DigiWorld Summit : la fibre compte sur l'argent public pour décoller
La question du financement des réseaux revient comme un leitmotiv lors de la conférence organisée par l'Idate. Notamment et tout particulièrement pour le développement de la fibre optique en France. Dans le contexte actuel de crise financière, la mise à contribution des collectivités territoriales apparaît comme un fait acquis par la plupart des acteurs présents, régulateur en tête. Mais d’autres difficultés freinent un déploiement qui semble clairement patiner.
Qui dit futur de l'Internet - la question au centre du sommet DigiWorld - pense à la fibre optique. Sans surprise, la question était donc au centre de bien des interventions lors des journées de conférence organisées par l'Idate, à Montpellier.
Pierre-Eric Saint-André, directeur général d’Axione, rappelle l’enjeu : « permettre à la France de passer d’environ 150 000 abonnés [au très haut débit par la fibre optique, NDLR] aujourd’hui, à 4 millions en 2012. » Pour lui, fort de l’expérience des quelques utilisateurs déjà équipés, la demande est là : le problème vient de l’offre. Et d’en appeler, pour le développement, aux opérateurs, certes, mais surtout aux pouvoirs publics, à commencer par les collectivités locales. Mais si la loi de Modernisation de l’Economie et l’Arcep (le régulateur des télécoms) ont récemment apporté des éléments de clarification sur l’environnement réglementaire du déploiement de la fibre optique (FTTH), la situation n’en reste pas moins confuse, porteuse de fortes inégalités entre opérateurs.
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Des opérateurs inégaux
Car si la demande est là, comme le souligne Pierre-Eric Saint-André - en accord avec Yves Parfait, chargé du projet FTTH – Fiber-to-the-home – d’Orange -, les opérateurs ne manquent pas de faire preuve d’une certaine réserve. Yves Parfait le reconnaît volontiers : « depuis 2007, nous sommes dans une phase de pré-déploiement. On avait dimensionné cette phase pour à peu près un million de raccordables et 150 000 clients, et fin septembre, on a 17 000 clients et 500 000 connectables. » Et de faire une croix sur ses objectifs initiaux, à fin 2008. Mais pour Yves Parfait, la faute en revient surtout à des conditions réglementaires dont il attend « la clarification. »
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Chez Free, Maxime Lombardini ne cache pas les difficultés à déployer hors de Paris intra-muros, faute d’une offre de mise à disposition des fourreaux d’Orange, arrivée seulement mi-septembre. Et de s’inquiéter : « comment rattraper le retard sur l’opérateur historique ? » Pour le directeur général d’Iliad, les fourreaux de France Télécom sont en mesure d’assurer la desserte de quelque deux millions de foyers.
Maxime Lombardini fait de cet accès aux fourreaux une question centrale du déploiement de la fibre optique dans les zones denses, une arme dans la négociation avec les syndics. Un point sur lequel Yves Parfait aura probablement peine à le contredire : l’accès aux immeubles fait partie des principales difficultés identifiées par l’opérateur historique, avec l’installation dans les logements.
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Déjà bien implanté dans les immeubles, Numéricable apparaît ici en position de force. Arnaud Polaillon, secrétaire général du câblo-opérateur, le reconnaît bien volontiers, estimant avoir remporté le « prologue » du déploiement de la fibre optique. Et de faire aujourd’hui une « pause » dans son effort de modernisation du réseau pour commencer à en retirer les premiers bénéfices commerciaux.
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Fibre des villes et fibre des champs
En dehors des principales zones urbanisées, le déploiement de FTTH se heurte à d’autres obstacles, à commencer les coûts de génie civil et la dispersion de l’habitat, deux freins à la rentabilisation. C’est principalement dans ces zones que les opérateurs souhaitent voir les collectivités territoriales mettre la main à la poche. La Caisse des dépôts et consignations acquiesce : après « avoir accompagné le dégroupage, nous sommes prêts à accompagner le déploiement du très haut débit », martèle son représentant Olivier Duroyon.
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La question semble très largement tout aussi entendue à l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes (Arcep). Gabrielle Gauthey, membre du collège de l’Arcep, fait ainsi référence aux collectivités territoriales comme à des « acteurs incontournables de l’aménagement du territoire. »
Les collectivités, acteurs consentants ?
Le contexte économique global joue en faveur des vues des opérateurs, qui bien sûr espèrent pouvoir partager les investissements avec ces acteurs. Comme le souligne Pierre-Eric Saint-André, la crise financière « pourrait freiner la mise à disposition des financements nécessaires à ces investissements privés [pour le déploiement des réseaux fibrés, NDLR]. » Un argument massue pour aller plaider devant les commissions économiques des collectivités locales.
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Mais celles-ci ne s’en plaignent pas forcément. A Montpellier, la municipalité a ainsi proposé son réseau de fibre optique – en fibre noire – à Free, afin de fournir du très haut débit à ses habitants – avant les PME et TPE. Un choix dont elle se félicite, notamment par la garantie de neutralité concurrentielle qu’offre cette infrastructure.