Paris dématérialise ses factures pour aller au bout de son projet SAP
En prolongation de son projet Alizé autour de SAP, la Mairie de Paris se lance dans la dématérialisation de ses quelque 600 000 factures annuelles. Un chantier colossal où s'affrontent quatre prestataires ou consortiums, engagés dans une phase de dialogue compétitif.
"Notre projet SAP nous a amené à nous poser la question de l'organisation de la fonction comptable". S'exprimant hier, lors d'une conférence organisée par le cabinet de conseil Ineum, Alain Bayet, directeur des finances de la Mairie de Paris, a levé le voile sur la future organisation comptable de l'organisation, qui passera par la constitution de quatre centres de services. Ce projet, inspiré notamment de l'expérience de la SNCF, vise à dématérialiser toute la chaîne de traitement des factures reçues par la collectivité, soit 600 000 documents par an environ.
Chantier au long cours - puisque la Maire prévoit la mise en place de son organisation cible en 2011 -, la dématérialisation des factures de la ville et du département (une particularité de la collectivité qui cumule les deux rôles) se traduira par une mutualisation des fonctions de liquidation des factures et par le traitement automatique de la plupart d'entre elles. "Seules celles présentant des erreurs seront traitées manuellement par nos services partagés", a expliqué Alain Bayet. En amont, la numérisation et le vidéocodage des factures seront pris en charge par un centre géré en interne par l'organisation.
Auditions des quatre prestataires
Pour mettre en place sa solution de traitement, la Mairie a choisi la voie du dialogue compétitif. "Nous voulions expérimenter la solution avant sa généralisation", explique la collectivité. Les quatre prestataires retenus - des consortiums ou de grands acteurs du service - sont ainsi entendus au cours de deux auditions, assorties de la présentation de prototypes. Cette phase de sélection se déroule actuellement, Paris ayant prévu de notifier le marché en début d'année prochaine et d'effectuer un premier déploiement dans la foulée, en mars.
"La solution en elle même n'est pas encore totalement définie puisque les quatre candidats encore en lice proposent parfois des options différentes", précise Norbert Faure, associé au sein d'Ineum Consulting, cabinet qui assure l'assistance à maîtrise d'ouvrage sur ce projet. "Globalement, elle sera basée sur une dématérialisation des flux papier en un point le plus centralisé possible. Puis, les flux entreront dans SAP, associés à des logiques de workflow." Avec pour but ultime : une dématérialisation du dossier complet (marché, facture, service fait) pour la transmission à la recette générale des finances, chargée de régler effectivement la facture. Aujourd'hui, ces documents sont transmis sous forme papier. "Ce qui représente pour les grosses collectivités - comme Paris - jusqu'à une camionnette de papier par semaine", illustre Norbert Faure.
Expérimentation sur 25 000 factures
"Nous attendons des prestataires retenus plus qu'un simple prototype", précise Alain Bayet. "Car il faudra déployer très vite sur le premier centre de services". Ce premier déploiement devrait concerner environ 25 000 factures par an et 14 agents. Une façon pour la Mairie de dresser un premier bilan avant la généralisation sur les quatre centres de services autour desquels seront remodelés les services comptables (espaces publics, économie/social, services aux parisiens, fonctions support et appui aux directions). "Il a fallu réinventer les circuits au sein de notre organisation. C'est un point essentiel dans ce genre de chantier", relève Alain Bayet, qui ajoute que le volet conduite du changement a été intégré à l'appel d'offre.
Rappelons que, fin janvier 2006, les élus parisiens avaient opté pour la refonte des systèmes financiers de la ville sous SAP, un projet baptisé Alizé et remporté par le duo Accenture-BearingPoint. Ce déploiement entrait lui-même dans le cadre d'un schéma directeur informatique doté de 160 millions d'euros (sur la période 2004-2007), visant à refondre largement les infrastructures technologiques de la collectivité.
Gommer le sentiment laissé par les retards de paiement
En juillet dernier, suite à des informations révélées par Le Parisien, la collectivité a reconnu des difficultés dans le projet Alizé, en production depuis mai 2007 (pour le département) et depuis février 2008 (pour la ville). Difficultés qui se sont traduites par des retards de paiement de ses fournisseurs. Certains d'entre eux, notamment ceux impliqués sur le chantier de l'église Saint-Sulpice, avaient protesté bruyamment contre ces retards qui mettaient en péril leur trésorerie et, parfois, leur existence même.
Nul doute que les fournisseurs voient donc arriver ce nouveau changement dans leur relation avec la collectivité avec circonspection. Même si la dématérialisation est censée fluidifier les échanges. "Avec ce projet, nous devrions gagner sur les délais de paiement", explique Norbert Faure. "Mais le principal avantage se situe dans la traçabilité des factures et dans le pilotage unifié des flux."