Greenpeace s’attaque aux sources d’énergie des géants du Cloud
Alors que le débat, sur la dimension «green» des centres de calcul se limite souvent à la question de leur efficacité énergétique, Greenpeace s’attaque à celle des sources d’énergies retenues par les industriels du secteur pour alimenter leurs installations. Une approche qui ne manquera pas de faire débat.
Fluide, simplifiant les usages, apportant un confort inédit aux consommateurs, le Cloud Computing n’est pas aussi propre qu’il pourrait sembler l’être. C’est du moins le message que Greenpeace veut faire passer avec son rapport «How green is your Cloud ?» Dans celui-ci, l’association s’attaque notamment à la consommation énergétique des centres de calcul, «les usines de l’âge de l’information du 21e siècle», comme elle les décrit. Et de déplorer que «malheureusement, malgré les innovations considérables que contiennent [ces centres de calcul] et leur potentiel vis-à-vis des énergies propres, la plupart des entreprises IT les étendent rapidement sans tenir compte de la manière dont leurs choix énergétiques pourraient avoir un impact sur la société ». Certes, concède Greenpeace, les centres de calcul font l’objet d’importants efforts en matière d’augmentation de leur efficacité énergétique, «mais les entreprises ne doivent pas seulement regarder le niveau d'efficacité de leur consommation l’électricité, mais aussi les sources d’électricité qu’elles choisissent ». C’est donc à un maillon rarement évoqué de la chaîne que s’intéresse ici l’organisation.
Des éléments oubliés de la chaîne énergétique
Pour justifier sa démarche, Greenpeace souligne notamment que le secteur des technologies de l’information et des communications a emis 830 millions de tonnes d’équivalent CO2 en 2007, dont 116 millions pour les centres de calcul, et que la consommation énergétique globale des centres de calcul dans le monde a progressé de 56 % entre 2005 et 2010. Surtout, alors que la plupart des opérateurs de centres de calcul se contentent encore d’afficher leur PUE (cet indicateur d’efficacité énergétique dont beaucoup n’hésitent pas à souligner l’insuffisance), Greenpeace appelle à la transparence et à l’adoption complémentaire d’un autre indicateur, le CUE, permettant d’établir l’efficacité carbone d’une installation.
En outre, elle fait un tour d’horizon de plusieurs régions souvent sélectionnées pour l’installation de centres de calcul et détaille les mix énergétiques locaux.
Plus loin, traçant un parallèle entre cette progression et celle de la mobilité, l’association s’attaque également à la consommation électrique des réseaux de téléphone mobile, enjoignant à leurs opérateurs, notamment dans les pays en développement, de recourir à l’énergie solaire pour alimenter leurs stations de base.
Les bons et les mauvais élèves
Comme à son habitude, Greenpeace établit donc un classement, basé sur un index de propreté énergétique de quelques grands acteurs. Dell et Yahoo arrivent en tête de celui-ci avec un score supérieur à 56 %. Yahoo est notamment salué par le choix de Lockport, dans l’état américain de New York pour l’installation d’un centre de calcul : cette décision lui a permis de sécuriser 15 MW d’alimentation hydroélectrique. Même chose pour Facebook qui n’obtient certes qu’un 36,4 % mais dont le choix de Lulea en Suède pour son troisième plus gros centre de calcul est salué par l’association. Globalement, Twitter, Rackspace, HP, et Google s’en sortent avec des notes plutôt honorables, sinon bonnes, rapportées au reste du classement. Amazon, Apple, IBM, Microsoft, mais surtout Oracle et Salesforce émargent en queue de peloton. Oracle est par exemple pointé pour un manque de transparence quant à l’implantation de ses centres de calcul et des sources d’énergie disponibles localement, ou encore sur un objectif de réduction des émissions carbonnées jugé «modeste» par Greenpeace.
Une méthodologie rapidement contestée
Apple, dont un datacenter est installé à Maiden, en Caroline du Nord, et qui doit en ouvrir prochainement un autre à Prineville dans l’Oregon, deux états où environ 60 % de l’électricité est produite à partir du charbon, a vite réagi notamment sur le terrain de... l’efficacité énergétique, soulignant prévoir de recourir largement au refroidissement passif. Mais la firme a également insisté sur sa volonté de déployer des panneaux solaires photovoltaïques [et elle s’apprête à déployer la plus grande centrale à pile à combustible des Etats-Unis, NDLR] et encore d’être transparente quant à ses choix énergétiques et à son empreinte carbone.
Et sans que cela s’apparente à une réponse officielle à l’étude de Greenpeace, Facebook a récemment annoncé l’ouverture d’un nouveau centre de calcul, basé sur le framework de l’Open Compute Project, et qui devrait afficher un PUE record de l’ordre de 1,06.