Réforme du CNRS : rejet du copilotage de l’Inria sur la recherche en IT
Une direction renforcée, des syndicats rassurés, une ministre officiellement satisfaite : la réforme du CNRS semble le fruit d’une logique de compromis. Côté sciences de l’information l’Inria est finalement exclu du jeu, contrairement à ce qui avait été imaginé à l'origine. Le « socle » est posé, reste à définir les piliers autour d’Instituts aux contours toujours flous.
L’Inria (Institut national de recherche en informatique et automatique) ne co-pilotera pas la recherche informatique française qui restera donc scindée en deux : un bloc autour de l’Institut et un autre au sein du CNRS. Très méfiant à l'égard le projet initial de Valérie Pécresse - ministre de la Recherche -, qui prévoyait un statut particulier pour les recherches sur le vivant et sur les sciences de l’information, les syndicats du CNRS ont, semble-t-il, été entendus. Exit donc le risque de mainmise de l’Inria que certains craignaient, mais un renforcement des sciences de l’information au sein du nouveau plan stratégique du CNRS, validé ce 1er juillet, est à prévoir. Tout n’est toujours pas bouclé, mais le CNRS demeurera central dans toutes les décisions.
Le CNRS conserve "ses" sciences de l’information
Le plan stipule que « toutes les disciplines actuellement représentées au CNRS ont vocation à y rester et à se structurer en instituts. ». Reste à définir les contours et de l'organisation de chaque institut. Ces derniers seront créés par le CNRS « après avis de ses instances consultatives et délibératoires ». Initialement, Valérie Pécresse prévoyait huit blocs scientifiques (sciences du vivant et de l’information inclus donc, bien que devant être copilotés). Désormais plus aucun chiffre ni intitulé n’est avancé. Mais l’organisation de la direction générale du CNRS – qui voit donc ses pouvoirs renforcés avec la coordination et la tutelle des futurs instituts – donne quelques indications.
La clé de voûte de la réorganisation semble être l’interdisciplinarité. Trois pôles d’intégration interdisciplinaires seront créés. Ils généreront et superviseront les champs de la recherche transverses aux instituts. Les Hommes dans le système Terre (environnement, sciences du vivant, développement durable, crises et sociétés) ; Origine et maîtrise de la matière (matériaux, nanosciences, convergence nano / bio / STIC, énergie) ; et La société en réseau (cognition et cerveau, communication, STIC, calcul de haute performance, très grandes bases de données).
Inria / CNRS : des frictions à prévoir ?
Avec un pôle – celui de la société en réseau - qui lui est largement consacrée, l’informatique s’en sort donc par le haut. Restera à voir comment la recherche s’organisera au niveau opérationnel. Car, au final, on sait juste que la définition du périmètre des instituts est remise à plus tard. Si l’un d’entre eux devait être consacré aux systèmes d’information, sa structuration ressemblerait fort à celle de l’Inria. Le modèle de ce dernier est spécifique dans la mesure où il favorise les partenariats forts avec de grands industriels du secteur – le plus emblématique étant celui signé avec Microsoft – et où l’institut n’hésite pas non plus, via Inria Transferts, à jouer les incubateurs de jeunes pousses.
Une spécificité que le CNRS pourrait bien vouloir diluer. Poussé par Valérie Pécresse qui souhaitait une organisation plus claire, mais également plus en phase avec le monde économique, le CNRS prévoit en effet de renforcer ses relations avec le monde industriel. Le centre de recherche estimant que « confrontées à des questions précises, les entreprises ont plutôt tendance à se tourner vers des organismes spécialisés par domaines d’applications (ONERA, INRIA, CEA, …) plutôt que vers le CNRS, qui n’a pas de visibilité pour des applications particulières ». Ce qui pourrait changer donc, entraînant CNRS et Inria dans une concurrence qui ne dit pas son nom, même si les deux organismes sont aujourd'hui partenaires sur certains projets, sans véritable cadre général.
Le plan prévoit que « dans certains champs disciplinaires pour lesquels il existe d'autres organismes nationaux, il importe que le CNRS et les organismes concernés construisent, ensemble, le meilleur dispositif de coordination ». Une coordination semble en effet indispensable en matière de sciences de l’information.