partage de données, mais également la gouvernance de l’Internet des objets. "Quel cadre législatif adopter, qui pour contrôler, qui va nommer les objets, comment les rechercher….? Pas simple", souligne-t-il.
Et cette question centrale a déjà un passif : la gestion de l’ONS (object naming service), le serveur racine en charge du nommage des objets ainsi que des requêtes - le DNS appliqué aux objets - qui, sur le modèle de l’Internet, est placé entre les seules mains américaines (celles de la société Verisign). Si Orange Business Services s’était vu confier la création d’une racine européenne en décembre 2007, le projet semble aujourd’hui ne pas aboutir, nous rappelle en substance Gérald Santucci, qui considère cela comme une priorité pour le groupe de travail de Bruxelles. Interrogé sur le sujet par la rédaction, Geoffrey Zbinden, directeur de la division M2M d’Orange, parle d’un processus long et jamais très simple à mettre en place.
Restera enfin à trancher sur l’épineuse question des standards. Si les normes sont en effet clé dans l’Internet des objets - et constituent un bras de fer politique, comme nous l’indiquait Walter Weigel, directeur de l’Etsi, il convient de savoir s’il faut, oui ou non, en développer de nouveaux, indique Gérald Santucci. Et de délimiter le rôle que devra y jouer la Commission. Si Bruxelles parle d’établir des standards côté sécurité et adressage, Geoffrey Zbinden voit plutôt Bruxelles comme un chef d’orchestre. "La commission doit jouer un rôle de coordinateur. L’idée n’est pas de développer des standards qui existent déjà, mais de les coordonner avec l’ensemble des acteurs, en donnant des priorités par métier". Là, en gros, où devraient accoucher les modèles économiques. Et faire éclore les usages.
Ce projet d’experts, que Gérald Santucci qualifie "d’une chance unique pour reprendre l’avantage", a une durée de vie de 2 ans. Des bilans seront publiés tous les 6 mois.
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