Informatique de santé : investissements, retards et incertitudes

Le marché de l’informatique de santé progresse plutôt rapidement. Une croissance néanmoins en trompe l’œil au regard des montants investis, du retard des projets et de l’évolution pathétique du DMP national. Bref état des lieux à la veille d’Hôpital Expo et de H-IT 2008.

A la veille de la 22ème édition d’Hôpital Expo (du 27 au 30 mai 2008) qui accueille également cette année la réunion européenne Health IT 2008, l’informatique hospitalière se trouve à la croisée des chemins. En 2007, la santé est le secteur qui a connu la plus grosse croissance en investissement informatique selon IDC avec une progression de 8,9%. Un rattrapage plutôt qu’une position avancée dans la mesure où l’ensemble de ses dépenses ne représentent que 1,4 milliards d’euros. Très loin de l’industrie ou encore de la banque voire des collectivités territoriales ou des services aux entreprises. Pour 2008, la croissance devrait cependant se maintenir et les dépenses dépasser le milliard et demi d’euros selon IDC. Sur ce total, plus des deux tiers seront consacrés à l’exploitation et au renouvellement de parc et 400 millions d’euros aux investissements. Sur le segment logiciels et services IT, le cabinet Markess International estime qu’en 2007 620 millions d’euros ont été investis par le secteur de la santé publique (hors privé et assurance sociale). Un montant qui devrait approcher les 800 millions en 2009.
Parmi les grands chantiers en cours, IDC recense l’informatisation du circuit du médicament, le pilotage décisionnel et la tarification à l’activité (T2A), le stockage des données numériques, le PGI, la mobilité des soins mais surtout le dossier patient partagé et son corollaire, le dossier médical patient (ou personnalisé dit DPM).

Le DPM dans les choux

Et c’est sûrement ce dernier point qui stigmatise à la fois le plus d’attente et de problèmes. Ainsi, dans une étude récente sur la base d’entretiens avec des responsables informatique d’établissements publics, Markess notait que « le dossier médical patient (DMP) figure parmi les préoccupations majeures des établissements hospitaliers ». Reste que ce n’est certainement pas de l’échelon national que viendra la résolution immédiate de leur problème.
Alors que le projet est sur la table depuis quatre ans, un énième rapport vient tout juste de tomber sur le bureau de la ministre en charge du dossier, Roselyne Bachelot. Conclusion : rien ne bouge depuis un an et il faudrait relancer le projet en commençant par arbitrer qui aura la gestion du DPM : patient ou corps médical. Autant dire que le bout du tunnel est très loin.

Local contre global

D’autant qu’au niveau hospitalier les choses s’organisent. Dans son rapport 2007, le groupement pour la modernisation du système d’information hospitalier estimait que le dossier du patient (données médicales, données de soins et données d’identification) était « encore en cours d’automatisation puisque seulement 35,8% des établissements déclarent l’avoir réalisée de manière complète pour le dossier médical et 17,3% pour le dossier de soins. » Hors, la mise en place de ce dossier en milieu hospitalier est indispensable au DMP.
Markess confirme cette tendance affirmant que « des initiatives ont pris forme au sein des établissements interrogés et signent ainsi le dynamisme de ces structures, au détriment du DMP national dont la mise en œuvre est actuellement en cours de redéfinition. »
En clair le DPM national semble dépassé et devrait être remplacé par un référentiel général susceptible d’harmoniser des pratiques qui seront donc déjà en place.

Des doutes sur le financement

Reste cependant l’incertitude pécuniaire dans un secteur où l’Etat prend largement sa part du financement. Markess note ainsi qu’il « faut que les engagements financiers dans le DMP se concrétisent, que les incertitudes récemment relevées au sujet du plan « Hôpital 2012 » soient levées ». Faute de quoi les projets informatiques pourraient encore prendre du retard.

Ce qui n’a pas l’air d’émouvoir les patients ou tout du moins les sondeurs. Dans une étude publiée ce jour par la fédération hospitalière de France et conduite par TNS Sofres, 81% des français se disent satisfaits de l’hôpital public sans que la question du contrôle du contenu ou de l’importance d’un dossier médical personnalisé ne soit posée. Côté équipement, 77% des personnes interrogées se disent satisfaites du niveau.

En savoir plus :
http://www.hopitalexpo.com/
http://www.health-it.fr/
http://www.gmsih.fr/

Pour approfondir sur Réglementations et Souveraineté