Le Sparc64 X : prochain moteur des serveurs d'entreprises d'Oracle ?
A Hot Chips, Fujitsu a dévoilé les spécification de sa puce Sparc64 X, une puce aux performances détonnantes qui pourrait bien être le fameux processeur M4 mentionné par Oracle dans ses roadmap. Un processeur censé motoriser une nouvelle ligne de serveurs Unix haut de gamme à la fin 2012... Le MagIT revient en détail sur la présentation de la puce.
On en sait désormais un peu plus sur les deux puces qui devraient, en toute logique alimenter les futurs serveurs Sparc d’Oracle et Fujitsu, les deux constructeurs ayant fourni des détails sur les puces Sparc T5 et Sparc64 X lors de la récente conférence Hot Chips.
Avec le T5, Oracle continue dans sa tradition de processeurs multithreadés, mais avec des performances sérieusement dopées pour les applications monothreadées. Le Sparc64 X pourrait quant à lui apporter une bouffée d’oxygène bien nécessaire à la gamme de serveurs Sparc Entreprise M, qui n’a plus été mise à jour depuis décembre 2010 (avec l’arrivée des Sparc64 VII+ à 3 GHz) et qui peine à tenir la comparaison face aux serveurs Power d’IBM.
Sparc64 X : à la rescousse des serveurs Sparc Entreprise M. ?
Oracle étant Oracle, il est difficile de savoir quelle est la relation actuelle entre le géant californien et son partenaire japonais. Officiellement la roadmap de la firme inclut une puce baptisée M4 en parallèle de la ligne de produits Sparc T. Mais cela fait maintenant près de deux ans que les deux firmes conservent un silence pesant sur leur relation. Hot Chips 24 n’a d’ailleurs pas permis d’en savoir plus, les officiels de Fujitsu ayant refusé de répondre à toutes les questions sur le partenariat Oracle/Fujitsu et sur la destination des puces Sparc64 X. On le verra tout au long de cet article, le Sparc64 X a tous les attributs pour être le fameux M4 sur la roadmap d'Oracle. Mais c'est au constructeur californien qu'il reviendra vraisemblablement d'annoncer la nouvelle, pas à Fujitsu. Notons toutefois que le programme du prochain OpenWorld, qui s'ouvre à San Francisco le 30 septembre prochain inclut une session baptisée "Fujitsu Technology : Redefining IT's Potential" qui sera animée par Noriyuki Toyoki, le vice-président de Fujitsu et qui promet d'expliquer comme Oracle et Fujitsu combine leurs expertises en matière d'ingénierie pour architecturer le futur des technologies Sparc".
Officiellement, le Sparc64 X a été conçu pour donner naissance à une nouvelle génération de serveurs Unix. La puce succède à une série de puces Sparc conçues par Fujitsu pour le marché du HPC. Après le Sparc64 VII+ quadri cœurs, la firme japonaise a en effet concentré ses travaux d’ingénierie sur les Sparc64fx, à commencer par le Sparc64 VIIIfx « Venus », une puce octo-cœurs gravée en 45nm, développée pour assembler le cluster K qui a un temps occupé le premier rang mondial des supercalculateurs. Le Japonais a ensuite créé le Sparc64-IXfx, un processeur à 16 cœurs gravé en 40nm et conçue pour motoriser le PrimeHPC FX10, une machine HPC commerciale, issue des travaux de développement de K.
[Télécharger la présentation complète du Sparc64 X de Fujitsu par Takumi Maruyama sur LeMagIT (PDF)]
Les puces de la série fx sont, comme nous le notions à l’époque, peu adaptées aux grands serveurs d’entreprises. Elles font l’impasse sur des fonctions essentielles en matière de virtualisation notamment et elles sont optimisées pour le traitement de codes parallèles. Elles n’ont notamment pas les caches nécessaires pour traiter les applications d’entreprise pour lesquelles les puces Sparc64 ont historiquement été conçues. Il n’empêche leur développement semble avoir injecté un sang nouveau dans les puces Sparc Entreprise.
Un hybride entre les anciennes puces Sparc Entreprise et les puces Sparc fx
Le Sparc64 X peut d’ailleurs être considéré comme le fruit de la fusion entre l’historique savoir-faire Sparc 64 et les connaissances accumulées durant le développement de la série fx. C’est d’ailleurs ce qu’a confirmé Takumi Maruyama en charge de la division processeur de Fujitsu lors de sa présentation à Hot Chips.
