Conseil National du Numérique : démission des membres sur fond de prise en main par Fleur Pellerin

En nommant rapidement et sans consultation un proche conseiller au poste de Secrétaire général du Conseil National du Numérique, Fleur Pellerin, ministre en charge du secteur, a pris les membres dudit conseil à rebrousse poil. Défiés, ils ont annoncé la remise « à disposition » de leur mandat, provoquant de fait la vacance du CNN. L’occasion – visiblement provoquée – pour la ministre de prendre la main sur l’un des leviers mis en place par le gouvernement précédent pour le secteur numérique.

Première tension entre une partie du monde du numérique et Fleur Pellerin, toute nouvelle ministre en charge des PME, de l’innovation et de l’économie numérique. Le CNN, Conseil national du numérique institué par le gouvernement précédent et présidé par Patrick Bertrand, Directeur Général de Cegid, l’un des principaux éditeurs de logiciels d’entreprise français, vient de remettre sa démission collégiale dans un courrier envoyé hier soir. Les membres du conseil – à l’exception notable de Gilles Babinet, ancien Président, ne donnent pas vraiment de motif à ce mouvement surprise mais ils n’ont visiblement pas apprécié d’apprendre par un simple communiqué la nomination de Jean Baptiste Soufron, journaliste et avocat proche de la ministre, spécialisé dans le numérique, au poste de secrétaire général du Conseil, vacant depuis le départ de Benoît Tabaka, recruté par Google en avril. D’autant que le choix pour ce poste devait être le fait du Président du Conseil assisté de ses vice-présidents, et non celui de la ministre.

Le mot démission n’apparaissant pas dans le document du CNN qui préfère parler de remise à disposition des mandats octroyés par le Président de la République; il semble que personne n’ait souhaité insulter l’avenir. Reste que si le CNN a pu travailler un peu, l’organisme est tout récent et avait suscité dès sa création quelques critiques. Il ne devrait pas disparaitre, selon les récents propos de Fleur Pellerin, mais cette dernière pourrait profiter de ce mouvement et de la nomination d’un proche au Secrétariat général pour reconstituer le conseil à sa main selon des équilibres différents. Les 18 membres historiques, installés en avril 2011 par Nicolas Sarkozy, ont en effet peu ou prou le même profil d’entrepreneur du web.

A l’époque, le Munci – association représentant des informaticiens – estimait par exemple que « la composition du CNN s’avère assez éloignée des préconisations du rapport préalable à sa création, réalisé après consultation publique par Pierre Kosciusko-Morizet ». Un rapport qui demandait qu’on tienne compte “de la diversité du secteur afin de couvrir la complexité de la chaîne du numérique” et qui avait conseillé une “assemblée ouverte”. L’organisation professionnelle regrettait de voir « très peu d’ingénieurs ou de scientifiques de formation, essentiellement des communicants et des gens du marketing… ».

Du côté du Geste, Groupement des Editeurs de Services en ligne, on pointait du doigt « la sur-représentation des différents intermédiaires, qu'ils soient opérateurs (4 postes + la FFT), distributeurs, fournisseurs d'accès, "experts" du marketing direct (2 postes), plateformes de distribution...» et qui se retrouvaient face à un seul éditeur de contenus.

Fleur Pellerin, très au fait de l’organisation et de la disparité du secteur numérique entre opérateur de services, éditeurs de logiciel, pure player internet, fournisseurs d’accès, fournisseurs de contenus, utilisateurs…, apportera sans doute un nouvel équilibre.

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