IndiaSoft 2012 : une délégation française pleine d’ambition

Comme l’an passé, le conseil indien de promotion des exportations IT a invité une délégation française à IndiaSoft. Ses membres ont accepté de nous confier leurs attentes et leurs premières impressions.

2012 41La délégation française invitée cette année par les organisateurs d’IndiaSoft est fortement marquée par la recherche de partenariats. Mohamed Harrate, président du cluster Franche-Comté Interactive et directeur d’E-Maginair, est ici pour «évaluer les sociétés indiennes dans une perspective de sous-traitance dans le domaine du développement Web, pour [ses] adhérents». Il cherche également des partenaires vers lesquels les adhérents du cluster pourraient se tourner pour le développement d’applications mobiles : «nous disposons de quelques acteurs dans ce domaine, localement, mais ils sont peu nombreux et le recours à la sous-traitance pourrait les aider à accélérer leur développement.» L’une des difficultés qu’il rencontre, sur place, est de trouver des structures comparables à un cluster. Myriam Bardinet, directrice du groupement, fait le même constat, relevant que les entreprises indiennes présentes sur IndiaSoft ne semblent pas enclines à coopérer sur un mode de cluster. Sinon pour s’organiser afin d’éviter de se voler mutuellement des compétences, souligne Mohamed Harrate. Myriam Bardinet cherche également à développer une première compréhension de la manière dont des relations commerciales peuvent s’organiser entre la France et l’Inde. 

La démarche de France-Comté Interactive s’inscrit dans le cadre d’un projet plus vaste d’ouverture à l’international des adhérents du cluster : «nous sommes allés également au Maroc, au Royaume-Uni et en Suisse, explique Mohamed Harrate, et nous prévoyons un événement en septembre pour restituer le fruit de ces déplacements. Dans ce cadre, nous envisageons de faire venir d’autres clusters étrangers pour déclencher les rencontres.» Franche-Comté Interactive fait partie d’un réseau plus large, France IT, créé il y a un an et demi, pour servir de porte-drapeau aux clusters IT français. Il en représente déjà 11. 

Michael Vincent, fondateur de Web Confiance, une société spécialisée dans le développement Web, est là en mode exploratoire. À terme, il souhaiterait pouvoir s’appuyer sur des partenaires indiens pour gérer avec plus souplesse et moins de risque les phases de croissance de son activité. Il emploie actuellement cinq personnes à plein temps. Concrètement, il cherche notamment à découvrir comment engager la relation commerciale et évaluer les contraintes de définition des spécifications. 

2012 23Dans une logique différente, Isabelle Dreuilhe, fondatrice de CowinR, est notamment venue trouver des entreprises indiennes en quête de représentation en France, pour de la sous-traitance comme pour de la distribution de produits : «je m’intéresse à l’Inde depuis 22 ans. J’ai pratiqué ce type d’activité dans le domaine de l’aéronautique; je me développe aujourd’hui sur celui de l’IT.» Il y a deux ans, elle a même fondé à Paris une ONG aux activités concentrée sur l’Inde. Et ce qu’elle veut y faire aujourd’hui, elle en a déjà menée l’expérience en Chine. Et comme là, elle compte s’appuyer sur un réseau de consultants, en France ainsi que dans le sous-continent.

Dernier délégué français, Olivier Colson vient de lancer myIndiaIT.fr. Déjà éditeur de solutions de gestion des recrutements utilisées notamment par Intermarché ou Air France, il mise aujourd’hui sur la création d’un portail qui devra permettre aux petites et moyennes entreprises IT indiennes de gagner en visibilité sur le marché français : «je veux aider les PME françaises à disposer d’un back office en Inde pour améliorer leur compétitivité. Les dirigeants y sont généralement prêts.» Pour cet économiste de formation, il est essentiel que «les entreprises françaises sachent ouvrir leur chaîne d’approvisionnement à l’Inde pour rester compétitives et préserver les emplois ». 

Un professionnalisme parfois... brouillon

2012 31Tous les cinq louent l’organisation mise en place par ESC pour IndiaSoft, clairement conçue pour favoriser les interactions directes entre exposants et invités. Mais le volontarisme des exposants impressionne largement. Myriam Bardinet raconte ainsi avoir été fortement sollicitée en amont : «ça avait un côté quasiment industriel. C’est en tout cas très méthodique. Plusieurs m’ont même proposé des conférences téléphoniques pour préparer la rencontre, en amont du salon. Même son de cloche du côté d’Isabelle Dreuilhe : «la communication commence très en amont, et elle est très importante. Cela permet d’entrevoir que la communication passera très bien par Internet. Et qu’ils ont bien compris que c’est indispensable.» Et pour Olivier Colson, ce volontarisme commercial est «tout simplement exemplaire ». Mais la démarche n’est pas exempte de défauts. Et là encore, c’est l’unanimité : la communication de prospection, en amont du salon, n’est pas encore assez ciblée, reste dans le genre de la «promotion de masse », relève la fondatrice de CowinR. Michael Vincent en a même développé le sentiment «qu’ils veulent nous voir pour nous voir ». Certains exposants déjà présents l’an passé, à Pune, ont toutefois appris cette leçon et travaillent à affiner leur travail de prospection en amont de l’événement. 

De véritables perspectives... mais de la prudence

Pour Isabelle Dreuilhe, ça ne fait pas de doute : «il y aura des affaires.» Et de relever notamment l’avidité, en la matière, des exposants : «mais il faudra prendre du recul et le temps de qualifier la capacité de chacun. [...] Il y a là un fort esprit d’entrepreneuriat, une énergie créative considérable. Mais ce n’est pas forcément canalisé.» Olivier Colson leur reproche de dire «qu’ils font tout», de manquer de spécialisation - «je leur demande régulièrement où ils sont les plus forts ». Une démarche également adoptée par Michael Vincent. 

Myriam Bardinet souligne pour sa part une perception de «grande flexibilité. Ils se disent généralement prêts à se lancer, même s’ils doivent eux-même sous-traiter sur des domaines où ils n’ont pas les compétences, pour satisfaire la demande ». Mais c’est peut-être le corollaire de l’avidité évoquée plus haut. 

En tout cas, la compréhension des attentes et des besoins semble bien là. En fait, si Isabelle Dreuilhe appréhende des difficultés, c’est sur le processus de décision : «on sent le poids et la lourdeur de la hiérarchie. Il va falloir compenser par la persuasion."

Mais Olivier Colson n’anticipe pas de blocage côté indien : «mon anglais qui est loin d’être parfait ne constitue pas une barrière.» Non, c’est du côté français que les choses pourraient être plus difficiles selon lui : «il y a une maturité à développer. Et il y a urgence à le faire car chaque année, l’Inde forme autant de nouveaux ingénieurs qu’il y en a, en tout, en France. L’avenir de l’IT est ici.»

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