Japon : le séisme fait craindre des pénuries de composants clefs dans les semi-conducteurs
Dix jours après le dramatique séisme japonais, les informations sur le rôle des industriels japonais dans l'industrie électronique se précisent. Et celui-ci est majeur sur une poignée de composants clefs. Reste à évaluer l'impact qu'auront les fermetures d'usine sur la chaîne logistique globale. Donc sur les prix.
Un choc inconnu jusqu'alors. Dix jours après le tremblement de terre au Japon, la solidité de la chaîne logistique globale dans les semis-conducteurs reste sujette à interrogations. Comme le souligne le cabinet IHS Supply, "les usines de semi-conducteurs au Japon qui ont stoppé leur production après le tremblement de terre ne pourront redémarrer pleinement leurs activités que quand les répliques du séisme auront cessé". Or, ces dernières ont été nombreuses la semaine dernière. "A chaque fois qu'un seisme dépasse 5 (sur l'échelle de Richter, NDLR), les équipements s'arrêtent automatiquement", relève IHS Supply. Et encore ne s'agit-il là que d'un bilan ne tenant pas compte des coupures d'électricité (du fait des rationnements) et des dommages subies par certaines installations.
Heureusement, selon IHS Supply, l'industrie électronique est aujourd'hui aidée par le niveau de ses stocks : ceux-ci étaient, à la fin de 2010, à leur plus haut niveau depuis deux ans et demi. Le président d'Acer, Scott Lin, a ainsi indiqué que l'industrie du PC disposait de 2,5 à 3 mois de stocks, en cumulant les machines déjà livrées au réseau de distribution et les stocks chez les fabricants. Le cabinet IHS Supply n'en redoute pas moins des achats de composants en mode panique de la part des intégrateurs (OEM), ce qui désorganiserait un peu plus la chaîne logistique globale et ferait bondir les prix.
Un rôle clef dans la fabrication du silicium
Concrètement, les inquiétudes se concentrent sur quelques sujets où les industriels japonais dominent le marché mondial. Avant tout, l'archipel occupe une place centrale dans l'industrie du silicium. Selon le cabinet d'études Gartner, environ 50 % de la production mondiale de galettes en silicium de 300 mm (wafer), à partir desquelles sont produites les puces électroniques, proviennent du pays. Et les deux industriels clefs du secteur, Shin-Etsu et Sumco, ont tous deux annoncé avoir stoppé certaines lignes de production en raison des dommages subis ou des coupures d'électricité décidées par le gouvernement japonais. Shin-Etsu possède ainsi deux usines à l'arrêt et n'a pas donné d'indication quant à leur date de redémarrage.
Même inquiétude concernant un composant chimique, le bismaleimide triazine, indispensable à la fabrication de puces électroniques. Selon un analyste du cabinet Gartner, ce produit utilisé en photolithographie (transformation du silicium en puces électroniques) est fabriqué à 90 % au Japon. Le leader mondial du secteur, Mitsubishi Chemicals, a annoncé la fermeture de deux usines. En aval dans la chaîne, le fabricant de puces Texas Instruments est lui touché directement : son usine de Miho, au nord de Tokyo et comptant pour 10 % de la production globale du groupe, est aujourd'hui fermée. Elle ne retrouvera sa pleine capacité de production qu'en septembre. Une seconde usine de la société américaine a également été touchée, mais moins sévèrement.
Solutions alternatives : la recherche dans l'urgence
La dépendance du marché mondial à la production japonaise est également extrêmement importante dans d'autres segments de marché où l'Archipel occupe un rôle clef dans la fabrication de matériaux très spécialisés : batteries lithium-ion (78 % de la production mondiale d'électrodes), écrans LCD (films polarisants, films uniformisant la lumière, etc.), disques durs (têtes de lecture, substrats). Là aussi, même si un panorama global n'est pas encore dressé, plusieurs fermetures d'usines sont signalées. Un des spécialistes mondiaux des films polarisants pour écrans LCD compte ainsi quatre usines à l'arrêt. Showa Denko, un des deux acteurs majeurs sur le marché des composants pour disques durs, avait deux implantations au point mort la semaine dernière. Comme les deux fournisseurs majeurs de substrats pour disques durs, Kobe Steel et Furukawa Denko, voient eux aussi leurs implantations spécialisées - toutes situées dans la zone - affectées par le séisme, la production de ces composants devrait s'en ressentir.
Notons que si fabricants et intégrateurs, à l'image d'un Foxconn qui a tenu à rassurer sur sa capacité à fournir des iPad 2, activent tous des mesures destinées à palier les difficultés actuelles des fournisseurs japonais, ces tensions pourraient rapidement se répercuter sur les prix. Après une remontée brutale à l'annonce du séisme et de ses impacts, les prix de la mémoire évoluaient toutefois plutôt à la baisse ce lundi (hormis la mémoire Flash Nand) : signe que les acteurs du marché s'interrogent encore sur les réels impacts de la catastrophe japonaise pour l'industrie IT dans son ensemble.
En complément :
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