WiMax pour désenclaver les zones blanches ? Encore raté
Le déploiement de la technologie WiMax est aujourd'hui au point mort en France. Tous les opérateurs sont bien en deçà des niveaux de déploiement promis. Certains commencent même à se retirer du marché. WiMax connaîtra-t-il le sort de la défunte boucle locale radio ?
Après le fiasco de l'attribution des licences de boucle locale radio (BLR), l'Arcep pourrait bientôt avoir à répondre de celui de l'attribution des licences WiMax. Et ce alors que l'Autorité fait officiellement du désenclavement numérique des régions une de ses priorités affichées (ne le fait-elle pas depuis plus de 10 ans, avec l'efficacité que l'on sait…). Les déploiements avancent en effet à un rythme d'escargot, quand ils ne sont tout simplement pas stoppés du fait du retrait des opérateurs sélectionnés.
L'Arcep mise sur le mauvais cheval
Il y a deux ans pourtant, le WiMax semblait promis à un bel avenir (comme la BLR il y a 8 ans), tant comme technologie de désenclavement des zones blanches que comme alternative à l'ADSL et à la 3G dans les zones urbaines. C'était sans compter sur la montée en puissance du DSL et de la fibre dans les agglomérations et sur les progrès de la 3G, qui plombent l'économie des acteurs commerciaux du WiMax.
Alors lorsque l'Assemblée nationale cherche à comprendre pourquoi 750 000 foyers français ne disposent toujours pas d'accès au haut débit ou d'un accès minimaliste (512 Kbit/s), l'Arcep ressort la langue de bois, au risque d'apparaître bien hypocrite. Lors de son audition par la Délégation à l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, le 16 avril 2008 à Paris, Paul Champsaur, le patron de l'Arcep, a ainsi expliqué que "l’Autorité apprécie par exemple l’intervention des collectivités territoriales dans le secteur des communications électroniques. Cette intervention peut être jugée bénéfique à un double titre, dans la mesure où elle permet non seulement de favoriser la couverture des zones blanches, mais également d’apporter une offre concurrentielle là où celle-ci ne se serait pas déployée spontanément".
Le problème est que dans le cas de l'attribution des licences WiMax, l'Autorité a tout fait sauf appuyer les tentatives des régions, préférant attribuer ses licences à des opérateurs privés, plutôt qu'aux régions soucieuses de désenclaver leurs territoires en investissant, si nécessaire, à perte.
Un déploiement à vitesse d'escargot
Ce "pari" s'avère pour l'instant aussi perdant que celui de celui de 2000 pour la BLR. Ainsi, le consortium Maxtel (formé par autoroutes Paris-Rhin-Rhône et Altitude Télécom) a explosé en vol et 11 de ses 13 licences ont été récupérées par Altitude dans le cadre de son entité AltiStream. Bolloré Télécom qui a obtenu des licences dans la plupart des grandes régions françaises ne propose toujours aucune offre commerciale près de deux ans après l'attribution des licences (des licences pour lesquelles il doit débourser 78,34 M€).
Pourtant Bolloré s'était engagé à ouvrir ses services commerciaux en 2007 et à déployer près de 1 000 sites radio d'ici la mi-2008 et près de 4 900 d'ici 2013. Autant dire que c'est mal parti… La situation n'est guère plus réjouissante chez SHD, la filiale de SFR, qui pour l'instant ne dispose que d'un réseau pilote en Ile-de-France et ne doit officiellement déployer son réseau sur la région parisienne et en PACA que d'ici la mi-2009.
Quant à HDRR, filiale de TDF, de la Caisse des dépôts et de LD Collectivités, il a déployé quelques sites dans certaines régions, mais ne semble guère motivé par le désenclavement. Il vient ainsi d'abandonner sa délégation de service public dans le Gard, pour cause de trop faible rentabilité. En revanche, ses services sont opérationnels dans le Loiret sur le réseau Medialys, avec toutefois une portée géographique plus que limitée (10 stations de base).
Inclure le haut débit dans le service universel ?
Sauf miracle, on voit mal comment la situation pourrait évoluer favorablement. L'ADSL dessert désormais 98,5 % des foyers français et la couverture 3G s'étend. Dès que les opérateurs commenceront à déployer la 3G sur les fréquences historiques du GSM (bande des 900 MHz), cette technologie pourrait devenir une redoutable alternative (tant sur le plan des débits que sur le plan économique) au WiMax.
Rappelons que la couverture des zones blanches en téléphonie mobile et en haut débit est une lubie gouvernementale depuis près de 10 ans, avec le succès que l'on sait. Il serait peut-être temps de modifier les règles du service universel pour enfin y intégrer la notion de haut débit (avec un minimum de 2 à 5 Mbit/s) et de faire en sorte que tous les opérateurs et FAI contribuent au financement de la couverture des campagnes.
Ce ne serait que justice. Tous ont en effet concentré leurs investissements dans les grandes agglomérations. Une saine régulation voudrait qu'un pourcentage de taxe soit appliqué à leurs investissements en ville, pour aider au financement des opérateurs menant le désenclavement des campagnes.