Documation : drôle de guerre dans la GED entre l'Open Source et les progiciels
Une première journée bien remplie aux dires de nombreux exposants, qui dressaient ce mercredi soir un premier bilan de Documation, salon spécialisé sur la gestion de l'information qui se tient au CNIT de Paris-La-Défense. Des allées (raisonnablement) bien remplies, des contacts qualifiés : bref, le salon, qui en est à sa quatorzième édition, semble tenir sa vitesse de croisière.
Une première journée bien remplie aux dires de nombreux exposants, qui dressaient ce mercredi soir un premier bilan de Documation, salon spécialisé sur la gestion de l'information qui se tient au CNIT de Paris-La-Défense. Des allées (raisonnablement) bien remplies, des contacts qualifiés : bref, le salon, qui en est à sa quatorzième édition, semble tenir sa vitesse de croisière.
Et ce, même si le secteur de la GED, depuis plusieurs mois déjà, est traversé par une grosse interrogation : les acteurs Open Source, en train de se positionner sur ce créneau, et des généralistes comme Microsoft (avec SharePoint) vont-ils conduire à une banalisation de la technologie. Et remettre en cause la suprématie des trois grands de l'ECM (Enterprise Content Management) pour grands comptes que sont IBM (qui a racheté l'éditeur spécialisé FileNet), EMC (qui a repris Documentum) et OpenText, le dernier gros poisson encore indépendant. Grand absent du salon – puisqu'il n'était représenté que par des partenaires -, l'éditeur Open Source Alfresco, créé en 2005 par John Newton, un des cofondateurs de Documentum, et John Powell, ex directeur général de Business Objects, était sur toutes les lèvres.
Gartner a enfin raison
« Je n'ai pas le souvenir d'avoir été opposé à Alfresco en short-list chez un prospect », tranche Jean-François Millasseau, directeur avant-vente pour la France d'OpenText, éditeur qui présentait sur le salon une brique de messagerie instantanée professionnelle pour sa solution LiveLink. Selon ce responsable, le marché des grands progiciels reste dynamique, tiré par des projets de consolidation (autrement dit le regroupement de plusieurs bases documentaires sur un seul outil au sein d'une organisation) ou de mise à jour. Une vision que confirme Alain Le Corre, un ex Filenet devenu responsable du marché gestion de l’information chez IBM France : « si on se trouve en short-list face à Alfresco, c'est qu'on s'est trompé de marché ! Ces solutions Open Source sont des produits orientés Web, très présents dans le secteur public. Nous nous positionnons sur des choix d'infrastructure chez les grands comptes. » Selon lui, chez ces derniers, la prédiction émise par Gartner voici plusieurs années est en train de se réaliser : la solution de gestion de contenus devient un choix à l'échelle de l'entreprise. « Le trimestre dernier, nous venons de signer le plus gros contrat de tous les temps sur un produit FileNet : plus de 33 millions de dollars de licences pour un projet global chez HSBC. Et plusieurs très grands comptes français se positionnent aujourd'hui dans cette même logique », explique Alain Le Corre, pour qui le rachat de FileNet par IBM n'a en rien entamé la dynamique de croissance que connaissait l'éditeur avant d'être racheté.
Yalta dans la GED
Plus mesurés, les intégrateurs observent plutôt une forme de Yalta du marché de la GED, un partage de facto. Aux trois grands, les contrats « groupe », sur des processus métier coeur. A l'Open Source, des projets plus modestes, dans des comptes intermédiaires, dans l'administration. Mais pas uniquement. « L'Open Source a changé la donne en profondeur. Surtout Alfresco, relève Marc Lefebvre, de Sollan, un intégrateur spécialisé comptant environ 25 salariés et travaillant tant sur des solutions classiques comme LiveLink que sur des briques Open Source. D'autant que le modèle de l'Open Source plaît sur le marché français. Alfresco reçoit ainsi un excellent accueil des grands comptes, mais pour des approches départementales ou quand le besoin de réactivité ne permet pas de passer par la solution groupe, trop lourde. » Sollan a récemment gagné deux projets avec Alfresco, à la DGAC et chez Renaut F1.
La croissance limite les zones de combat
Le succès de cet éditeur fait d'ailleurs des émules. Ex société de services en logiciels libres (SSLL), le Français Nuxeo a ainsi progicialisé une solution de gestion de contenus. Une démarche imitée par la SSLL Anakeen, qui a lancé en septembre dernier Freedom, autre solution d'ECM Open Source, présentée sur Documation.
Si les solutions Open Source restent pour l'heure cantonnées à des projets départementaux, ces premiers succès dans des organisations par essence prudentes pourraient bien leur ouvrir d'autres horizons. A condition d'encaisser les volumétries de documents qu'absorbent les solutions d'un Documentum, d'un IBM ou d'un OpenText. « Notre capacité en matière de volumétrie reste un différentiateur », selon Jean-François Millasseau d'OpenText. « Mais attention à la montée en charge des solutions Open Source, déjà effective, prévient un autre intégrateur. Même si on dispose de moins de retours d'expérience que sur les grands progiciels ». Pour l'heure, la croissance du marché de la GED en France, 14 % en 2007, limite les frictions entre les deux camps. Pas sûr toutefois que cette drôle de guerre dans la GED soit appelée à s'éterniser.