France Télécom retrouve l'élan des années Michel Bon
Comme lors des folles années de la bulle, l'opérateur historique français repart à la conquête des marchés internationaux. La société propose d'acquérir son homologue scandinave pour 32 à 34 Md€. Une fusion entre les deux opérateurs permettrait de créer un géant des télécoms fixes et mobiles présent dans la plupart des pays du continent européen ainsi qu'en Russie, au Moyen-Orient et en Asie centrale.
France Télécom refait une crise de boulimie. Comme au tournant des années 2000 sous la direction de son patron d'alors, Michel Bon. A l'occasion d'une conférence avec la presse et les analystes organisée ce matin, l'opérateur historique a annoncé avoir fait une proposition amicale de rachat de l'opérateur nordique TeliaSonera, issu de la fusion entre les opérateurs historiques suédois et finlandais. Des rumeurs sur le sujet étaient apparues à la mi-avril et l'opérateur français avait, dans un bref communiqué, confirmé son intérêt pour l'opérateur scandinave. Il vient de franchir un palier supplémentaire en proposant de racheter son homologue pour 32 à 34 milliards d'euros, pour partie par échange d'actions et pour partie en numéraire.
Quinze jours pour négocier
Cette offre informelle a été prestement jugée insuffisante par le patron de l'opérateur nordique, Tom von Weymarn, qui estime qu'elle sous-évalue le potentiel de TeliaSonera. Mais elle n'a pas été rejetée en bloc, TeliaSonera indiquant au passage s'être entouré de conseils financiers pour l'assister dans le processus de discussion entre les deux opérateurs.
Côté France Télécom, Didier Lombard se donne une quinzaine de jours pour discuter de sa proposition initiale avec TeliaSonera. Le patron de l'opérateur hexagonal indique ne pas être surpris par la réponse de von Weymarn, qu'il connaissait par avance pour en avoir discuté avec lui la veille. Il estime que la réponse de TeliaSonera est logique et qu'il aurait sans doute fait une réponse similaire, afin d'assurer une valorisation maximale pour ses actionnaires. Mais il précise aussi que si France Télécom est prêt à amender son offre à la marge, il ne souhaite pas se lancer dans une course aux enchères. Il faut dire que France Télécom paye encore la facture des années Bon (A sa décharge le refus de l'Etat actionnaire de se laisser diluer lors du rachat d'Orange avait contraint le patron de l'époque à une acquisition en cash) et ne souhaite pas renouer avec des taux d'endettements massifs. Selon Gervais Pélissier, le directeur financier, la marge de manoeuvre en termes d'endettement serait de l'ordre de 17 à 18 Md€ une façon de laisser entendre que sa proposition peut peut-être encore progresser de 2 ou 3 milliards supplémentaires mais guère plus...
D'ailleurs, Lombard a exclu toute idée d'un mariage entre égaux entre les deux opérateurs, un concept évoqué par le patron de TeliaSonera. Il estime qu'en l'état, sa proposition « crée de la valeur » pour les actionnaires des deux groupes et qu'elle pourrait se transformer rapidement en offre formelle si le conseil d'administration de TeliaSonera et ses deux principaux actionnaires les Etats suédois et finlandais en acceptent les modalités générales. Il faut dire que les deux Etats ne font pas mystère de leur intention de céder leur participations dans l'opérateur Nordique.
Croître dans les marchés émergents
Telia Sonera intéresse France Télécom pour ses bons résultats dans les marchés nordiques, mais surtout pour sa présence dans des marchés en plein développement. TeliaSonera contrôle ainsi 43,8% du capital de l'opérateur Russe Megafon et ses 35 millions d'abonnés et est présent dans tous les pays baltes. Il dispose aussi de filiales mobiles dans un grand nombre de pays d'Asie centrale (Kazakhstan, Azerbaïdjan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Géorgie, Moldavie...) et détient aussi des participations importantes dans l'opérateur turc TurkCell (37,3%) et dans l'opérateur ukrainien Life. Au total TeliaSonera revendique 36 millions d'abonnés en Scandinavie, et près de 80 millions dans les pays à forte croissance. Un ensemble formé par France Télécom et Telia Sonera péserait environ 63,2 Mds € (CA 2007) contre 89,3 Md$ pour Telefonica (chiffres 2007) et 62,5 Md$ pour Deutsche Telecom (chiffres 2007).