Présidentielle 2012 : la nécessité de pousser au développement du secteur numérique fait consensus
Les deux candidats – ou du moins leurs équipes spécialisées sur le sujet – sont d’accord : le numérique constitue un secteur à développer en France dans le cadre du redressement économique. Mais peu d’innovation en matière de financement ou de gouvernance émerge des programmes de campagne. Le diagnostic sur le retard est posé. Les solutions demeurent floues : le PS s’appuyant sur le volontarisme industriel et sur la simplification des flux de financement ; l’UMP se faisant fort du bilan du Président et comptant sur le Conseil national du numérique pour orienter la politique du futur gouvernement.
Dans la dernière ligne droite de la campagne présidentielle, les deux candidats pourraient peut-être trouver un terrain d’entente sur les politiques en matière d’innovation et de développement économique du secteur numérique. Peu de choses distinguent en effet les programmes des deux candidats en la matière. Le diagnostic est partagé sur l’absence problématique d’un écosystème fort – sur le modèle de la Silicon Valley américaine – entre universités, unités de recherche, grandes entreprises et start-ups. Seules différent un peu les modalités d’action.
Revendiquant l’antériorité de Nicolas Sarkozy sur le sujet, l’UMP s’appuie notamment sur ce qui a été fait autour du grand emprunt en matière de financement et du Conseil national du numérique en matière de gouvernance industrielle. Pour le PS, une remise à plat en faveur des PME et des start-ups s’impose, tout comme le choix de quelques segments particuliers sur lesquels capitaliser pour créer des leaders français.
Concernant le support au développement de ces dernières, les solutions proposées sont assez semblables, reposant sur les dispositifs existants à savoir le statut de Jeune entreprise innovante (JEI) et le Crédit d'impôt recherche (CIR). Le Parti Socialiste veut de son côté remettre sur la table les critères d’attribution du CIR pour favoriser les PME et faciliter les démarches pour l’accès à ce crédit. Autre spécificité du programme de François Hollande – qui dépasse le seul secteur numérique – la création d’une banque publique d'investissement qui pourrait se faire sur la base d’une réallocation des modalités du grand emprunt organisé en 2009 par Nicolas Sarkozy et des missions du FSN (Fonds souverain national, également annoncé par Nicolas Sarkozy). Plus que sur l’allocation du financement lui-même, l’UMP cherche surtout à fluidifier la circulation des crédits et propose, pour les sociétés ayant des problèmes de trésorerie et éligibles au CIR, qu’Oséo, l’organisme de financement de l’innovation plus spécialement dédié aux PME, assure l’avance des sommes. Invité à s’exprimer dans un débat contradictoire devant le Collectif du numérique – regroupant une trentaine d’organisations du secteur - Nicolas Princen, conseiller de Nicolas Sarkozy pour le numérique, a réitéré l’annonce de l’actuel Président en faveur de la création d’un programme national Start-up France lié au Conseil national du numérique, institué sous son mandat. L’objectif est de proposer un guichet unique des aides destinées aux entrepreneurs, doublé d’un outil de mise en réseau entre entrepreneurs, notamment destiné à intégrer les expatriés dans la dynamique.
Cette logique de mise en réseau et d’écosystème est également motrice du programme du Parti Socialiste. Récemment interrogé lors de la visite de start-ups de la région bordelaise, Alain Rousset, Président socialiste du Conseil régional d’Aquitaine et surtout, depuis quelques mois déjà, chargé de la thématique production et industrie dans l’équipe de François Hollande, expliquait que « le développement de clusters très locaux et les synergies sur les territoires concernés » était l’un des principaux axes du développement des industries technologiques.
Reste un problème de taille auquel seront confrontés les politiques en charge du dossier industrie numérique dans un avenir proche : la montée en puissance des start-ups et le financement de l’amorçage. Peu de détails à ce niveau sur la manière dont on pourrait construire des sociétés innovantes plus solides, à même de devenir des leaders dans différents secteurs. Il est symptomatique de voir que nombre d’entreprises françaises éprouvent le besoin d’aller se financer à l’étranger – et notamment aux Etats-Unis – courant le risque potentiel – au moins pour l’économie nationale – de tomber dans le giron de groupes américains qui considèrent les technologies de l’information et l’édition logicielle comme une chasse quasi gardée. Fleur Pellerin, conseiller au numérique de François Hollande qui s’exprimait également devant le Collectif du numérique, estime cependant que le Fonds national d'amorçage est un sujet de taille qu’il faudra adresser sans apporter plus de précisions. Selon elle, il s’agira notamment de définir deux ou trois secteurs d'investissement prioritaires "pour faire du numérique une filière d'excellence en France". L’esquisse d’une idée qu’il faudrait une véritable politique industrielle pour un secteur à forte valeur ajouté ?
En complément sur les enjeux industriels du secteur retrouver notre blog StartUp IT
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