La puce embarque ainsi le support de la virtualisation – compatible avec le LDOM d’Oracle?- mais aussi les extensions parallèles au jeu d’instruction Sparc (HPC-ACE) développées par Fujitsu pour la ligne fx. De même, la puce emprunte aux fx certaines caractéristiques comme l’approche system on a chip avec le contrôleur PCI Gen3 embarqué ou le bus d’interconnexion point à point entre processeurs (qui promet une évolution radicale dans la façon dont Fujitsu – et Oracle ?- vont architecturer leurs prochains serveurs haut de gamme).
Enfin le Sparc64 X embarque une série d’accélérateurs pour certaines fonctions comme l’accélération de bases de données (on ne parle pas de SQL Server, pour ceux qui suivent mon raisonnement…), l’accélération d’opérations décimales (une exclusivité des puces des grands systèmes IBM et des Power7 à ce jour) et l’accélération des opérations cryptographiques.
Le Sparc64 X sera gravé en 28 nm chez TSMC, dont sur un processus similaire à celui utilisé par AMD et NVidia pour certaines de leurs puces. Il dispose de 16 cœurs, chacun capable de traiter 2 threads en parallèle et dispose d’un cache de niveau 2 partagé entre les cœurs de 24 Mo. Au total, la puce devrait contenir environ 2,95 milliards de transistors et être cadencée à 3 GHz. Selon Fujitsu elle aura une puissance crête de 382 Gflops et affichera une bande passante mémoire de 102 Go/s.
Fujitsu a aussi beaucoup travaillé sur la fiabilité de ses puces avec une protection ECC de l’ensemble des caches et de multiples mécanismes de corrections d’erreurs y compris pour le traitement des instructions.
Des performances détonnantes
Au final le résultat devrait être détonant par rapport aux systèmes actuels à base de Sparc VII+. Fujitsu annonce ainsi des performances en mode monothread multiplées par 1,6 à 1,7, mais surtout une multiplication moyenne par 7 des performances pour les applications très intensives en bande passante (pour mémoire rappelons que la roadmap d'Oracle promet une multiplication par 1,5 des performances monothread et un accroissement par un facteur de 6 de la bande passante pour la fin 2012...).
Les accélérateurs spécifiques devraient aussi permettre de doper par un facteur de près de 100 certaines opérations de chiffrement (x98 pour l’AES-25-CBC). Sur le benchmark Stream Triad, Fujitsu met aussi en avant une multiplication par 15 des performances. Alors qu’un Sparc Enterprise M4000 affichait un débit mémoire de 4,35 Go/s, un serveur quadri-socket Sparc64-X affiche un score de 65.6 Go/s. Un serveur quadri socket Sparc64 X aura en effet à sa disposition quatre fois plus de cœurs d’une machine similaire dans la gamme Sparc Entreprise et 15 fois la bande passante mémoire. On imagine ce que cela pourrait avoir comme impact sur des applications réelles, comme des applications Java d’entreprises par exemple.
Notons pour terminer que selon Fujitsu, il y a encore de la marge d’amélioration. La firme nippone s’est d’ailleurs formellement engagée à poursuivre les développements du Sparc64 au-delà de cette dixième génération.
OpenWorld devrait permettre d'y voir plus clair sur les relations entre Oracle et Fujitsu et notamment de savoir si Fujitsu a toujours la responsabilité du développement des serveurs haut de gamme de la ligne Sparc Entreprise M commune aux deux société. La roadmap présentée par Oracle voudrait que les nouveaux haut de gamme des deux firmes soient annoncés dans les six mois. Mais rien n’est franchement certain ces derniers temps à Redwood Shores. Surtout, tous les contacts que nous avons encore chez Oracle (et ils se font rares) se refusent à communiquer sur le sujet.
A Openworld, il est acquis que les Sparc T5 devraient tenir la vedette poru ce qui est des annonces infrastructures. Mais une surprise est possible autour des Sparc64 X. LeMagIT suivra l'événement à distance, mais avec intérêt... Car faute d'une mise à jour rapide de la ligne Sparc Entreprise M, on ne donne pas cher de la peau des serveurs Sparc face à l’armada Power.
Profitant des incertitudes qui planent sur les lignes d’Oracle et sur les bisbilles HP/Oracle, IBM et ses partenaires comme Bull ou Hitachi, contrôlent en effet déjà plus de la moitié du marché mondial Unix, alors que les systèmes AIX n’en détenaient qu’un peu plus d’un tiers fin 2008. Sur le marché des serveurs critiques, une chose est sûre : l’incertitude ne fait jamais vendre…
A lire aussi sur LeMagIT :
Oracle rassure sur l'avenir des puces Sparc, sans répondre à toutes les interrogations
Serveurs Unix : Sun et Fujitsu contrent le Power6 avec le Sparc64 VII quadri-coeur
Power 7, Itanium, UltraSparc T3 : dans le monde Unix, 2010 s'annonce agité