Microsoft se paie pour plus d’un milliard de brevets AOL. Dont Netscape ?
Microsoft a décidé de compléter son imposant portefeuille de brevets en mettant la main sur plus de 800 brevets d’AOL, et quelques 300 licences de technologie du groupe américain. Une cession d’activité est également au programme, qui pourrait bien correspondre à Netscape.
Enième accord entre deux poids lourds du secteur portant sur les brevets. Microsoft et AOL ont annoncé le 9 avril avoir scellé un accord dans le cadre duquel l’éditeur de Redmond rachète quelque 800 brevets à AOL pour un montant évalué à 1,05 milliard de dollars, en numéraire. Selon les termes de l’accord, les deux partenaires ont également mis en place un accord de licence croisée, qui prévoit qu’AOL conservera une licence sur les technologies brevetées cédées à Microsoft. Et inversement, Redmond obtient une licence sur les brevets clés d’AOL qui ne sont pas inclus dans la vente. Quelque 300 brevets sont couverts par cette dernière clause et portent sur des technologies liées à la publicité en ligne, aux réseaux sociaux, à la recherche, à la génération et la gestion de contenu, à la sécurité, au multimédia et le streaming. Bref, un vaste portefeuille qui, comme l’indique Tim Armstrong, Président et CEO d’AOL dans un communiqué, démontre encore la valeur de ses technologies.
Microsoft s’est montré le plus offrant dans le cadre d’un long processus d’enchères, lancé à l’automne dernier. Des enchères, comme l’indique Reuters, qui avaient notamment attiré Google, Facebook, mais également eBay ou Amazon. Selon Reuters, c'est Starboard Value LP, un des actionnaire d’AOL, qui est à l'origine de l'idée de cette vente. Ce fonds d'investissement estimait qu'une cession de brevets pourrait rapporter gros aux actionnaires. Un pari qui a porté ses fruits, puisqu'AOL, qui a cédé à la pression du fonds, confirme que les produits de la vente de ses brevets, seront reversés aux actionnaires du groupe. On ne connaît pas la nature des technologies couvertes par ces brevets.
Il faut ajouter qu’AOL peine à retrouver son rythme sur le marché. Le groupe a annoncé en mars 2011 une importante vague de licenciements (20% de ses effectifs), tout en essayant de se positionner en un portail multimédia d’informations. Le rachat du très célèbre Huffington Post en est un exemple, tout comme la volonté de fusionner avec Yahoo.
Mais ce n’est pas tout. Car parmi les termes de cette transaction, AOL et Microsoft se sont également accordés sur la revente à Redmond d’une filiale d’AOL qui accumulerait les pertes. Sans toutefois citer le nom de cette filiale ou des activités concernées. Toutefois nos confrères de AllthingsD, un blog du Wall Street Journal, qui cite des sources anonymes proches du dossier, indiquent que ces activités seraient liées à Netscape. L’une des anciennes gloires déchues des débuts d’Internet à qui l’on doit notamment l’un des premiers navigateurs Internet - l'ancêtre de Mozilla. AOL s’était porté acquéreur de Netscape en 1998, avant de l’éteindre en 2003. Microsoft aurait donc racheté les brevets Netscape, mais AOL conserverait la marque et les activités, qui se résument aujourd’hui à un fournisseur Internet low-cost et un portail.
La guerre des brevets fait rage
Cette acquisition par Microsoft des brevets d'AOL se déroule en pleine tempête autour des brevets aux Etats-Unis, où les éditeurs tentent d’acquérir des technologies brevetées par mesure défensive. Par exemple, Google, en plein procès contre Oracle pour violation de la propriété intellectuelle de Java, a récemment confirmé que le pharaonique rachat de Motorola Mobility pour plus de 12 milliards de dollars avait été motivé par les brevets du constructeur de mobiles. Comment ne pas citer les rachats par Mountain View de brevets IBM ou encore ceux de Nortel, par Microsoft, EMC et Apple notamment. Plus récemment, Facebook, menacé par Yahoo pour violation de brevets, a également été faire son marché chez IBM.
Croire toutefois que ces rachats n'ont qu'une vocation défensive revient à vivre dans le monde des bisounours. Microsoft par exemple a ainsi montré une grande habileté à valoriser ses brevets en contraignant nombre d'utilisateurs d'Android et de Linux à lui verser des royalties pour des technologies comme le système de fichiers FAT et ses évolutions (utilisées par la plupart des cartes mémoire). Apple tenterait aujourd'hui de faire de même avec les constructeurs de terminaux Android. Nokia en est aussi réduit à tenter d'utiliser son imposant portefeuille de brevets mobiles pour tenter d'enrayer la progression de ses nouveaux concurrents. Et nous ne citons là que les plus connus des protagonistes, car la liste des batailles de brevets en cours est longue.
Si tu veux la paix prépare la guerre (Si vis pacem, para bellum), disaient les romains. Si tu veux la guerre prépare la aussi, semble être aujourd'hui le mantra des géants de l'industrie dans leur quête éperdue pour plus de brevets...