Steria peine à se sortir de ses difficultés en France
Steria a émis ce matin un avertissement sur résultats. Le signe avant-coureur d'un ralentissement de l'activité dans les services ? Plutôt la confirmation des difficultés que traverse la SSII dans l'Hexagone. Le directeur de l'activité en France en fait les frais.
Emoi sur les marchés. En émettant ce matin un avertissement sur résultat, Steria, déjà lourdement santionné ces dernières semaines, a de nouveau encaissé une chute sévère de son cours. Le titre abandonnait plus de 15 % à 13h30, dans un marché il est vrai fortement déprimé. Dans un communiqué, la SSII a expliqué ce matin revoir à la baisse son objectif de marge opérationnelle. "Le groupe anticipe, sur l'ensemble de l'exercice 2008, une marge opérationnelle consolidée de 7,5 %, à comparer au consensus de prévisions actuel d'environ 7,8 %". La SSII avait promis, notamment lors de l'annonce de ses résultats au premier semestre, une marge opérationnelle "proche de 8 %" sur l'année. Objectif qu'avait confirmé François Enaud, le gérant de Steria, dans nos colonnes le 3 octobre dernier.
Cette anticipation constituait déjà un glissement sémantique par rapport aux objectifs que se fixait la société en mars dernier, lors de l'annonce de ses résultats annuels 2007 : "au moins 8 % de marge opérationnelle sur 2008".
Paradoxe : la croissance repart
Cet effritement n'est pourtant pas la conséquence d'une activité déclinante. Après avoir enregistré des décroissances de son activité au premier (-3,8 %) et au second (-0,5 %) trimestres, la SSII prévoit une croissance de 3,5 % au troisième trimestre. Et même de 5 % en France. "On est dans les objectifs annoncés", estime Dominique Raviart, analyste senior au sein du cabinet NelsonHall. En août, Steria avait en effet promis, pour le second semestre, une croissance d'au moins 5 % en France, avec une accélération au quatrième trimestre. Paradoxalement, sur ce plan, la SSII paraît donc même un peu en avance sur ses plans.
Les difficultés de la société, qui se traduisent par le limogeage de François Mazon, le dirigeant des activités en France, temporairement remplacé par François Enaud, le gérant du groupe, se concentrent donc sur la rentabilité de ses opérations hexagonales. Un pays où Steria est engagé dans un plan de transformation, visant à arrêter des activités jugées non stratégiques (notamment des régies), à diminuer la sous-traitance (ramenée à 5 ou 6 %) et à déployer les offres d'offshore ou de BPO devenues centrales dans l'offre du groupe depuis le rachat de Xansa. Un programme que François Enaud jugeait "terminé" en août dernier. Un peu hâtivement ?
Un problème opérationnel
"Est-ce que l'annonce du jour signifie que le déploiement en France des offres de BPO ou de réalisation offshore tarde à donner ses fruits ? Je note que le groupe n'a encore annoncé aucun contrat de BPO avec un compte de l'Hexagone", avance Dominique Raviart. De son côté, Brice Thebaud note qu'il s'agit d'une problématique concernant purement Steria France, non d'un ralentissement global de la demande. Et ajoute : "On ne peut pas en conclure pour autant que le recours à l'offshore ne prend pas en France. Mais la gestion opérationnelle de ces contrats ne se passe pas aussi bien que prévu". En août, Steria annonçait avoir signé 50 000 jours homme de prestations en Inde, à 70 % pour des contrats français.
In fine, pour Dominique Raviart, "ces difficultés en France restent un épiphénomène. Si elles affectaient la Grande-Bretagne (le pays d'origine de Xansa, ndlr), ce serait plus problématique. Mais les perspectives de croissance données par le groupe laissent penser que les activités dans ce pays connaissent déjà un rebond. Ce qui n'est pas un mauvais résultat après une fusion. Au final, Steria fait plutôt une bonne performance dans un contexte de rachat, d'autant que, avant son acquisition, Xansa était plutôt en perte de vitesse".
Steria, cible de choix ?
Reste que la dégradation du cours de l'action Steria met le groupe, faiblement valorisé, à la portée d'un rachat. "Bien sûr, c'est envisageable, commente Brice Thebaud. Je ne pense pas que ce soit le type de cible susceptible d'attirer un prestataire indien, car Steria possède des effectifs trop importants en France et en Grande-Bretagne. Ce qui déstabiliserait le modèle économique d'une SSII du sous-continent. Mais Steria pourrait être une cible pour un acteur en retard en terme d'implantation en Inde". Ce dernier profitant alors de la forte base arrière dont dispose sur place la SSII de François Enaud depuis le rachat de Xansa. Un profil d'acquéreur type qui ressemble trait pour trait à Atos-Origin.