La Cour des comptes certifie la comptabilité de l'Etat... mais ce n'est pas grâce à l'informatique
La haute juridiction, chargée comme l'année dernière de certifier les comptes 2007 de l'Etat, pointe le manque d'intégration des applications comptables. Et les lacunes des outils de contrôle mis à sa disposition.
Comme l'année dernière, la Cour des comptes s'est penchée sur les comptes de l'Etat pour 2007. Et a pris la décision de les certifier. Mais ce n'est pas grâce aux applications informatiques comptables de l'Etat, déjà dans le collimateur de la haute juridiction l'année dernière. Malgré les efforts de l'Etat en 2007, la Cour déplore toujours la faiblesse des interfaces entre l'application coeur de la comptabilité publique et certaines applications ministérielles notamment. « Les systèmes d’information financière et comptable de l’Etat se caractérisent par une architecture très morcelée : 317 applications référencées par l’agence pour l’informatique financière de l’Etat (AIFE), souvent inadaptées aux exigences de la comptabilité générale », note la Cour.
Même si cette dernière relève les progrès effectués en la matière en 2007, dans le cadre du plan d’action comptable de l’Etat mis en œuvre par la Direction générale de la comptabilité publique (DGCP), l'insuffisante intégration des systèmes d’information actuels engendre « une incertitude », en raison des « risques issus du traitement des données ». Ce qui « limite la capacité du certificateur à apprécier l’intégrité des données, l'exhaustivité et l’exactitude des écritures comptables. » Bref, les systèmes d'information de l'Etat, en l'état actuel, sont un obstacle à la certification de ses comptes par la Cour. Pas étonnant donc de voir la juridiction émettre la première de ses neuf réserves substantielles émises cette année sur ce sujet.
Des outils de contrôle insuffisants
Ainsi, la Cour pointe du doigt les insuffisances de l'application de gestion logistique du ministère de la Défense, qui nécessite un retraitement des données qui en sont issues, de l'outil de recensement des charges et produits rattachés à l'exercice (Orchidée) ou encore des applications de recensement et valorisation du parc immobilier.
Au-delà de ce manque d'intégration des outils comptables, la haute juridiction regrette les déficiences des outils de contrôle qu'elle pourrait exploiter pour ses certifications. « L’infocentre India LOLF devrait en théorie constituer le principal outil. La disponibilité et la qualité des données de l’infocentre ont été sensiblement améliorées en 2007. Toutefois, cet outil présente encore d’importantes limites. Le périmètre de l’infocentre est insuffisamment étendu. Ses caractéristiques ne permettent pas d’effectuer
au niveau national l’ensemble des requêtes utiles au certificateur », note la Cour des comptes. S'y ajoute l'insuffisance des contrôles automatiques des données dans les applications, qui empêche leur auditabilité et limite « l'étendue des vérifications » des magistrats de la haute juridiction.
Ne pas attendre Chorus
Certes, la situation devrait s'améliorer avec la mise en oeuvre de Chorus, le PGI de l'Etat (basé sur SAP) censé rassembler les fonctions des applications interministérielles de gestion de la dépense, des recettes non fiscales et de comptabilité, d’inventaire du parc immobilier ainsi que des applications ministérielles de gestion financière. Mais « les avancées essentielles liées à cette intégration ne seront toutefois effectives qu’au terme de la mise en production du système cible Chorus, soit 2011 au mieux », note la Cour, qui ajoute que deux autres projets clefs (la refonte du système de paiement de Copernic pour la gestion du recouvrement de l'impôt et la mise en place de l'ONP pour la paye) ne seront opérationnels que respectivement en 2012 et 2014.
« Les caractéristiques des systèmes d’information ne seront donc pas profondément modifiées au cours des prochains exercices comptables. La fiabilisation des systèmes existants initiée par l’administration sera attentivement suivie par la Cour », écrivent des magistrats qui ne veulent pas voir l'Etat attendre Chorus pour produire des états comptables enfin pleinement auditables.