Open source : Hollande et Sarkozy convergent souvent mais s’opposent sur les brevets logiciels
Fort de sa foi dans la dimension économique incontournable du mouvement open source, le CNLL (Conseil national du logiciel libre) a soumis un questionnaire précis aux candidats. Pour tirer une analyse non moins précise du programme des deux plus en vue en matière de logiciel libre. Les approches sont consensuelles…. Sauf en matière de brevets logiciels, se qui inquiète la communauté.
Très intéressé par le point de vue des candidats en matière de développement de l’open source, le CNLL (Conseil national du logiciel libre, créé il y a un peu plus de deux ans) a envoyé en novembre un questionnaire en huit points aux principaux candidats. Il s’agissait alors pour l’association regroupant une dizaine de grandes associations et de clusters d'entreprises du Logiciel Libre, de les voir expliciter leurs positions par rapport aux facteurs de développement, ou au contraire de freins au développement, du logiciel libre et de l’open source.
Dans son document d’analyse et de synthèse, le CNLL, par la voix de son Président Patrice Bertrand, estime que sur une majorité de sujets, les deux principaux candidats « semblent avoir compris la teneur du Logiciel Libre et les bénéfices spécifiques qu'il apporte à notre économie ». Ainsi, sur la place du Logiciel Libre dans la commande publique, « François Hollande et Nicolas Sarkozy sont l'un et l'autre favorables à une politique d'incitation préférentielle en la matière ». Nicolas Sarkozy note dans le document transmis au Conseil , que « 15% du budget informatique des administrations était consacré au Logiciel Libre et ce chiffre est en croissance de 30% par an. (…) Le logiciel Libre est un axe stratégique du développement du secteur numérique en France ». De son côté, François Hollande prévoit pour l'Etat une informatique privilégiant « l’agilité plutôt que la logique des 'grands projets' cloisonnés et coûteux » et souligne que « les logiciels libres permettent quant à eux davantage de mutualisation et facilitent la mise en concurrence des fournisseurs de prestations externalisées. »
Le soutien aux PME, tous métiers confondus, était l'une des priorités exprimées par le CNLL, dont les entreprises sont majoritairement petites et moyennes. Et là encore, le consensus est grand entre les deux principaux candidats sur la nécessité de soutenir les structures les plus petites.
En fait, le sujet sur lequel les prises de position des candidats se distinguent fortement selon le CNLL est celui des brevets logiciels. « François Hollande y est clairement opposé, invoquant un engagement constant, où le combat mené par Michel Rocard au Parlement Européen a fait Date » note le conseil. Au contraire, Nicolas Sarkozy se dit favorable aux brevets logiciels. Pour Patrice Bertrand, « le commentaire du candidat invoque les bénéfices de la protection de la propriété intellectuelle dans la réussite de grands acteurs du logiciel [...et] les entreprises qui portent cette industrie telles que SAP ». Un point de vue qui ne devrait pas vraiment réjouir les membres de la communauté du libre. Particulièrement au fait des développements touchant à l’open source, Stéphane Fermigier, Président du GT Logiciel Libre du Pôle Systematic, explique ainsi dans un avis transmis au MagIT « s’inquiéter de la prise de position de M. Sarkozy concernant la brevetabilité du logiciel, puisque ce dernier a répondu sans prendre de gants "[être] favorable[s] aux brevets logiciels et [avoir pour projet d'agir] dans ce sens." »
Pour Stéphane Fermigier – pourfendeur de longues dates desdits brevets comme nombre d’entrepreneurs de l’open source – estime que « le détail de sa réponse montre une méconnaissance du sujet et de ses enjeux, qui ne saurait être réduit, comme c'est le cas, à une simple opposition "logiciel libre vs. logiciel propriétaire". La question des brevets logiciels en Europe a été jugée comme la plus critique par nos entreprises, et en tant qu'entrepreneur du logiciel, je peux vous dire que c'est un problème réel, et non hypothétique. »
Beaucoup de convergences donc mais un gros point d’interrogation sur un sujet qui fâche du côté de Nicolas Sarkozy… De quoi orienter quelque peu le message proposé en conclusion par le CNLL aux candidats qui tient notamment dans cette phrase tirée du document de synthèse : « Parce qu'il fonde la création de valeur sur l'expertise des hommes et non sur le seul droit d'utilisation, le logiciel libre est un vecteur de relance économique qui est indissociable de la création d'emplois ». A noter que si elle a tardé à remettre son point de vue, Eva Joly, candidate pour le compte d’Europe Ecologie, se dit 100% alignée sur les recommandations proposée par le Conseil National du Logiciel Libre.
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