Gartner : les entreprises ne cherchent pas à réduire leurs coûts IT...
...mais à assurer leur croissance. Et ça change tout. Selon Tifani Bova, vice-présidente de Gartner en charge de la recherche sur la vente indirecte des services informatiques, cette approche induit un déplacement de l’allocation des budgets IT, de la DSI vers les responsables métiers et, surtout, marketing. Avec, à la clé, une transformation radicale de la chaîne de valeur des services informatiques.
«Les achats IT sortent très rapidement du giron de la DSI », assure constater Tifani Bova, qui s’exprimait en session plénière lors du Parallels Cloud Summit, qui se déroulait la semaine dernière à Orlando, en Floride. Pour la vice-présidente de Gartner en charge de la recherche de la vente indirecte de services informatiques, il s’agit là d’une tendance de fond, avec des budgets informatiques qui migrent vers la direction... marketing !
Pour elle, le regain d’intérêt des entreprises pour le décisionnel et l’analytique n’en est qu’une des manifestations. Et ce phénomène n’est pas sans conséquence sur la manière de travailler des prestataires de services. Tout d’abord, ils doivent adapter leur discours : «si c’est le DSI qui achète, vendez de la technologie. Mais les autres cherchent d’abord des solutions à des problèmes métiers. C’est le résultat qu’il faut leur vendre.» Et d’illustrer son propos : «ceux qui ont l’habitude de vendre des serveurs vont devoir vendre la continuité et la reprise d’activité.» Et peu importe que la solution nécessaire soit mise en oeuvre sur site ou déportée... C’est là que le Cloud entre en scène, «adopté plus vite dans les PME que dans les grandes entreprises ». Parce qu’il semble apporter une réponse rapide à une problématique actuelle : «les entreprises ne cherchent pas à réduire leurs coûts IT, elles cherchent à renforcer leur croissance », explique Tifani Bova. Selon elle, plus de 60 % des budgets IT sont consacrés à l’exploitation de l’existant et, pour les entreprises, il s’agit de «sortir des choses du centre de calcul et de réallouer le budget correspondant à l’innovation ». Mais attention, la sémantique compte peu, comparativement au résultat final : «ce que veut dire IaaS, PaaS ou SaaS, le client s’en moque. Ce qu’il veut savoir, c’est comment il améliore son activité.»
De nombreux écosystèmes en pleine transformation
Mais cette évolution du rapport des entreprises à leurs ressources informatiques n’est pas anodine. Elle a bien sûr un impact sur les fournisseurs de services en ligne. Pour Tifani Bova, il y aura demain trois rôles : fournir des solutions qui permettent à des brokers de services en ligne d’exister, être l’un de ceux-ci, ou enfin dépendre de l’un d’eux. À choisir, l’analyste préfèrerait être un broker de services Cloud, un acteur de la chaîne de valeur qui ajoute de la valeur à un ou plusieurs services Cloud - publics, privés ou hybrides - pour un ou plusieurs clients. Et ce qu’il soit agrégateur, intégrateur ou qu’il assure la personnalisation. Mais l’impact de ces tendances s’étend au-delà des fournisseurs de services en ligne : «le Cloud Computing est une rupture pour beaucoup de modèles économiques. [...] la transition entre deux époques n’est jamais très facile.» Alors que certains prestataires de services informatiques locaux commencent leur transformation pour prendre le virage du Cloud, Tifani Bova s’inquiète : «j’espère qu’ils ne construisent pas leurs infrastructures tous seuls car ce n’est pas leur coeur de métier.» Pour l’analyste, c’est en tout cas le bonne voie mais «la technologie n’est pas le sujet, pour les clients. Ce qu’ils veulent, c’est résoudre un problème métier. Et le rôle du partenaire, c’est de répondre qu’on peut le résoudre de plusieurs manière différentes ». Et d’exposer les différentes options, le Cloud n’étant que l’une d’elles et chacune ayant ses inconvénients et ses avantages en matière de résultats métiers. En tout cas, pour elle, «que des acteurs traditionnels aillent vers le Cloud, bien. Qu’ils se concentrent uniquement sur la vente de Cloud, non; ils passent à côté d’une subtilité ».
Des spécificités régionales
Toutefois, Tifani Bova reconnaît l’existence de profondes spécificités régionales et, en particulier, celles qui différencient l’Europe des Etats-Unis : «ici, nous avons une vraie unicité de marché, de monnaie, de langage, mais surtout de réglementation.» Ce qui, selon elle, ne vaut pas exactement pour le Vieux Continent. Ce qui ne manquera pas d’y freiner l’émergence de brokers de services Cloud, voire même de limiter la capacité des acteurs locaux à atteindre certaines tailles critiques qui demanderaient d’aller au-delà des frontières nationales.